Comment réfléchir en toute liberté sur la liberté d’expression

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Lettre aux professeurs d’histoire-géographie ou comment réfléchir en toute liberté sur la liberté d’expression

par François Héran , le 30 octobre 2020

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Comment enseigner la liberté d’expression ? Par son histoire, propose François Héran, moins républicaine qu’on ne croit et plus respectueuse des croyances. Au lieu d’en faire un absolu, il est temps d’observer que ses conditions d’exercice se déploient dans un temps et un espace déterminés.

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Des professeurs d’histoire-géographie m’ont consulté au sujet du cours d’éducation civique et morale qu’ils devront dispenser à l’issue des vacances de la Toussaint. Comment rendre hommage à Samuel Paty, odieusement assassiné le 16 octobre par un jeune djihadiste tchétchène parce qu’il avait commenté en classe des caricatures de Mahomet ? Quel sens donner à la liberté d’expression ? Comment défendre les valeurs républicaines sans nous isoler du reste du monde ? Certes, les enseignants bénéficieront du « cadrage » préparé par l’Éducation nationale. Certes, ils pourront s’inspirer du fervent hommage rendu par le président Macron dans la cour de la Sorbonne. Et, s’ils le souhaitent, ils pourront revenir sur la lettre de Jean Jaurès aux instituteurs. Mais, si la liberté d’expression nous est chère, nous devons pouvoir lui appliquer aussi notre libre réflexion, à condition de l’appuyer sur des données avérées. C’est le sens des conseils que je me permets de donner ici.

Retour aux textes

Premier conseil : faire découvrir aux élèves des textes « républicains » restés un peu dans l’ombre ces derniers temps. Plus souvent citée que lue, la lettre de Jules Ferry aux instituteurs posait des limites à l’enseignement de la morale : « Demandez-vous si un père de famille, je dis un seul, présent à votre classe et vous écoutant, pourrait de bonne foi refuser son assentiment à ce qu’il vous entendrait dire. Si oui, abstenez-vous de le dire ; sinon, parlez hardiment » (17 novembre 1883). En pleine discussion de la loi sur l’obligation scolaire et la laïcité de l’école primaire publique, Ferry était allé plus loin encore : « Si un instituteur public s’oubliait assez pour instituer dans son école un enseignement hostile, outrageant pour les croyances religieuses de n’importe qui, il serait aussi sévèrement et rapidement réprimé que s’il avait commis cet autre méfait de battre ses élèves ou de se livrer contre eux à des sévices coupables. » (11 mars 1882). Vous avez bien lu : outrager les croyances religieuses des élèves, c’est aussi grave que de leur infliger des châtiments corporels ou abuser d’eux.

Faut-il en conclure que toutes les religions méritent le respect ? Oui, répond l’article 1er de la Constitution de 1958 : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances ». La dernière phrase peut choquer dans le contexte actuel. Certains rêvent peut-être de la modifier et d’affirmer que la République « ne respecte aucune croyance ». Mais, pour l’heure, tel est bien le texte de notre constitution.

Quid, alors, de la « liberté d’expression », cette valeur suprême de la République ? Avec tout le tact nécessaire, vous expliquerez aux élèves que la législation française ne consacre pas littéralement la « liberté d’expression » : la loi de 1881 porte sur la liberté de la presse. D’autres textes évoquent la liberté d’opinion ou de conscience. Mais la « liberté d’expression » va plus loin, elle inclut tous les thèmes et les supports possibles, tout en revêtant une dimension plus individuelle. Ses contours sont si indéfinis qu’elle est presque synonyme de liberté tout court. Comme l’attestent les bases de données du vocabulaire français dressées à partir des millions de textes imprimés depuis 1730, « liberté d’expression » ne décolle dans le vocabulaire juridique et le langage courant qu’à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Elle était inconnue sous la IIIe République : on l’employait dans un sens esthétique (« peindre un sujet avec une grande liberté d’expression »).

La notion apparaît pour la première fois dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme (1948), couplée à la liberté d’opinion : « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. » Le texte a été préparé par le Canadien John Peters Humphrey, chef de la division des Droits de l’Homme aux Nations unies, et révisé par le Français René Cassin, vice-président du comité de rédaction de la déclaration. « Liberté d’expression » est la version française de freedom of expression. C’est seulement en 1950, dans l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, que la locution « liberté d’expression » apparaît seule, dans la plénitude de son sens actuel.

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On s’imagine que nos plus hautes valeurs sont toutes d’origine « républicaine » et ne doivent rien au monde anglo-saxon, volontiers traité en repoussoir. C’est inexact et les élèves doivent le savoir. La « liberté de la presse » elle-même n’est pas fille de la Révolution française, encore moins de la loi de 1881 : on la doit au Virginia Bill of Rights, la Déclaration des droits de Virginie, promulguée en 1776, d’où elle gagnera le reste des États-Unis, puis le monde occidental.

Droits et devoirs de la liberté d’expression

Le Palais des droits de l’homme, Strasbourg

Sur la liberté d’expression, on lira avec profit, à condition de la compléter, la tribune récente (Le Monde du 26 octobre) de Christophe Bigot, spécialiste du droit des médias et avocat de groupes de presse. Il cite le fameux arrêt Handyside, rendu le 7 décembre 1976 par la Cour européenne des droits de l’homme :
« La liberté d’expression constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique, l’une des conditions primordiales de son progrès et de l’épanouissement de chacun. Sous réserve des restrictions mentionnées notamment dans l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, elle vaut non seulement pour les informations ou les idées accueillies avec faveur, ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l’État ou une fraction quelconque de la population. Ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels il n’y a pas de société démocratique. » Si l’on veut honorer la mémoire de Samuel Paty, conclut l’avocat, voilà un « idéal intangible ». Vous remarquerez au passage qu’il est question de démocratie et non de république. La République, en l’espèce, n’est qu’une variante de la démocratie.

Demandez alors à vos élèves de lire l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme :

Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière (…).

Mais voici le second alinéa :

L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui (…).

La liste est longue des « devoirs et responsabilités » qui encadrent la liberté d’expression. Qui donc les définit ? Cela incombe à chaque pays. La Cour de Strasbourg ne juge pas à la place des États souverains, elle vérifie qu’ils régulent la liberté d’expression de façon « proportionnée » par rapport à leur propre législation et à l’état des mœurs. En l’espèce, l’arrêt Handyside de 1976 cité par Me Bigot concluait que les autorités britanniques n’avaient aucunement violé l’article 10 de la convention en ordonnant la saisie et la destruction d’un manuel d’éducation sexuelle pour enfants jugé contraire aux bonnes mœurs britanniques ! Il est donc paradoxal d’invoquer cet arrêt pour honorer la mémoire de Samuel Paty. S’il doit retenir l’attention des élèves, c’est sur un point précis : la liberté d’expression peut inclure l’expression d’idées choquantes ou blessantes, mais toujours dans les conditions admises par la loi.

Liberté offensive ou tolérante ?

Mais alors, que répondre à un élève qui vous opposerait l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : «  la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui  » ? Comme le souligne le politiste Denis Ramond (Raisons politiques 2011/4 et 2013/4), deux interprétations s’opposent : offensive ou tolérante. Dans la lecture offensive, celle de la Cour de Strasbourg, toute parole ou image, même offensante, alimente le débat public et, donc, sert la démocratie. Elle serait bénéfique pour tous, y compris pour la minorité offensée. Une telle position est typiquement « paternaliste » : l’auteur de l’affront sait mieux que ses victimes ce qui est bon pour elles ; il estime que la blessure sera effacée par le surcroît de lumières ainsi dispensé. À la limite, l’offensé devrait remercier l’offenseur de cette belle leçon de liberté, y compris quand le donneur de leçon est un chef d’État étranger. Vous inviterez vos élèves à illustrer les effets de cette théorie à l’aide d’exemples récents.

L’autre interprétation du droit de libre expression prend au sérieux le principe de non-nuisance affirmé en 1789 et le principe du respect des croyances posé en 1882 par Jules Ferry et rappelé dans la Constitution de 1958. C’est une interprétation foncièrement pluraliste. Sur la pluralité des valeurs, vos élèves liront avec profit le philosophe Paul Ricœur (entretien avec Anita Hocquard publié en 1996 dans Éduquer, à quoi bon ?) :

Nous ne vivons pas dans un consensus global de valeurs qui seraient comme des étoiles fixes. C’est là un aspect de la modernité et un point de non-retour. Nous évoluons dans une société pluraliste, religieusement, politiquement, moralement, philosophiquement, où chacun n’a que la force de sa parole. Notre monde n’est plus enchanté. La chrétienté comme phénomène de masse est morte […] et nos convictions ne peuvent plus s’appuyer sur un bras séculier pour s’imposer. […] Préparer les gens à entrer dans cet univers problématique m’apparaît être la tâche de l’éducateur moderne. Celui-ci n’a plus à transmettre des contenus autoritaires, mais il doit aider les individus à s’orienter dans des situations conflictuelles, à maîtriser avec courage un certain nombre d’antinomies.

Et Ricœur de citer trois exemples d’antinomies : préserver l’autonomie de chacun tout en entrant dans un espace public de discussion, appartenir à une tradition vivante sans exclure la présence d’autres traditions, avoir des convictions personnelles tout en pratiquant « une ouverture tolérante à d’autres positions que la sienne ». Il faudra expliquer aux élèves que le pluralisme selon Ricœur n’est pas synonyme de relativisme : c’est une valeur fondamentale de la démocratie.

NUL N’EST PROPRIÉTAIRE DE LA RÉPUBLIQUE

Comment trancher entre ces deux visions de la liberté d’expression, l’offense charitable et le respect d’autrui ? Un procédé expéditif consiste à reformuler le dilemme en termes psychologiques ou moralisants : vous serez « courageux » si vous persistez à offenser l’autre, « lâche » dans le cas contraire. Apprenez donc à vos élèves à ne pas tomber dans un piège sémantique aussi grossier. Cessons de diviser la nation en taxant nos contradicteurs d’« ennemis de la République » ou d’« ennemis de la France » : c’est une façon indigne de les exclure du débat et de les exclure de la nation. Personne n’est propriétaire de la République. Nous avons encore le droit d’accorder un minimum de considération aux croyants ou incroyants sans être accusés de complaisance avec les assassins. Les fidèles musulmans habitués à diviser le monde entre croyants et « mécréants » devront d’ailleurs en tirer les conséquences : c’est au prix de cette révolution mentale qu’ils pourront s’intégrer à la nation. Vous rappellerez aux élèves que la Déclaration universelle des droits de l’homme affirme le droit de changer de religion ou de ne plus croire : c’est la raison pour laquelle l’Arabie saoudite a refusé d’y souscrire. Et si un élève trop cartésien cherchait à savoir pourquoi notre République laïque tisse des liens si forts avec le régime wahhabite, mieux vaut renvoyer la question à la cellule laïcité du rectorat.

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Un conseil de Paul Ricœur aux éducateurs

Paul Ricœur, 2003

Un synonyme fréquent de la prétendue « lâcheté » de ceux qui osent prendre en compte l’existence d’autrui est la « complaisance » ou la « compromission ». Dans l’entretien déjà cité, Ricœur fournit l’antidote à ces sophismes :

Le compromis, loin d’être une idée faible, est une idée au contraire extrêmement forte. Il y a méfiance à l’égard du compromis, parce qu’on le confond trop souvent avec la compromission. La compromission est un mélange vicieux des plans et des principes de références. II n’y a pas de confusion dans le compromis comme dans la compromission. Dans le compromis, chacun reste à sa place, personne n’est dépouillé de son ordre de justification.

