GOUVERNANCE D'ENTREPRISE - LES BONNES PRATIQUES
/
Les Bonnes Pratiques
de Gouvernance d’Entreprise
« Une responsabilité fiduciaire du conseil d’administration dont les membres engagent leur responsabilité pénale... »
M. Patrick Brochet
Président Commission CNP « Financement des Partenariats »
Directeur Général West Africa Capital Advisors
Publié dans la Revue “Entreprendre Plus” du CNP - Octobre 2020
Construite autour des missions et des valeurs de l’entreprise, la gouvernance d’entreprise (« corporate governance ») est un dispositif mis en place pour diriger et contrôler l’entreprise sur le long terme. La gouvernance protège les droits et les intérêts des actionnaires, mais également ceux des autres parties prenantes internes et externes (managers, collaborateurs, clients, fournisseurs, banques...).
La mise en œuvre de la gouvernance d’entreprise fait partie de la responsabilité fiduciaire du conseil d’administration dont les membres, faut-il le rappeler, engagent leur responsabilité pénale. Ils doivent agir dans l’intérêt de la personne morale ; cette dernière possède un patrimoine, un nom, un domicile, des droits et obligations qui lui sont propres. Sous cet angle, la personne morale est distincte de ses membres (actionnaires, parties prenantes).
En conséquence, pour assumer cette responsabilité fiduciaire dévolue au conseil d’administration, les maîtres mots d’une saine gouvernance d’entreprise sont la transparence, le contrôle, l’équilibre et la responsabilité.
Parmi les activités du conseil, les plus importantes pour asseoir une gouvernance vertueuse et permettre à l’entreprise d’être performante sur la durée, sont :
Au niveau des opérations de l’entreprise :
• Choisir les dirigeants, fixer leur rémunération et proposer un système d’évaluation ;
• Adopter le plan stratégique, le plan d’affaires et les budgets ;
• Veiller à la bonne gestion des risques ;
• Veiller à l’intégrité de l’information financière ;
• Veiller à la conformité aux lois et règlements ;
• Conseiller l’exécutif sur certaines questions importantes ;
• Veiller à la pérennité de l’entreprise et prévoir la relève de ses dirigeants ;
• Veiller à la bonne information des actionnaires.
Au sein du conseil d’administration :
• Auto-évaluer le fonctionnement du conseil ;
• Etablir un processus de sélection des administrateurs ;
• Traiter les conflits d’intérêt potentiels ;
• Promouvoir l’éthique.
Du fait de son rôle de contrôle de la gestion de la société, le conseil d’administration se doit d’avoir un regard critique, mais dénué de toute hostilité vis-à-vis de l’exécutif. Ainsi, les relations entre le conseil d’administration et la direction de l’entreprise doivent être caractérisées par ce que l’on pourrait qualifier de « saine tension » ; conséquence d’une relation de confiance assortie d’un contrôle régulier.
Cependant, il n’est pas rare que l’appréciation de l’exécutif concernant le conseil d’administration soit empreinte des reproches suivants :
• n’apporte pas de valeur ajoutée ;
• trop préoccupé par la conformité aux règles ;
• fait du micro-management ;
• évite les risques à l’excès (immobilisme) ;
• impose ses vues (autoritarisme) ;
• se soucie surtout de ses intérêts ;
• s’implique trop sur le plan stratégique ;
Pour éviter cette situation, le conseil d’administration doit :
• Bien se structurer (savoir-faire : composition du conseil, ordres du jour, clarté des rôles, etc.).
• Bien s’informer (savoir : préparation des réunions, connaissance de l’entreprise, etc.).
• Bien agir (savoir-être : comportement, écoute, communication, etc.)
Afin de garantir la mise en œuvre d’une gouvernance d’entreprise vertueuse, un certain nombre de bonnes pratiques s’imposent au niveau du fonctionnement du conseil d’administration et de ses relations avec l’exécutif.
Nous avons sélectionné ci-dessous, dix (10) bonnes pratiques ressortant d’études menées par le cabinet de conseil en ressources humaines Korn Ferry International :
• Lors de la sélection des administrateurs, s’assurer qu’à travers leur expertise et leur expérience, ils ont la capacité de comprendre le secteur d’activités de l’entreprise, de participer à sa gouvernance et de contribuer au design de l’organisation. L’élaboration d’une matrice des compétences requises par le conseil est un bon moyen de s’en assurer.
• S’assurer que la composition du conseil est diversifiée en termes de profils et de genre, que les membres sont complémentaires et comptent des cadres supérieurs ou dirigeants d’entreprises de tailles comparables. La matrice des compétences peut être utilisée pour ce faire.
• S’assurer de disposer d’un nombre suffisant, voire d’une majorité, d’administrateurs (réellement) indépendants.
• Former les administrateurs sur les défis concurrentiels, technologiques, organisationnels et financiers auxquels l’entreprise est confrontée.
• Elaborer des indicateurs de performance de l’entreprise.
• Procéder à des revues périodiques des plans de carrière des principaux membres de l’exécutif, à l’actualisation du plan de relève de l’entreprise et à l’identification des collaborateurs à haut potentiel.
• Evaluer de façon annuelle et formelle la performance de l’exécutif.
• S’assurer que les administrateurs indépendants contrôlent (présidence, majorité des membres) les comités Gouvernance, Audit, et Rémunérations.
• Evaluer annuellement la performance de chaque administrateur.
• Evaluer de façon régulière la performance du conseil d’administration dans son ensemble.
Pour finir, nous pouvons retenir qu’une gouvernance efficace repose sur quatre grands piliers :
• Crédibilité et légitimité ;
• Processus de planification stratégique ;
• Système d’information et de gestion des risques ;
• Système de motivation et d’incitation à la performance.
D’après Stephen Jarislowsky, gestionnaire de portefeuille réputé au Canada, et président du conseil de Jarislowsky Fraser, « pour un administrateur, la crédibilité et les compétences sont certes nécessaires, mais il faut également de la curiosité et du courage. Il faut par ailleurs s’assurer que les administrateurs comprennent leur rôle tout en ayant du plaisir à siéger ».
La notion de courage de l’administrateur est un aspect très important. Un administrateur doit à tout moment être confortable avec les décisions prises par le conseil d’administration et les assumer pleinement. En cas de désaccord profond, il doit avoir le courage d’exprimer son opposition, exiger que cette opposition soit dûment consignée et aller jusqu’à la démission si les divergences sont trop grandes.