On peut appliquer cette leçon à l’accusation infamante de « complaisance » envers le djihadisme ou d’« islamo-gauchisme » – le type même de la formule magique d’exécration qui substitue l’injure à l’analyse et n’a pas sa place en démocratie. Intégrer l’existence d’autrui dans sa vision du monde, ce n’est pas pratiquer la haine de soi, c’est sortir de soi pour se grandir. À condition, bien sûr, que l’effort soit réciproque.

Dans un tweet diffusé à l’attention des pays musulmans, le président Macron écrit : « Nous continuerons. Nous nous tiendrons toujours du côté de la dignité humaine et des valeurs universelles ». Dignité étant effectivement le maître-mot, je ne vous conseille pas d’examiner une à une avec vos élèves les caricatures de Charlie Hebdo, mais plutôt de faire un cours sur l’histoire de la caricature politique et religieuse en France. Vos élèves comprendront qu’en ce domaine comme en d’autres, il y a le meilleur et le pire. Tout le monde n’est pas Daumier, Nadar ou Doré ou, de nos jours, Chappatte, Dilem, Pétillon ou Plantu. Le talent artistique de Cabu reste indépassé, de même que l’autodérision sur nos obsessions sexuelles chère à Wolinski. On connaît la Une de Charlie du 8 février 2006, où Cabu campe le prophète en pleurs s’écriant : « C’est dur d’être aimé par des cons ! », avec cette légende surimprimée : « Mahomet débordé par les intégristes ». La cible est clairement définie, alors que la caricature de Coco, « Une étoile est née », représentant Mahomet nu en prière, offrant une vue imprenable sur son postérieur, visait l’islam tout court. Les attentats, depuis, ont sacralisé toutes les caricatures sans distinction. Comment expliquer aux élèves que nous sommes arrivés au point où c’est justement quand la caricature est nulle, réduite à sa fonction la plus dégradante, sans dimension artistique, humoristique ou politique, qu’elle est censée illustrer à l’état pur la liberté d’expression et nos plus hautes valeurs républicaines, y compris l’affirmation de la dignité humaine ? À l’impossible nul n’est tenu.

POUSSÉE À L’ABSOLU, LA LIBRE EXPRESSION NE TOLÈRE PLUS LA LIBRE CRITIQUE

À la question de savoir si j’ai encore le droit, au pays de la libre expression, de m’indigner du caractère offensant de certaines caricatures sans être accusé de haïr la République, la pesante atmosphère qui règne aujourd’hui me dit que non. Poussée à l’absolu, la libre expression ne tolère plus la libre critique. Les textes constitutionnels que j’ai cités ont beau évoquer le respect des croyances, on peut dire que les djihadistes ont atteint leur but : nous pousser à bout, ériger les caricatures en absolu, au risque d’isoler la France. Vos élèves liront avec profit le sage éditorial de Soulayma Mardam Bey dans le quotidien francophone libanais L’Orient-Le Jour (27 octobre 2020) : « Pour beaucoup de Français, les caricatures sont aujourd’hui le symbole même de leur identité. Pour beaucoup de musulmans au Moyen-Orient, elles sont la négation de la leur. Ce dialogue de sourds prend actuellement des proportions démesurées, chacun se drapant dans une conception puriste et quelque peu anachronique de qui il est, la République pour les uns, l’islam pour les autres, comme si l’une et l’autre, en plus d’être par nature inconciliables, répondaient de surcroît à des critères immuables, hermétiques au temps et à l’espace. »

De fait, il est tout aussi vain de camper sur l’unicité de la République, source exclusive de toute valeur, que de pousser à l’extrême l’idéologie politique de l’unicité en islam, la fameuse tawhid. Professeurs d’histoire-géographie, votre mission est justement de rappeler que nous sommes plongés dans le temps et dans l’espace, que nos valeurs les plus chères, y compris la liberté d’expression, ont une histoire souvent venue d’ailleurs, et que nous devons garder prise sur leur définition et leurs conditions d’exercice. Je sais : cette tâche dépasse vos forces et le « cadrage » officiel a ses limites. Mais si vous voulez faire de vos élèves des citoyens et, tout simplement, des adultes, apportez-leur tous les éléments du débat, comme j’ai essayé de le faire ici. Ne les enfermez pas dans des vérités toutes faites. Ils méritent mieux que cela.

par François Héran, le 30 octobre

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LES INDEMNITES DE FIN DE CARRIERE

Revue “Entreprendre Plus” du CNP - Octobre 2020

Revue “Entreprendre Plus” du CNP - Octobre 2020

Souscrire un contrat d’assurance retraite

« Les avantages pour les Entreprises d’une externalisation des indemnités de fin de carrière (IFC) ... »

Pour écouter l’émission radio du CNP produite en partenariat avec l’AAS, cliquer sur la flèche ci-dessous ( durée 47 mn)

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Association des Assureurs du Sénégal - AAS

Lors du départ à la retraite d’un salarié ou de son licenciement, son entreprise a l’obligation de lui verser un capital, plus connu sous le nom d’indemnité de fin de Carrière (IFC). Le cumul de cette obligation légale à l’échelle de tous les employés est une charge financière très importante qui, si elle n’est pas bien planifiée, peut impacter fortement la trésorerie de l’entreprise. D’où l’intérêt pour l’entreprise d’en externaliser la gestion à travers une assurance IFC.

Bases légales de l’assurance indemnités fin de carrière

La Convention Collective Nationale Interprofessionnelle (CCNI) du 27 mai 1982, révisée au 31 décembre 2019, fait obligation aux entreprises de servir à leurs employés des indemnités en cas de :

•    départ à la retraite ;

•    de licenciement ;

•    ou de décès

Les droits à l’IFC sont en conséquence un engagement de toute entreprise vis-à-vis de ses salariés et font partie de son passif social ; le montant correspondant  doit dès lors figurer à l’annexe du bilan.

Contrat d’assurance Indemnités de Fin de Carrière (IFC)

Nature : Contrat collectif d’assurance sur la vie à adhésion obligatoire souscrit auprès d’une compagnie d’assurance.

Objectif : Préparer le financement des obligations à l’IFC telles que prévues par la CCNI.

En cas de cessation des activités de l’entreprise, les fonds gérés par la compagnie d’assurances sont utilisés pour payer les droits acquis par l’ensemble des agents. En cas d’insuffisance du solde du fonds, les droits pourront être payés au prorata. Si par contre, le solde du fonds dépasse le cumul des droits acquis, le reliquat sera directement reversé à l’entreprise après règlement de tous les droits à l’IFC acquis.

Temps de présence

POURCENTAGES APPLICABLES

 

 

Départ à la retraite ou de décès Licenciement

De la 1ère à la 5ème année 25% 25%

De la 6ème à la 10ème année 30% 30%

De la 11ème à la 20ème année 45% 40%

Au-delà de la 20ème année 50% 40%

Modalités de calcul des droits à l’IFC

Conformément aux dispositions des articles 80 et 84 de la CCNI, pour chaque année de service, l’employé acquiert une indemnité égale à un % de son salaire mensuel de référence des 12 derniers mois qui précédent son départ.

Si l’entreprise dispose d’une convention spécifique ou en cas d’existence d’une convention de son secteur d’activité, l’employé se verra appliquer la convention la plus favorable.

Avantages de l’externalisation des droits à l’IFC

La norme comptable internationale IAS 19 ainsi que l’Ordre des Experts Comptables recommandent aux entreprises de provisionner leurs engagements au titre des droits de leurs agents à l’IFC.

Toutefois, ce provisionnement en interne présente le risque de la tentation de détournement d’objectif ou tout simplement d’utilisation des fonds pour faire des investissements parfois très risqués.

Dès lors, les entreprises doivent privilégier l’externalisation des droits à l’IFC aux fins de bénéficier des avantages ci-après :

•    baisse des charges futures de l’entreprise grâce notamment à une revalorisation annuelle du fonds.

•    Sécurisation dans le temps des droits des employés ;

•    Rassurer les collaborateurs sur la préservation et la sécurisation de leurs droits. À ce titre, l’assurance IFC est un excellent outil de gestion des ressources humaines.

•    Avantages fiscaux avec la déductibilité des cotisations versées à cet effet du revenu imposable de l’entreprise conformément aux dispositions du CGI (Art. 9, alinéa 6) ;

•    Insaisissabilité du fonds placé chez l’Assureur.

Pour ne pas déséquilibrer la trésorerie de votre entreprise et bénéficier d’un cadre fiscal avantageux, mais surtout, sécuriser les droits actuels et futurs acquis par vos salariés et pouvoir faire face, le moment venu, à l’ensemble de vos engagements au titre de l’IFC, pensez à souscrire à la solution d’assurance Indemnités de Fin de Carrière proposée par toutes les compagnies d’assurance vie du marché.

L’Association des Assureurs du Sénégal - BP 1766 – DAKAR – Tel (221) 33 889-48-64 ; Fax : (221) 33 821-49-74 ; e-mail : fssa@orange.sn

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L’ENTREPRISE CITOYENNE

Le magazine radiophonique du Conseil National du Patronat

En partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer

L’externalisation de l’indemnité de Fin de Carrière – IFC

Quels avantages pour les entreprises ?

 

CONTEXTE DE L’EMISSION

L’indemnité de Fin de Carrière – IFC est un acquis consacré dans la convention collective interprofessionnelle, qui fait obligation aux entreprises de verser à tout travailleur allant à la retraite un montant calculé sur la base de son salaire et de son ancienneté.

Les entreprises ont le choix entre gérer ces fonds en interne ou externaliser leur traitement auprès d’une compagnie d’assurance, moyennant un abattement fiscal et la garantie de la sécurisation de ces fonds

Il reste aux travailleurs à s’assurer que leur employeur respecte ses engagements afin d’éviter des complications au moment d’entrer dans leurs droits

 

ANNONCE DU CNP

Le Conseil National du Patronat - CNP a diffusé le samedi 28 novembre 2020 de 11h à 12h sur Radio Sénégal International - RSI 92.5 FM, son émission radiophonique "l'Entreprise Citoyenne", produite en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer.

Thème : L'externalisation des Indemnités de Fin de Carrière - IFC : Quels avantages pour les entreprises ?

Avec comme invités :

-M. Mamadou FAYE - Président de la Commission Statistiques, Comptabilité, Fiscalité et Conformité de l'Association des Assureurs du Sénégal - AAS,

-M. Papa Seyni THIAM - Président de la Commission Assurance Vie de l'Association des Assureurs du Sénégal - AAS. 

 CONDUCTEUR DE L’EMISSION :

00’ 18”  - Introduction

02’ 19” - M. Mamadou FAYE - Président de la Commission Statistiques, Comptabilité, Fiscalité et Conformité de l'Association des Assureurs du Sénégal - AAS,

32’ 54” - M. Papa Seyni THIAM - Président de la Commission Assurance Vie de l'Association des Assureurs du Sénégal - AAS. 

46’ 20” - Générique Fin

46’ 56” - Fin de l’émission

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GOUVERNANCE D'ENTREPRISE - LES BONNES PRATIQUES

Revue “Entreprendre Plus” du CNP - Octobre 2020

Revue “Entreprendre Plus” du CNP - Octobre 2020

Les Bonnes Pratiques
de Gouvernance d’Entreprise

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« Une responsabilité fiduciaire du conseil d’administration  dont les membres engagent leur responsabilité pénale... »

M. Patrick Brochet

Président Commission CNP « Financement des Partenariats »

Directeur Général West Africa Capital Advisors

Publié dans la Revue “Entreprendre Plus” du CNP - Octobre 2020

Construite autour des missions et des valeurs de l’entreprise, la gouvernance d’entreprise (« corporate governance ») est un dispositif mis en place pour diriger et contrôler l’entreprise sur le long terme. La gouvernance protège les droits et les intérêts des actionnaires, mais également ceux des autres parties prenantes internes et externes (managers, collaborateurs, clients, fournisseurs, banques...).

La mise en œuvre de la gouvernance d’entreprise fait partie de la responsabilité fiduciaire du conseil d’administration dont les membres, faut-il le rappeler, engagent leur responsabilité pénale. Ils doivent agir dans l’intérêt de la personne morale ; cette dernière possède un patrimoine, un nom, un domicile, des droits et obligations qui lui sont propres. Sous cet angle, la personne morale est distincte de ses membres (actionnaires, parties prenantes).


En conséquence, pour assumer cette responsabilité fiduciaire dévolue au conseil d’administration, les maîtres mots d’une saine gouvernance d’entreprise sont la transparence, le contrôle, l’équilibre et la responsabilité.

Parmi les activités du conseil, les plus importantes pour asseoir une gouvernance vertueuse et permettre à l’entreprise d’être performante sur la durée, sont :

Au niveau des opérations de l’entreprise :

    Choisir les dirigeants, fixer leur rémunération et proposer un système d’évaluation ;

    Adopter le plan stratégique, le plan d’affaires et les budgets ;

    Veiller à la bonne gestion des risques ;

    Veiller à l’intégrité de l’information financière ;

    Veiller à la conformité aux lois et règlements ;

    Conseiller l’exécutif sur certaines questions importantes ;

    Veiller à la pérennité de l’entreprise et prévoir la relève de ses dirigeants ;

    Veiller à la bonne information des actionnaires.

Au sein du conseil d’administration :

    Auto-évaluer le fonctionnement du conseil ;

    Etablir un processus de sélection des administrateurs ;

    Traiter les conflits d’intérêt potentiels ;

    Promouvoir l’éthique.

Du fait de son rôle de contrôle de la gestion de la société, le conseil d’administration se doit d’avoir un regard critique, mais dénué de toute hostilité vis-à-vis de l’exécutif. Ainsi, les relations entre le conseil d’administration et la direction de l’entreprise doivent être caractérisées par ce que l’on pourrait qualifier de « saine tension » ; conséquence d’une relation de confiance assortie d’un contrôle régulier.

Cependant, il n’est pas rare que l’appréciation de l’exécutif concernant le conseil d’administration soit empreinte des reproches suivants :

    n’apporte pas de valeur ajoutée ;

    trop préoccupé par la conformité aux règles ;

    fait du micro-management ;

    évite les risques à l’excès (immobilisme) ;

    impose ses vues (autoritarisme) ;

    se soucie surtout de ses intérêts ;

    s’implique trop sur le plan stratégique ;

Pour éviter cette situation, le conseil d’administration doit :

    Bien se structurer (savoir-faire : composition du conseil, ordres du jour, clarté des rôles, etc.).

    Bien s’informer (savoir : préparation des réunions, connaissance de l’entreprise, etc.).

    Bien agir (savoir-être : comportement, écoute, communication, etc.)

Afin de garantir la mise en œuvre d’une gouvernance d’entreprise vertueuse, un certain nombre de bonnes pratiques s’imposent au niveau du fonctionnement du conseil d’administration et de ses relations avec l’exécutif.

Nous avons sélectionné ci-dessous, dix (10) bonnes pratiques ressortant d’études menées par le cabinet de conseil en ressources humaines Korn Ferry International :

    Lors de la sélection des administrateurs, s’assurer qu’à travers leur expertise et leur expérience, ils ont la capacité de comprendre le secteur d’activités de l’entreprise, de participer à sa gouvernance et de contribuer au design de l’organisation. L’élaboration d’une matrice des compétences requises par le conseil est un bon moyen de s’en assurer.

    S’assurer que la composition du conseil est diversifiée en termes de profils et de genre, que les membres sont complémentaires et comptent des cadres supérieurs ou dirigeants d’entreprises de tailles comparables. La matrice des compétences peut être utilisée pour ce faire.

    S’assurer de disposer d’un nombre suffisant, voire d’une majorité, d’administrateurs (réellement) indépendants.

    Former les administrateurs sur les défis concurrentiels, technologiques, organisationnels et financiers auxquels l’entreprise est confrontée.

    Elaborer des indicateurs de performance de l’entreprise.

    Procéder à des revues périodiques des plans de carrière des principaux membres de l’exécutif, à l’actualisation du plan de relève de l’entreprise et à l’identification des collaborateurs à haut potentiel.

    Evaluer de façon annuelle et formelle la performance de l’exécutif.

    S’assurer que les administrateurs indépendants contrôlent (présidence, majorité des membres) les comités Gouvernance, Audit, et Rémunérations.

    Evaluer annuellement la performance de chaque administrateur.

    Evaluer de façon régulière la performance du conseil d’administration dans son ensemble.

Pour finir, nous pouvons retenir qu’une gouvernance efficace repose sur quatre grands piliers :

    Crédibilité et légitimité ;

    Processus de planification stratégique ;

    Système d’information et de gestion des risques ;

    Système de motivation et d’incitation à la performance.

D’après Stephen Jarislowsky, gestionnaire de portefeuille réputé au Canada, et président du conseil de Jarislowsky Fraser, « pour un administrateur, la crédibilité et les compétences sont certes nécessaires, mais il faut également de la curiosité et du courage. Il faut par ailleurs s’assurer que les administrateurs comprennent leur rôle tout en ayant du plaisir à siéger ».

La notion de courage de l’administrateur est un aspect très important. Un administrateur doit à tout moment être confortable avec les décisions prises par le conseil d’administration et les assumer pleinement. En cas de désaccord profond, il doit avoir le courage d’exprimer son opposition, exiger que cette opposition soit dûment consignée et aller jusqu’à la démission si les divergences sont trop grandes.

REUSSIR LA TRANSMISSION DE SON ENTREPRISE

Revue “Entreprendre Plus” du CNP - Octobre 2020

Revue “Entreprendre Plus” du CNP - Octobre 2020

Réussir la Transmission
de son Entreprise

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« Toutes les entreprises ne peuvent être cédées de la même manière…»

Me Aïda DIAWARA DIAGNE - Notaire

La transmission d’entreprise équivaut au transfert par le ou les associés d’une société à un ou des tiers, à des membres de la famille du chef d’entreprise ou desdits associés soit au moyen d’une vente ou cession ou d’une donation.

Que l’on cède ou que l’on transmette son entreprise, l’objectif visé reste le même : il s’agit de transférer tout ou partie du capital social ou des actifs à un repreneur quel qu’il soit. Si la cession ou la transmission ont le même objectif, au plan fiscal, les effets différent, la cession supposant un prix et la transmission s’effectuant en général à titre gratuit.

Bon nombre de professionnels préfèrent acquérir une société ou une activité déjà lancée, viable de manière à la poursuivre plus aisément. Toutefois, si toutes les activités peuvent à priori être cédées, il peut arriver que la cession ne puisse être réalisée soit parce que l’activité est réglementée (exemple : cliniques, pharmacies, etc.) soit parce qu’une situation de fait entre les associés la rend impossible.

Cadre juridique et réglementaire

La transmission d’entreprise peut intervenir, selon la forme sociale choisie pour l’exercice de l’activité (société commerciale SA, SARL ou autre, entreprise individuelle) soit au moyen d’une cession de titres ou d’une cession de fonds de commerce par exemple ou plus simplement au moyen d’une donation dans le cadre d’une transmission familiale.

Les conditions de la cession ou de la transmission dépendront donc du statut juridique de l’entreprise et des facteurs propres à l’environnement de l’entreprise.

Comme indiqué supra, toutes les activités peuvent a priori être cédées. Il existe toutefois des situations de fait ou de droit qui rendent la cession compliquée, voire impossible en totalité.

En règle générale, la transmission ou la cession de l’entreprise découle soit d’une volonté de se retirer professionnellement  en raison de l’âge et d’organiser sa suite par exemple, soit, plus simplement, d’une volonté de changer d’orientation professionnelle

Pour d’autres, il s’agira simplement d’anticiper le manque de moyens face à un développement nécessaire à la poursuite de l’activité.

En tout état de cause, et quelle que soit la raison qui pousse le ou les entrepreneurs à procéder à une cession ou une transmission de l’entreprise, la recommandation première qui s’impose est la nécessité de s’entourer de « sachants » en vue de sécuriser le processus.

En effet, les négociations en vue de la reprise de l’activité étant bien souvent longues et complexes,  il est recommandé pour le cédant  de procéder aux audits comptable, juridique et fiscal nécessaires et de veiller à faire signer au préalable au futur repreneur :

Une lettre d’intention fixant le cadre et les conditions de la reprise de l’activité,

Mais surtout un accord de confidentialité, ce dans le souci de protéger les informations sensibles qui vont lui être communiquées et d’éviter qu’en cas de désaccord, lesdites informations puissent être divulguées.

S’agissant d’une transmission à titre gratuit, elle peut s’opérer soit par donation voire donation-partage, soit par voie testamentaire.

Un tel choix nécessitera l’intervention d’un professionnel du droit qui pourra alors guider le cédant et l’assister pour régler au mieux sa succession dans l’intérêt de tous les héritiers mais surtout dans un souci de pérennité de l’entreprise cédée.

Il est également possible de ne céder qu’une branche d’activité au moyen d’un apport partiel

La transmission d’entreprise s’inscrit donc dans un cadre réglementaire très étendu qui touche le Droit OHADA sur les sociétés, le droit commercial, le Code des obligations civiles et commerciales, le Code de la Famille, le droit du travail voire même les procédures collectives s’il y a lieu.

En effet une bonne transmission nécessitera la maîtrise de toutes les données de l’entreprise dans les domaines aussi variés que ceux cités pour assurer une reprise sans heurts.

Conseils du Notaire au regard des enjeux familiaux, financiers et fiscaux :

Le meilleur conseil qui puisse être donné aux chefs d’entreprises désireux de céder leurs activités au regard des divers enjeux liés à la transmission de leurs entreprise, c’est l’anticipation : Ne pas attendre le dernier moment pour procéder aux audits juridique, comptable et financier que tout repreneur demandera avant de s’engager dans la reprise d’une activité.

Une bonne transmission nécessite une bonne préparation d’abord dans le souci de rassurer le repreneur éventuel mais surtout pour bien valoriser son patrimoine et optimiser l’opération.

Anticiper sur les audits permettra au cédant de circonscrire avec précision les conséquences juridiques et fiscales de l’opération envisagée mais surtout d’avoir une base de valorisation du bien devant être cédé, de passer en revue les actifs et éventuellement le passif de l’entreprise.

Au plan juridique et fiscal, l’audit permettra d’étudier les clauses statutaires, de voir s’il n’existait pas par exemple des pactes d’associés ou des clauses particulières empêchant la cession telle que l’existence de droit de préemption, de clauses d’agrément ou autres clauses particulières.

Anticiper la transmission de son entreprise permet également d’éviter qu’au décès du propriétaire, l’entreprise ne soit cédée, comme le veut la loi, automatiquement aux héritiers (conjoint et descendants) avec le risque que ces derniers ne puissent poursuivre l’activité du défunt.

Dès lors, il est recommandé pour un entrepreneur, quel qu’il soit , de préparer sa succession et de choisir, pendant qu’il en a les moyens et la volonté, le futur repreneur de son entreprise.

LA RESTITUTION DES OEUVRES D'ART AFRICAIN

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LA QUESTION DES RESTITUTIONS EST INSCRITE DANS L'ADN DES INDÉPENDANCES

Les députés français ont donné leur feu vert pour la restitution de 26 œuvres d'art au Bénin et d'un sabre au Sénégal. Marie-Cécile Zinsou, historienne de l'art explique "qu'il ne s'agit pas de vider les musées français au profit du continent africain"

Publication 09/10/2020

Près de trois ans après le discours d'Emmanuel Macron à Ouagadouou, les députés français ont donné leur feu vert pour la restitution de 26 œuvres d'art au Bénin et d'un sabre au Sénégal. Marie-Cécile Zinsou, franco-béninoise, historienne de l'art et présidente de la Fondation Zinsou, explique "qu'il ne s'agit pas de vider les musées français au profit du continent africain" mais de rendre un patrimoine accessible aux jeunes béninois et sénégalais : "Nous sommes là pour créer l'avenir" dit-elle.

Le problème doit être analysé "d'une façon ouverte" souligne Hamady Bocoum, directeur du Musée des civilisations noires de Dakar : "La question des restitutions est inscrite dans l'ADN des indépendances [...], elle dépasse l'Afrique et implique aussi l'Europe".

Video: cliquer sur le lien : https://youtu.be/ImddPzQBj4E

La presse, prurit de notre démocratie - Par Jean Pierre Corréa


Contribution

La presse, prurit de notre démocratie (Par Jean Pierre Corréa)

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Par: Jean Pierre CORRÉA - Seneweb.com | 29 septembre, 2020

On ne peut pas continuer à être navrés par la qualité des "informations" que ces journaux nous dégueulent, confortés par la certitude hélas souvent validée, qu'ils ne font que donner aux Sénégalais ce que leurs désirs de frivolité requièrent.

"La faute n'est donc pas au public, qui demande des sottises, mais à ceux qui ne savent pas lui servir autre chose." Miguel de Cervantès.

D'abord, la question à 100 balles : quel est l'apport de la vingtaine de quotidiens sénégalais à notre démocratie et à l'animation des cruciaux débats qui la traversent et qui sont sensés disposer notre cher Sénégal dans le temps du monde ?

Cette question me venait souvent à l'esprit, rien qu'à la vue de cette pléthore de journaux pendus dans nos rues, à des cordes à linge, et qui attirent tels des "mouches à merde", tous ces "titrologues" qui une fois repus de cette surenchère de "Unes" vendeuses et aguicheuses, s'en vont les commenter, faisant ainsi du "titre" la quintessence de l'information. Mais une opportunité professionnelle, m'ouvrant le bonheur de revenir à un des exercices préférés de mon métier de journaliste, la revue de presse, que je délivrerai chaque matin sur le site en ligne d'un grand quotidien sénégalais, m'a mis en situation depuis une dizaine de jours, parce que devant reprendre les marques de ce genre, de lire tout ce qui paraît et se considère comme estampillé "presse"… D'un rire un peu narquois, je dirai qu'on passe plus de temps à les compter qu'à les lire… Mais plus sérieusement, pour faire chaque matin une revue de presse digne de ce que ce genre journalistique requiert et implique, il s'est naturellement et éthiquement imposé à moi, le devoir de ne considérer pour poser une vraie revue de l'actualité, que les titres qui méritent d'être ce que l'on appelle "un journal", avec un "ourse" qui en honore le contenu et des "plumes" qui en illuminent la ligne éditoriale.

Comment notre espace médiatique s'est-il retrouvé saturé par cette pléthore de journaux qui se disputent la délicate mission de nous livrer les clés d'une actualité qui sous nos latitudes ne mérite pas tant de pages noircies ? Il convient d'interroger le modèle économique, qui a voulu offrir une information de qualité, populaire et éclectique au plus grand nombre, et au plus bas prix. Et ainsi naquit "le journal à 100 balles", qui ne peut pas évidemment coûter 100 balles. Un journal qui paye ses journalistes, au prix de leurs talents consacrés par les diplômes adéquats, leur donne les moyens d'investigations nécessaires, respecte leurs droits sociaux, les met dans les meilleures conditions technologiques d'exercice de leur métier, leur assure des salaires qui les mettent à l'abri du "transport corrupteur", un journal qui coche toutes ces cases, ne peut pas coûter 100 balles ! Surtout lorsque son tirage ne dépasse pas les 1 000 exemplaires dont seule la moitié est péniblement vendue…

Faire une revue de presse qui soit respectueuse du genre et des auditeurs, dans ce magma glauque de journaux improbables, impose un tri sélectif qui fasse part belle à l'information générale, et aux problématiques de société qui participent à la maturation de nos populations et respectent leurs intelligences. On ne peut continuer à subir les "groupes de pression" tapis derrière un Dirpub unique rédacteur de son torchon, qui se mue en sniper à la solde d'un adversaire politique ou économique, pour abattre un homme ou "carboniser" un enjeu économique, ou en maître chanteur, qui allongé dans un lounge d'hôtel de luxe avec son ordinateur diffuse de fausses nouvelles en espérant un démenti qui les accrédite ou un bon arrangement sonnant et trébuchant. On ne peut se laisser informer par des journalistes qui après deux années de rédaction dans un journal où pas un de leurs articles n'a fait avancer aucune idée ou cause, s'acoquinent avec un homme politique qui y blanchissant d'obscurs deniers, pour créer un organe de presse, qui abritera les pensées d'hommes obsolètes, qui viennent y déverser en une et sur deux pages des banalités dont personne ne leur a demandé de nous abreuver du haut de leur vulgaire prétention.

"Babacar Touré, Réveille-toi ! Ils sont contents d'être vils !

Qu'importe qu'il faille salir quelqu'un ou insulter la vérité. Le choix est clair. Parfois, que dis-je, souvent nos journalistes préfèrent être les premiers à dire une connerie qu'être les derniers à dire la vérité. Pourquoi se gêneraient-ils d'ailleurs puisque diffamer n'a aucune conséquence, et qu'on peut affirmer des fadaises, vautrés dans des approximations, juger une personne en toute désinvolture et trouver, fort de notre incompétence assumée, de troublants mais intéressés arrangements avec la vérité.

Il est urgentissime de donner aux sénégalais la presse qu'ils méritent et le respect qu'on leur doit. On ne peut pas continuer à être navrés tous les jours par le niveau et la qualité des "informations" que ces journaux, sites improbables, nous dégueulent chaque jour, confortés par la certitude, hélas souvent validée, qu'ils ne font que donner aux sénégalais ce que leurs désirs de frivolité et de vulgarité requièrent.

Tout n'est pas permis parce qu'on est journaliste… Une des dernières chroniques de Babacar Touré nous éclairait en nous enjoignant qu'"au total, c'est bien aux citoyens, - dont les journalistes - soucieux de la valeur de leur fonction, de leur éminente contribution dans la société, de la dignité de leur profession, de se faire respecter et de défendre becs et ongles leurs droits inaliénables. La liberté de presse tire son origine et sa substance dans la liberté d'expression du citoyen, de la citoyenne, en tant que droit fondamental et universel de la personne humaine dont elle est un des modes et parmi les modalités de mise en œuvre concrète et effective. Ne l'oublions jamais. La norme, c'est la liberté. Quant à la doctrine, elle s'ancre dans la responsabilité".

Nous avons le devoir que les revues de presse ne deviennent pas des "revues de presque", avec des flibustiers en guise de journalistes et des titres provocateurs en guise d'informations. Il faut que cesse l'ère du soupçon qui nous oblige à lire un papier à deux fois pour y déceler souvent des relents fleurant bon la commande et la corruption, voire parfois une demande d'exécution d'une personnalité.

Quelle est aujourd'hui la ligne éditoriale de certains "canards" qui abritent ces nouveaux chiens de garde ? Il s'agit seulement de proposer aux chalands les "Unes" les plus vendeuses, et qui sont souvent les plus choquantes. La déontologie n'est enseignée nulle part dans les écoles de journalisme. C'est juste le mot qui dans notre profession remplace le mot passeport et visa de ce métier : l'éducation… Mais si déjà petits leurs propres mères les insultaient de mères…nous sommes mal barrés…

Question subsidiaire : Quelle est la définition de la pudeur ? C'est éteindre la lumière avant de lire certains quotidiens. Voire, après les avoir lus, renouveler ses ablutions. Je souhaite finir mes revues de presse sans me sentir souillé et respectueux de l'intelligence que j'accorde à mes auditeurs… C'est ma liberté…C'est ma responsabilité.

La RSE : une démarche bien plus complexe qu'il n'y paraît

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La RSE : une démarche bien plus complexe qu'il n'y paraît

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Wally Ndiaye est project manager chez Square, et consultant en stratégie et organisation des banques et compagnies d'assurances

Wally Ndiaye est project manager chez Square, et consultant en stratégie et organisation des banques et compagnies d'assurances

Publié par Wally Ndiaye - groupe Square le 11 sept. 2020 

La RSE est dans l'air du temps et encore plus en cette période post-confinement où l'on envisage de redémarrer la vie économique sur des bases éventuellement plus solidaires et/ou durables.

Paradoxalement, la RSE demeure floue dans les esprits quant à sa définition, ses moyens et sa légitimité. Mettre en oeuvre une démarche de RSE c'est, en amont, mettre en place toute une organisation dédiée à l'exécution d'une politique globale, s'inscrivant sur un horizon de 3 à 5 ans, composée de sous-politiques sociale, sociétale et environnementale rigoureusement pilotées et évaluées par une gouvernance ad hoc, loin des clichés réducteurs limitant la RSE à des initiatives isolées et spontanées.

Les enjeux d'une politique RSE bien plus larges que les simples idées reçues

Contrairement aux idées reçues, le terme RSE ne veut pas dire Responsabilité Sociale d'Entreprise comme son nom pourrait le faire croire en anglais (CSR pour Corporate Social Responsability) et comme on pourrait l'entendre encore à ce jour. Si la notion de RSE recouvre les mêmes principes que la CSR anglo-saxonne, sa signification est, en français, Responsabilité Sociétale d'Entreprise. Aussi traite-telle de trois volets : un volet sociétal, un volet environnemental et un volet social faux-ami du mot anglais " social ".

Le mot sociétal désigne l'ensemble des engagements en faveur du développement durable (impact territorial, économique et social de l'activité de l'entreprise), des relations entretenues avec les personnes ou les organisations intéressées par l'activité de la société, la gestion responsable de la sous-traitance et des relations fournisseurs. L'environnemental concerne la politique générale de l'entreprise en la matière, la pollution et gestion des déchets, l'utilisation durable des ressources, la prise en compte du changement climatique (empreinte carbone), la protection de la biodiversité. Le social enfin désigne tout ce qui a trait à l'emploi, l'organisation du travail, les relations sociales, la santé et la sécurité, la formation, l'égalité de traitement, le respect des conventions de l'Organisation Internationale du Travail (OIT).

Une démarche incitée

Pour aller plus loin dans la compréhension, il est pertinent d'appréhender les enjeux de la matière au travers de ses cadres de référence : son cadre réglementaire et légal et ses différents référentiels (1).

Si la RSE est une démarche d'entreprise largement volontaire jusqu'à ce jour, il existe quand même un cadre réglementaire et légal qui oblige et incite à mener des actions responsables. Ces dernières sont relatives notamment aux obligations à respecter les normes environnementales en vigueur (écotaxes, subventions des énergies renouvelables), mais aussi aux incitations fiscales à mener des actions de soutien à l'économie française (exemple : réduction d'impôt pour les investissements dans les PME, au travers des Fonds Communs de Placement dans l'Innovation ou des Fonds d'Investissement de Proximité).

Lire aussi Impact : ces entreprises qui changent le monde

Une démarche normalisée, organisée et pilotée

La RSE volontaire et désintéressée (financièrement parlant) est celle qui nous intéresse ici. Elle dispose d'un cadre de référence propre dont les éléments les plus connus sont : le Pacte Mondial des Nations-Unis relatif au Développement durable (UN Compact), la Global Reporting Initiative (GRI), la norme ISO 26000, les guides de reporting RSE dont celui du Medef et les labels responsables (ex : labels dits " verts ").

Prenons ainsi l'exemple d'une démarche RSE rigoureusement menée au sein d'une entreprise pour être plus explicite. Sur le volet social une démarche RSE pourrait mettre en place un ensemble d'actions en faveur de son personnel tel que des congés second parent de cinq semaines, l'autorisation illimitée du télétravail et adopter une culture d'essaimage et d'entrepreneuriat. Sur le volet environnemental, une démarche RSE crédible évaluerait le bilan carbone de son activité dans un rapport ad hoc réalisé par un expert et tiers indépendant. Enfin sur le volet sociétal, on pourrait envisager par exemple le financement et/ou l'accompagnement de demandeurs d'emploi ou de travailleurs en difficultés financières et ce surtout en cette période post-crise sanitaire.

Enfin, l'évaluation de la démarche RSE est fondamentale. Elle donne à cette dernière toute sa légitimité. C'est alors qu'intervient un acteur incontournable de la " chaine de valeur " venant attester de la réalité des informations communiquées dans les rapports RSE fournis par l'entreprise : un tiers indépendant(2) accrédité par le Comité français d'accréditation (Cofrac), unique instance nationale d'accréditation. Cette évaluation se fait sur la base d'un grand nombre d'indicateurs de performance dûment analysés pour chacun des 3 volets de la matière.

Vous l'aurez compris, la RSE n'est donc pas qu'un " simple " projet humanitaire ou un ensemble d'engagements écologiques isolés mais bien une politique globale à moyen et long terme comprenant de sérieuses sous-politiques sociale, sociétale et environnementale pilotées via des indicateurs de performance et évaluées par un tiers de confiance indépendant et accrédité. Autrement, il conviendrait de parler de bonnes oeuvres mais pas de RSE. Une gouvernance est à mettre en place afin d'élaborer puis d'implémenter une politique RSE.

Si la notion de RSE n'est pas encore bien maîtrisée du grand public, malgré son impact de développement durable reconnu de tous, cela est sans doute dû à son caractère non obligatoire pour toutes les entreprises à ce jour : seules sont concernées les sociétés cotées, les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions dont le total de bilan ou le chiffre d'affaires est au minimum de 100 millions d'euros et dont le nombre moyen de salariés est au moins de 500.

Demain, toutes les entreprises seront incitées positivement à la responsabilité sociétale, toutes seront familières à cette vision partagée, la société se transformera progressivement devenant, ainsi, plus solidaire.

(1)Sources : Formes de régulation et d'intervention en matière de RSE, Université de Lille 1, Bruno Boidin ; Labels environnementaux, ADEME, https://www.ademe.fr/labels-environnementaux ; Reporting RSE, Les nouvelles dispositions légales et réglementaire, Mouvement des Entreprises de France, Mai 2012

(2)Il est cependant possible d'être accrédité par d'autres organismes européens.

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La RSE souffrirait-elle encore d’idées reçues ?

23/septembre/2020

Quand beaucoup pensent bien connaitre la RSE, en réalité elle demeure encore floue dans les esprits quant à sa définition, ses moyens et sa légitimité. Trois illustrations de clichés à ce sujet : – Une entreprise qui participe à des actions humanitaires (quel qu’en soit le volume de sa générosité) ne s’inscrit pas nécessairement dans une démarche RSE – Une fondation menant des activités de mécénat n’est qu’un instrument RSE ne garantissant pas, lui-seul, la légitimité des actions RSE engagées – Instaurer et exécuter une politique « d’Engagement écologique » n’est qu’une composante d’une politique RSE plus globale.

Essayons de dissiper ici le trouble autour de cet acronyme en commençant par en rappeler sa définition. Le terme RSE signifie Responsabilité Sociétale d’Entreprise et non Responsabilité Sociale d’Entreprise comme son nom pourrait le faire croire en anglais CSR (Corporate Social Responsability). Mais ces trois lettres sont encore réductrices de sens puisqu’il s’agit de Responsabilité Sociétale, Sociale et Environnementale d’Entreprise. Le terme RSE aurait pu être substitué par « RSSEE » pour être plus explicite.

Avant d’aller plus loin dans nos propos, peut-être est-il bon de relever que la responsabilité de l’entreprise n’est pas née avec la RSE. En effet, nous pouvons dire sans trop nous aventurer que la responsabilité sociétale en France est au moins aussi « ancienne » que la responsabilité civile pour laquelle une entreprise sera toujours tenue responsable en cas de dommage causé à autrui. Si ce principe paraît évident, énoncé comme tel, il n’est vrai que depuis l’arrêt en cassation de la chambre civile 2ième du 17 juillet 1967[1]. Mais encore faut-il prouver l’existence du dommage, son fait générateur et le lien de causalité entre les deux.

Dès lors, pour en savoir davantage faut-il s’intéresser aux éléments nouveaux de cette Responsabilité d’entreprise. Aussi, pour mieux cerner la RSE, il est pertinent d’en appréhender les enjeux au travers de ses cadres de référence : son cadre réglementaire & légal et ses différents référentiels.

En effet, si la RSE est une démarche d’entreprise largement volontaire jusqu’à ce jour, il existe quand même un cadre réglementaire & légal qui oblige et incite à mener des actions responsables. Ces dernières sont relatives notamment aux obligations à respecter les normes environnementales en vigueur (écotaxes, subventions des énergies renouvelables) mais aussi aux incitations fiscales à mener des actions de soutien à l’économie française (exemple : réduction d’impôt pour les investissements dans les PME au travers des Fonds Communs de Placement dans l’Innovation et exonération d’impôt pour la souscription à un Livret de développement durable et solidaire[2]).

C’est ainsi que bon nombre d’entreprises mènent des actions responsables de façon contraintes ou incitées par la réglementation européenne, les lois et politiques françaises. Quelle gloire tirer du simple respect de la loi ?

La RSE volontaire et désintéressée* (*financièrement parlant) est bien cette RSE qui nous concerne ici. Cette dernière dispose d’un cadre de référence propre dont les éléments les plus connus sont :

  • Le Pacte Mondial des Nations-Unis relatif au Développement durable (UN COMPACT) ;

  • La Global Reporting Initiative (GRI) ;

  • La norme ISO 26000 ;

  • Les guides de reporting RSE dont celui du MEDEF (basé sur la Loi Grenelle 2 – Article 225 et ses textes d’organisation et d’application) ;

  • Les labels responsables (ex : labels dits « verts »).

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Cadres de référence de la RSE [3]

Mais le plus important à retenir, au-delà des moyens à employer pour faire/être RSE, est sans doute que la RSE volontaire et désintéressée s’inscrit dans une véritable démarche organisée, exhaustive, pilotée (indicateurs de suivi) et évaluée sur 3 volets[4] :

  • Social :

    • emploi, organisation du travail, relations sociales, santé et sécurité, formation, égalité de traitement, respect des conventions de l’Organisation Internationale du Travail ;

  • Environnemental  :

    • politique générale, pollution et gestion des déchets, utilisation durable des ressources, changement climatique, protection de la biodiversité

  • Sociétal :

    • engagements en faveur du développement durable / impact territorial, économique et social de l’activité de la société, relations entretenues avec les personnes ou les organisations intéressées par l’activité de la société, sous-traitance et fournisseurs, loyauté des pratiques.

Aussi, l’évaluation de la démarche RSE est fondamentale en ce qu’elle donne à cette dernière toute sa légitimité. Il n’existe point d’impact vérifiable sans évaluation donc point de RSE sans évaluation ! C’est alors qu’intervient un acteur incontournable de la « chaine de valeur » venant attester de la réalité des informations communiquées dans les rapports RSE fournis par l’entreprise : un tiers indépendant[5] accrédité par le Comité français d’accréditation (COFRAC), unique instance nationale d’accréditation.

En somme, la RSE n’est donc pas un projet humanitaire ou des engagements écologiques isolés mais bien une politique globale comprenant des sous-politiques Sociale, Sociétale et Environnementale pilotées via des indicateurs de performance et évaluées par un Tiers de confiance indépendant et accrédité. Si la notion de RSE n’est pas encore bien comprise du grand public, malgré toute l’importante qu’elle revêt, c’est sans doute dû à son caractère non encore obligatoire pour tous, à ce jour.

Quand toutes les entreprises devront rendre comptes de leur politique RSE auprès du régulateur, qui pourra prétendre ignorer la loi ? A bon entendeur…

Wally NDIAYE, Project Manager chez Vertuo Conseil ( réseau Square Management)

Notes :

  1. Source : https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000006976133&fastReqId=992990988&fastPos=1

  2. Dans le cadre de la loi Sapin 2 votée en novembre 2016, le LDD a été renommé LDDS (Livret de développement durable et solidaire) depuis le 1er janvier 2017. Ce texte prévoit la possibilité d’une affectation par le détenteur d’un LDDS à un organisme l’économie sociale et solidaire (ESS) d’une partie de son livret d’épargne (capital et ou intérêts) sous la forme d’un don

  3. Sources : Formes de régulation et d’intervention en matière de RSE, Université de Lille 1, Bruno Boidin ;

Labels environnementaux, ADEME, https://www.ademe.fr/labels-environnementaux  

4.Source : Reporting RSE, Les nouvelles dispositions légales et réglementaire, Mouvement des Entreprises de France, Mai 2012.

5.Il est cependant possible d’être accrédité par d’autres organismes européens.

LE TABOU DE LA TRAITE NEGRIERE ARABE

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LE TABOU DE LA TRAITE NEGRIERE ARABE

La traite négrière est triple : l’occidentale (la plus dénoncée), l’intra-africaine (la plus tue) et l’orientale (la plus taboue).

L’Afrique a connu des traites tout aussi violentes et dévastatrices que la traite transatlantique. Il s’agit des traites orientale et transsaharienne, organisées par les Arabes, pendant treize siècles sans interruption.

La traite transatlantique pour sa part, a duré quatre siècles. Tidiane N’Diaye, anthropologue et économiste sénégalais, s’est penché sur le sujet dans son ouvrage “Le génocide voilé”.

“La plupart des gens braquent toujours les projecteurs sur la traite transatlantique pratiquée par les Européens en direction du Nouveau monde. Mais, en réalité, l’esclavage arabo-musulman a été beaucoup plus important parce que, quand je fais la synthèse des travaux existant, pour la traite transatlantique on se situe dans une fourchette entre  9, 6 et 11 millions d’individus, alors que pour la traite arabo-musulmane, ce sont 17 millions de victimes” affirme le Sénégalais.

Groupe d'esclaves menés par un négrier arabe armé, Zanzibar, 1889

Groupe d'esclaves menés par un négrier arabe armé, Zanzibar, 1889

Africains esclavagistes

Les razzias effectuées en Afrique de l’est par la route transsaharienne vers le Maroc ou l’Égypte concernent huit millions d’Africains.

Neuf autres millions ont été déportés dans les régions de la mer Rouge ou de l’océan Indien. Mais, ces statistiques, évoquées par le chercheur sénégalais, sont relativisées par Abdulazizi Lodhi, professeur de swahili et de linguistique africaine à l’Université d’Uppsala en Suède.

“L’esclavage faisait partie de diverses cultures africaines et, dans de nombreuses sociétés africaines, il n’y avait pas de prisons, de sorte que lorsqu’ils capturaient des gens, ils les vendaient, surtout vers le Nord. Ces esclaves pouvaient devenir des soldats et avoir des grades dans d’autres pays. En Afrique de l’est, les principaux participants à la traite négrière étaient les Africains tribaux eux-mêmes. En ce qui concerne l’exportation, les Arabes étaient les plus actifs parce qu’ils s’occupaient du commerce d’exportation et non de la capture d’esclaves en tant que tels. Ils achetaient neuf esclaves sur dix aux esclavagistes africains ” explique Abdulazizi Lodhi.

La traite arabo-musulmane que l’anthropologue Tidiane N’Diaye qualifie de “génocide de peuples noirs”, serait selon lui, en partie à l’origine de la pauvreté, la longue stagnation démographique et le retard de développement actuel que connait l’Afrique.

Et bien que ce fléau ait été aboli, on estime que près de 40 millions de personnes dans le monde vivent encore en esclavage. Le continent africain bien sûr n’est pas épargné.

Marché aux esclaves à Zabid (Yémen) où Abu Zayd vend son fils à al-Harith, manuscrit de l'école de Bagdad, 1237

Marché aux esclaves à Zabid (Yémen) où Abu Zayd vend son fils à al-Harith, manuscrit de l'école de Bagdad, 1237

Les acteurs de la traite arabe

Les esclaves noirs étaient capturés, transportés et achetés par des personnages très différents. La traite passait par une série d’intermédiaires et enrichissait une certaine partie de l’aristocratie musulmane.

L’esclavage se nourrissait des guerres entre peuples et États africains, ce qui donnait lieu à une traite interne. Les vaincus devaient un tribut constitué d’hommes et de femmes réduits en captivité. Sonni Ali Ber (1464-1492), empereur du Songhaï, mena de nombreuses guerres pour étendre son territoire. Bien qu’il fût musulman, il réduisit en esclavage d’autres musulmans vaincus. La dynastie des Askia (Mali) eut la même politique.

Aux VIIe et IXe siècles, les califes avaient tenté d’organiser la colonisation des rivages africains de l’océan Indien à des fins commerciales. Mais ces établissements furent éphémères, souvent fondés par des exilés ou des aventuriers. Le sultan du Caire envoyait des trafiquants d’esclaves pour opérer des raids sur les villages du Darfour. Des bandes armées aux ordres de marchands allaient incendier les villages et rapportaient des captifs, souvent des femmes et des enfants. Face à ces attaques, les populations formaient des milices, érigeaient des tours et des enceintes afin de protéger leurs villages.

Les marchands arabes et berbères d’Afrique du Nord échangeaient des esclaves contre de l’or, du sel, des épices ou des métaux dans les empires d’Afrique occidentale. Ainsi, dans la capitale de l’empire du Ghana Koumbi-Saleh, la population était répartie par quartiers en fonction des ethnies, des clans et des activités : le quartier des Blancs étaient réservés aux marchands arabes qui disposaient de mosquées alors que l’Empire était majoritairement animiste. L’Empire du Mali (XIIIe – XVe siècles) poursuivit les échanges avec les États d’Afrique du Nord et l’on a rencontré des marchands arabes et juifs dans les villes.

Maures pillant un village nègre, in Le Sénégal, René Geoffroy de Villeneuve, 1814, BNF

Maures pillant un village nègre, in Le Sénégal, René Geoffroy de Villeneuve, 1814, BNF

Buts de la traite et de l’esclavage

Les motifs économiques étaient les plus évidents. Dès les débuts de la conquête arabo-musulmane, le manque de main-d’œuvre entraîna le besoin d’utiliser des esclaves sur les chantiers ou dans les mines de sel. La traite occasionnait de grands profits pour ceux qui la maîtrisaient. Plusieurs cités se sont enrichies et ont prospéré grâce au trafic des esclaves, aussi bien au Soudan qu’en Afrique orientale. Dans le désert du Sahara, les chefs lançaient des expéditions contre les pillards de convois. Les souverains du Maroc médiéval avaient fait construire des forteresses dans les régions désertiques qu’ils dominaient afin d’offrir des haltes protégées aux caravanes. Le sultan d’Oman a transféré sa capitale à Zanzibar (signifiant « côte des Noirs »), car il avait bien saisi l’intérêt économique de la traite arabe. Plusieurs milliers d’esclaves transitaient par Zanzibar chaque année au XIXe siècle avant d’être déportés en Arabie, voire au Brésil. Le palais du sultan témoigne encore de sa fortune. Plusieurs milliers d’autres hommes travaillaient de force dans les plantations.

C’était aussi souvent à des fins sexuelles. En effet, dans l’aire arabo-musulmane, les harems nécessitaient un « approvisionnement » en femmes.

Il existait en outre des raisons sociales et culturelles à la traite : en Afrique subsaharienne, la possession d’esclaves était le signe d’appartenance à un haut rang social.

A Constantinople (empire ottoman), 1836

A Constantinople (empire ottoman), 1836

Pour finir, il est impossible d’ignorer la dimension religieuse et raciste de la traite. Punir les mauvais musulmans ou les païens tenait lieu de justification idéologique à l’esclavagisme : les dirigeants musulmans d’Afrique du Nord, du Sahara et du Sahel lançaient des razzias pour persécuter les infidèles : au Moyen Âge, l’islamisation était en effet superficielle dans les régions rurales de l’Afrique. Les lettrés musulmans invoquaient la suprématie raciale des Blancs, qui se fondait sur le récit de la malédiction proférée par Noé dans l’Ancien Testament (Genèse 9:20-27). Selon eux, elle s’appliquait aux Noirs, descendants de Cham, le père de Canaan, qui avait vu Noé nu. Les Noirs étaient donc considérés comme « inférieurs » et « prédestinés » à être esclaves. Plusieurs auteurs arabes les comparaient à des animaux. Le poète Al-Mutanabbi méprisait le gouverneur égyptien Abu al-Misk Kafur au Xe siècle à cause de la couleur de sa peau.

Le mot arabe abid qui signifiait esclave est devenu à partir du VIIe siècle plus ou moins synonyme de « Noir ». Quant au mot arabe zanj, il désignait de façon péjorative les Noirs. Ces jugements racistes étaient récurrents dans les œuvres des historiens et des géographes arabes : ainsi, Ibn Khaldoun a pu écrire au XIVe siècle : « Les seuls peuples à accepter vraiment l’esclavage sans espoir de retour sont les nègres, en raison d’un degré inférieur d’humanité, leur place étant plus proche du stade de l’animal ». À la même période, le lettré égyptien Al-Abshibi écrivait « Quand il [le Noir] a faim, il vole et lorsqu’il est rassasié, il fornique ». Les Arabes présents sur la côte orientale de l’Afrique utilisaient le mot « cafre » pour désigner les Noirs de l’intérieur et du Sud. Ce mot vient de « kāfir » qui signifie « infidèle » ou « mécréant ».

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LES 5 SOURCES D'ENERGIES RENOUVELABLES

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LE SAVIEZ-VOUS ? QUELS SONT LES CINQ TYPES D’ÉNERGIES RENOUVELABLES ?

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À l’origine de toutes les énergies renouvelables que l’humanité exploite aujourd’hui, il n’y a que deux grandes sources : le Soleil et la Terre. Toutefois, les spécialistes aiment à classer ces énergies en cinq grands types qui présentent chacun leurs spécificités.

Le terme énergie renouvelable est employé pour désigner des énergies qui, à l’échelle humaine au moins, sont inépuisables et disponibles en grande quantité. Ainsi il existe cinq grands types d’énergies renouvelables : l’énergie solaire, l’énergie éolienne, l’énergie hydraulique, la biomasse et la géothermie. Leur caractéristique commune est de ne pas produire, en phase d’exploitation, d’émissions polluantes (ou peu), et ainsi d’aider à lutter contre l’effet de serre et le réchauffement climatique.

L’énergie solaire photovoltaïque ou thermique

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On appelle énergie solaire, l’énergie que l’on peut tirer du rayonnement du Soleil.

Il faut distinguer l’énergie solaire photovoltaïque de l’énergie solaire thermique. L’énergie solaire photovoltaïque correspond à l’électricité produite par des cellules dites photovoltaïques. Ces cellules reçoivent la lumière du Soleil et sont capables d’en transformer une partie en électricité. La modularité compte pour l’un de leurs avantages. En effet, des panneaux photovoltaïques peuvent être utilisés aussi bien à des fins domestiques qu’à la production d’énergie à grande échelle.

Dans un système à énergie solaire thermique ou thermodynamique, le rayonnement solaire est employé pour chauffer un fluide. De l’eau, par exemple, comme dans certains chauffe-eau domestiques. Lorsqu’un système de concentration — un jeu de miroirs — y est ajouté, le Soleil peut chauffer le fluide jusqu’à quelque 1.000 °C et la technologie devient exploitable, par exemple, pour la génération d’électricité.

L’inconvénient de l’énergie solaire est qu’il s’agit d’une énergie intermittente. Elle ne peut — aujourd’hui en tout cas — être exploitée que lorsque le Soleil brille.

L’air à l’origine de l’énergie éolienne

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Les ancêtres des éoliennes sont les moulins à vent. Les éoliennes produisent de l’énergie — de l’électricité par exemple, lorsqu’elles sont couplées à un générateur — à partir du déplacement des masses d’air. Elles exploitent l’énergie cinétique du vent.

Les éoliennes peuvent être installées sur la terre ferme. On parle alors d’éoliennes onshores. Ce sont techniquement les plus simples à imaginer. Même si les espaces qui peuvent leur être réservés pourraient rapidement venir à manquer. Et les plus efficaces pourraient être des éoliennes installées en mer que l’on qualifie d’éoliennes offshore.

Tout comme l’énergie solaire, l’énergie éolienne est une énergie intermittente. Les éoliennes ne produisent que lorsque le vent souffle. En revanche, contrairement aux panneaux solaires, il peut être difficile d’installer une éolienne dans son jardin. La technologie est plutôt réservée aux grandes installations.

L’énergie hydraulique grâce aux courants marins

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Le terme d’énergie hydraulique désigne l’énergie qui peut être obtenue par exploitation de l’eau.

Une catégorie d’énergies moins soumise aux conditions météorologiques, mais qui reste réservée à une production d’envergure. Dans les énergies hydrauliques, on trouve :

  • Les barrages qui libèrent de grandes quantités d’eau sur des turbines afin de produire de l’électricité.

  • L’énergie marémotrice qui joue sur l’énergie potentielle des marées, une énergie liée aux différences de niveaux d’eau et aux courants que celles-ci induisent.

  • L’énergie hydrolienne qui exploite les courants marins.

  • L’énergie houlomotrice qui compte sur l’énergie cinétique des vagues et de la houle.

  • L’énergie thermique qui peut être tirée — de manière prudente pour éviter notamment toute perturbation des flux naturels des mers — de la différence de température entre les eaux profondes et les eaux de surface.

  • L’énergie osmotique qui produit de l’électrique grâce à la différence de pression que génère la différence de salinité entre l’eau de mer et l’eau douce.

L’énergie biomasse issue des matières organiques

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La biomasse peut devenir une source de chaleur, d’électricité ou de carburant. Plusieurs techniques peuvent être mises en œuvre pour en tirer son énergie : la combustion, la gazéification, la pyrolyse ou encore la méthanisation par exemple.

L’énergie biomasse peut être produite de manière locale. Mais il faut veiller, dans certains cas, à ce qu’elle n’entre pas en concurrence avec la chaîne alimentaire
L’énergie  comprend :

  • La source ancestrale qu’est le bois. Il peut produire de la chaleur, de l’électricité ou des biocarburants (hydrolyse de la cellulose en glucose puis fermentation en éthanol).

  • Les biocarburants, liquides ou gazeux, issus de la transformation de végétaux comme le colza ou la betterave (1ère génération), issus de matières cellulosiques (2e génération) ou issus de microorganismes comme des microalgues (3e génération).

Il est à noter que la biomasse ne peut être considérée comme une source d’énergie renouvelable que si sa régénération est supérieure à sa consommation.

Puiser l’énergie du sol, la géothermie

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La géothermie est une énergie renouvelable provenant de l’extraction de l’énergie contenue dans le sol. Cette chaleur résulte essentiellement de la désintégration radioactive des atomes fissiles contenus dans les roches. Elle peut être utilisée pour le chauffage, mais aussi pour la production d’électricité. Il s’agit de l’une des seules énergies ne dépendant pas des conditions atmosphériques.

En revanche, elle dépend de la profondeur à laquelle elle est puisée. La géothermie profonde — quelque 2.500 mètres pour 150 à 250 °C — permet de produire de l’électricité. La géothermie moyenne — dans les gisements d’eau notamment de 30 à 150 °C — alimente les réseaux de chaleur urbains. La géothermie à très basse énergie — entre 10 et 100 mètres de profondeur et inférieure à 30 °C — est celle exploitée par les pompes à chaleur.

Notons toutefois que pour que l’énergie géothermique demeure durable, le rythme auquel est puisée cette chaleur ne doit pas dépasser la vitesse à laquelle celle-ci voyage à l’intérieur de la Terre.

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AKON CITY : LES UTOPIES DÉSIRABLES

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LA CHRONIQUE HEBDO DE PAAP SEEN

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LES UTOPIES DÉSIRABLES

EXCLUSIF SENEPLUS - Il faut des hommes et des femmes d’action. Pour fouler aux pieds les structures mentales et sociales, qui méprisent l’audace et la liberté - NOTES DE TERRAIN

Paap Seen  |   Publication 30/08/2020

Samedi 29 août 2020. Je n’ai pas fêté la tamxarit, en famille, l’année dernière. Je me rappelle, j’avais terminé le travail vers 18 heures. Puis, je m'étais rendu à Liberté 6, pour prendre un taxi et partir à Rufisque. J’avais patienté près de deux heures. Mais, les chauffeurs ne voulaient pas se rendre à Rufisque. Les deux ou trois qui consentaient à faire la course me demandaient un prix exorbitant. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, j’ai rebroussé chemin. J’ai finalement passé la fête chez un ami. On m’a même offert un bol de cere, qui m’a servi de dîner pendant une semaine. L’essentiel était sauvé. Cette année, pour éviter toute mauvaise fortune, je suis parti plus tôt. J’étais déjà dans le taxi à 17 heures. 

Je me suis assis sur le siège passager avant. Le chauffeur de taxi ne trouvait plus son masque. Je lui en ai offert un. Il était, en apparence, très instruit et ouvert. Au regard des différents sujets de discussion soulevés, et de son niveau de raisonnement. Nous avons parlé, entre autres, de la cherté du péage et des nouveaux lampadaires, en installation sur l’autoroute et dans de nombreux quartiers de la capitale. Comment se fait-il, encore, que le marché d’éclairage public soit remporté par une entreprise française ? On a échangé sur la présence des compagnies françaises, au Sénégal. Sur le TER. Sur la souveraineté nationale. Sur la situation de l’Afrique. On a conclu que notre indépendance n'était pas encore acquise, totalement. Le trajet a été agréable. Il n’y avait aucun embouteillage sur la route.

À un moment, nous avons aperçu, sur l’autoroute, un panneau publicitaire. Qui montrait la ville futuriste que l’artiste, Akon, veut bâtir à Mbodiène. J’ai alors protesté, contre ce que j’ai appelé « une idée farfelue, peut-être même une nouvelle imposture. » Le chauffeur de taxi m’a alors exprimé son désaccord. Pour lui, il faut des initiatives comme celle-ci pour faire rêver les Africains. Je lui ai rétorqué qu’Akon était purement dans le business. Et puis, on ne va pas construire l’Afrique ou la sortir de sa situation actuelle, avec des rêveries. Le chauffeur était plus enthousiaste et manifestait son adhésion au projet. Selon lui, Akon est dans son droit. Même si c’est un rêve. 

Ce n’était pas la première fois que j’entendais un raisonnement pareil, sur le sujet. J’y ai réfléchi, dans la soirée, au repos. À vrai dire, mes réserves profondes sur ce projet sont maintenues. J’ai du mal à voir, dans ces initiatives grandiloquentes, un quelconque plan révolutionnaire. Capable de nous guérir des véritables maux qui nous accablent. L’impérialisme. L’obscurantisme. La défaillance des élites. La quasi-absence de culture savante. Et puis à qui seront destinées ces tours bizarres ? Quels rêves embrassent ce projet ? Où se trouve la mise en commun, l’égalité sociale ? Est-ce pour reproduire Las Vegas ou Manhattan, en Afrique ? Quelle part l’âme africaine occupe-t-elle dans ce chantier futuriste ? J’ai l’impression qu’Akon City n’est pas un espace d’alternatives réelles. Un lieu désirable, résolument africain. Que l’artiste, malgré toutes ses sorties, et ses incantations, concernant l'Afrique, ne saisit pas les gigantesques problèmes du continent. J’ai fait un tour sur le site internet d’Akon City. On peut y observer, très ouvertement, une impulsion néolibérale, ainsi qu’une promesse élitiste.

Toutes les idées utopiques ne se valent pas. Il y a celles qui cherchent à redonner le pouvoir aux hommes et aux femmes, par le geste démocratique, égalitaire et libertaire. Ces utopies-là veulent réinscrire l’Homme dans une société savante et humaniste. Il y en a d’autres qui promeuvent les valeurs du système dominant. Akon City sera un business, d’abord. Ce n’est pas un projet de révolution. Qui veut engager les femmes et les hommes, vers la vraie transformation mentale et sociale. Ce n’est pas, non plus, une alternative enracinée dans les communs. Qui, symboliquement, propose un véritable projet africain en rupture avec le système dominant. Aussi, cette initiative, à mon sens, pose la question de l’intentionnalité de la diaspora africaine. Que cherche-t-elle à faire ou à se prouver ? Pourquoi se pense-t-elle, souvent, prophète en Afrique ? Il y a, parfois, un esprit messianique chez des hommes et des femmes de la diaspora. Qui veulent se poser en sauveur du continent. Qui pensent qu'ils ont la mission de briser les chaînes. C’est dérangeant. Comme si les Africains, qui vivent et luttent chez eux, ne peuvent pas par leurs sueurs, leurs efforts et leurs sacrifices bâtir un continent vivable.

La parole de l'avenir

Des utopies, il en faut. C’est même urgent. Nous avons besoin d’être déroutés. Nous avons besoin de nouvelles combinaisons, de la pensée et de l’action. Et quoi d’autres encore ? Il faut des alternatives, et surtout beaucoup d’espoir. L’ancien monde pèse encore de tout son poids sur notre destin. Nos énormes potentialités sont carbonisées, par le statu quo. On pourrait même se risquer à dire que nos sociétés se figent, dans une sorte d’abandon tragique. Il faut des hommes et des femmes d’action. Pour fouler aux pieds les structures mentales et sociales, qui méprisent l’audace et la liberté. Les 2,5 milliards de personnes, qui vivront bientôt en Afrique, auront besoin, pour s’épanouir, d’un champ social et culturel favorable à l’innovation, à l’insouciance. À la créativité. Il n’y a aucun miracle : les sociétés instruites et créatives dominent le monde. Les peuples qui savent le mieux développer des idées du futur ont un avantage comparatif sur les autres. C’est ainsi, depuis toujours. Comment mettre l’intensité innovatrice dans les imaginaires ? En permettant le rêve, en libérant l’intelligence. En garantissant l’espoir.

Aujourd'hui, notre vérité est douloureuse. Nos esprits sont encastrés dans la misère. Les problèmes sociaux. Le retard économique et politique. Les pesanteurs sociales et les conservatismes. Cela joue beaucoup sur nos imaginaires. Et handicape notre compréhension réflexive. Nous avons besoin d’échappatoires. Ce qui suppose une exploration de nouvelles voies. Le bouillonnement technologique, à tous les niveaux. Des dynamiques créatives et utopiques. La grande leçon de l’Histoire est que le statu quo n’existe pas. Il n’y a pas d’avenir inévitable, que celui dont on a rêvé et que l’on a construit volontairement. Aussi, les trajectoires de l’histoire sont toujours provoquées par la fougue d’individus, parfois extravagants. Que donc, mille projets fleurissent ! Nous ferons le tri, plus tard. En fin de compte, nous pouvons, pour lui laisser le bénéfice du doute et de l'audace, situer la ville d’Akon dans la parole de l’avenir. En attendant d’y voir plus clair.

Retrouvez sur SenePlus, "Notes de terrain", la chronique de notre éditorialiste Paap Seen tous les dimanches.

psene@seneplus.com

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Mamadou Ibra Kane sur “Akon City” : “Gondwana ou Wakanda ?”

Par Ankou Sodjago - 04/09/2020

Entre le Gondwana et le Wakanda, il y a un choix à faire. Sans doute à assumer. Choisir entre les deux même si le Gondwana et le Wakanda ont un dénominateur commun : la fiction. Mais l’imaginaire a ça de particulier qu’il se rapproche souvent de la réalité. Tout est de savoir s’il s’agit juste de réaliser nos rêves ou plutôt de rêver nos réalités. Encore que les deux ne s’opposent pas. Pas forcément. La vie, en effet, est faite des deux. Le Gondwana est qualifié ironiquement de “République très, très démocratique” par l’humoriste nigérien Mamane, très connu des auditeurs d’une radio étrangère. Le Gondwana et les excès de son Président, plus dictateur que démocrate et qui impose ses lubies et hobbies à son peuple.

Le Wakanda, royaume fictif dans l’univers Marvel situé en Afrique, est rendu célèbre par le film à succès “Black Panther”. Hommage posthume à son acteur principal, Chadwick Boseman qui vient d’être terrassé par un cancer à seulement 43 ans. “Black Panther” et la belle musique de Baaba Maal. En passant.

Si nous évoquons le Wakanda, c’est parce que nous pensons à la future ville qui s’en inspire et qu’un autre célèbre musicien ambitionne d’implanter ou d’implémenter au Sénégal. Son nom : Akon City. Akon de son pseudonyme américain et d’artiste. Alioune Badara Thiam de son nom de baptême au Sénégal. “Akon City” ou “Wakanda City”, le chanteur sénégalo-américain de RnB assume la ressemblance. Le réalisme nous oblige à dire bienvenue à “La Porte de l’Afrique”, autre appellation de la ville futuriste qui sera érigée sur le site du village de Mbodiène en bordure de l’Atlantique.

Akon 47 ans, Boseman 43 ans, Black Panther (la Panthère Noire) ; Akon City, Wakanda City : toute ressemblance n’est que… pure réalité. Le Wakanda, ses immenses richesses naturelles et ses six millions d’habitants. Akon City et ses 6 milliards de dollars (3 324 milliards de francs CFA selon le cours actuel) représentant le financement du projet, sa crypto-monnaie Akoin, ses studios de cinéma, ses hôtels, ses hôpitaux, ses centres d’affaires et de loisir, son université… Akon City et ses futurs 300 mille habitants.

Qui cracherait sur une telle ville ? Osons le croire : personne. Ceux qui adorent Palm Jumeirah, l’île de rêve de Dubaï avec ses hôtels luxueux, ses restaurants haut de gamme, ses tours d’habitations qui donnent le tournis, ne bouderont pas le plaisir de visiter ou même de vivre à Akon City. Heureux qui comme les futurs Akonais !

Partons du postulat que la future ville intelligente – Smart City ne sera pas un mirage. Prions même pour qu’elle soit une réalité et mieux, plus belle que la maquette qui nous a été présentée. Toutefois des questions subsistent. Qui pourra habiter à Akon City ? Une ville pour riches ? Tant mieux si elle devrait attirer Les Bill Gates, Zuckerberg, Bieber, Rihanna, Kim Kardashian, Beckham, Ronaldo, Messi et tous les milliardaires de la planète, pressés de venir dépenser chez nous leurs colossales fortunes. Mais, la ville touristique qu’Akon City est appelée à être, sera-t-elle accessible à nous autres Sénégalais, notamment aux habitants de Mbodiene ? Le village d’agriculteurs du littoral ne sera-t-il pas chassé de ses terres pour laisser la place à des spéculateurs fonciers et de tous ordres ?

En apparence, le rappeur Akon a eu l’intelligence de discuter avec les villageois de la question foncière qui fâche. Le calme apparent des Mbodiénois, réputés comme tous les autres campagnards, très attachés à leurs terres héritées des ancêtres, est la preuve manifeste que le prince du Wakanda a dû bien négocier ses 500 à 800 hectares. Si cela se confirme, c’est un exemple d’une certaine “diplomatie industrielle” à promouvoir. Un bon arbitrage entre le “titre foncier agro-industriel” et le “titre foncier communautaire”.

Pourquoi Akon a pu obtenir l’assiette foncière que requiert son rêve là où d’autres, avec moins de surface, n’y sont pas parvenus ? Se nommant Alioune Badara Thiam, sa sénégalité quoique mâtinée dans son américanité, ne saurait souffrir d’aucun doute, encore moins contestée. Donc, la raison de son succès est à chercher ailleurs.

Akon City, une chimère ? Espérons que ce royaume du Wakanda aura plus de chance de se réaliser que “Akon Lightning Africa”, le premier grand projet du chanteur en compagnie de l’activiste politique sénégalais Thione Niang et de l’entrepreneur malien Samba Bathily. Une fouille dans les archives pour les mémoires oublieuses. Alors que son projet d’électrification de l’Afrique existe depuis 2015 – plus de 600 millions d’Africains étant sans électricité – Akon n’avait été reçu par le président Macky Sall qu’au bout de 4 années d’attente, le mercredi 3 avril 2019. Cette fois-ci il n’a pas attendu longtemps pour présenter, le mardi 1er septembre 2020, la maquette de sa ville futuriste au chef de l’État sénégalais.

Une année d’intervalle entre deux audiences au Palais pour vendre deux projets grandioses. Rêvons avec Akon ! Les pieds sur terre d’où sortira cette cité… Akonique. Sûrement pharaonique. Qui vivra verra.

LA COMPLICITE DES ELITES

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LA COMPLICITÉ DES ÉLITES

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Ceux qui appauvrissent le continent – FMI, Banque mondiale, OMC, etc. – peuvent dormir tranquillement : ils peuvent toujours compter sur le soutien de certains fils du continent qui diront que si l’Afrique est en retard, c’est de sa seule faute

Bosse Ndoye  |   Publication 10/08/2020

"Les blancs s'en vont mais leurs complices sont parmi nous, armés par eux ; la dernière bataille du colonisé contre le colon, ce sera souvent celle des colonisés entre eux.[1]" Frantz Fanon,

Depuis les déclarations des indépendances officielles de nombre de pays africains dans les années 60 jusqu’à nos jours, beaucoup d’événements survenus sur continent n’ont cessé de renforcer la véracité des propos de Fanon et de prouver leur actualité.

Dans l’actuelle République démocratique du Congo, ex-Zaïre, Patrice Lumumba l’a malheureusement très vite appris à ses dépens. En effet, pour maintenir l’exploitation de son pays que d’aucuns qualifient de scandale géologique – tant le sous-sol est riche -, l’ancienne puissance coloniale, la Belgique, poussée entre autres par l’Union minière, fit rapidement allumer des feux fratricides – auxquels elle participa amplement – par le biais de ses laquais Moïse Tshombe et Albert Kalonji. Ces derniers organisèrent respectivement la sécession de Katanga et du Kasaï, les deux régions les plus riches du pays juste quelques semaines après la déclaration d’indépendance. Cet événement allait être l’un des premiers, sinon le premier d’une longue série de confrontations malencontreuses – allant de coups d'État aux rebellions en passant par des liquidations sommaires - mettant aux prises des fils d’un même pays, d’un même continent ; les uns luttant pour le développement et la libération complète de leur peuple ; les autres agissant de connivence avec une ou plusieurs puissances impérialistes étrangères, qui tirent généralement les ficelles en échange de quelques avantages ou soutiens.

Si cette situation n’avait été et n’est encore que l’œuvre d’inconnus désespérés à la recherche de notoriété ou de richesses, elle eût été moins surprenante et choquante. Mais elle a été aussi et demeure l’affaire de certains parmi les fils du continent occupant ou ayant occupé les premiers rôles dans leurs pays et jouissant d’une certaine réputation sur le continent. Les cas de Senghor et d’Houphouët Boigny sur le plan politique parmi tant d’autres en Afrique noire francophone peuvent bien étayer ces propos.

Vu, non sans raison, par Ousmane Sembene – à travers le personnage de Léon Mignane - comme étant, après Faidherbe, le meilleur produit de l'ancienne métropole, et le meilleur préconsul que Paris ait envoyé en Afrique francophone[2]; par une universitaire française[3] comme  étant le colonisé introuvable ; par Mongo Béti[4], comme la plus noble conquête de l’homme blanc, l’oncle Tom-Senghor[5] ; par Boubacar Boris Diop, comme un homme ondoyant, un être entre deux eaux[6], le premier président sénégalais a souvent servi de relai à l’ancienne métropole dans l’exercice de ses basses besognes sur le continent. Il a participé activement à la mise en quarantaine de Cheikh Anta Diop loin de l’Université de Dakar et du champ politique pendant plusieurs années de peur qu’il n’inoculât le virus de l’éveil dans les jeunes consciences endormies dans le pays afin d’éviter d'y faire vaciller les intérêts de la France. D’après Roland Colin, rapportant les propos de Mamadou Dia, lors de la rencontre de Gonneville-sur-mer entre ce dernier et Senghor, à propos de la position à tenir lors du référendum de 1958, le président-poète avait demandé de laisser le pays rester encore quinze à vingt ans[7] sous domination française avant de penser à l’indépendance. Ce n’est dès lors pas étonnant qu’il ait tenu ces propos : "Le carré français, croyez-moi, nous ne voulons pas le quitter. Nous y avons grandi et il y fait bon vivre. Nous voulons simplement...y bâtir nos propres cases, qui élargissent et fortifieront en même temps le carré familial, ou plutôt l'hexagone France[8]."  C’est sous sa présidence que l’Opération Persil et l’Opération Mar Verde – en partie - furent préparées au Sénégal pour faire couler la Guinée de Sékou Touré dont le seul tort était d’avoir osé dire non à la France pour se soustraire à sa domination. C’est la preuve que ceux qui sont contents de leur asservissement trouveront toujours dérangeants ceux qui réclament haut et fort leur liberté. Beaucoup d’autres choses peuvent être dites sur Senghor agissant pour la France au détriment de son peuple et de ses frères africains.

Le premier président ivoirien - que Frantz Fanon désignait comme un ennemi de l’indépendance de l’Afrique ; un homme de paille du colonialisme pour avoir affirmé que l’Algérie doit demeurer dans le cadre français, pour être allé défendre les thèses françaises aux Nations Unies[9] - a été avec Senghor l’autre béquille sur laquelle la France s’est longuement appuyée pour mener sa marche tranquille visant à asseoir sa domination en Afrique francophone. En agissant de connivence avec l’ancienne métropole, il a joué un grand rôle dans la dissuasion du Dahomey (actuel Bénin) et de la Haute-Volta (actuel Burkina Faso) de participer à la Fédération du Mali, qui devait les unir avec le Soudan français (actuel Mali) et le Sénégal. C’est sous son instigation que le Conseil de l’entente regroupant à l’époque de sa création le Bénin, le Niger, le Burkina Faso fut mis sur pied pour contrecarrer la Fédération du Mali. L’ancien président ivoirien avait tout fait pour éviter à son pays de s’unir avec ceux qu’il appelait les "affamés du Sahel", selon les propos de Roland Colin. Il a soutenu Kasa-Vubu, adoubé par Paris, contre Lumumba à l’ONU, a participé à la déstabilisation de la Guinée nouvellement indépendante et au renversement de Kwamé Nkrumah en 1966 : "Houphouët Boigny a permis aux conspirateurs d’utiliser la Côte d’Ivoire pour coordonner l’arrivée et le départ de leur mission[10]". Toujours pour son soutien indéfectible à la France - dont le rôle est bien connu dans la guerre du Biafra - il a été parmi les premiers à reconnaître le gouvernement sécessionniste de Biafra. C’est même en Côte d’Ivoire que le Colonel Ojukwu trouva refuge après sa tentative avortée de sécession. Jacques Foccart souligne que : "Le général de Gaulle lui donna carte blanche pour aider la Côte d’Ivoire à aider le Biafra." [11] Comme dans le cas de Senghor, beaucoup de choses peuvent être dites sur Houphouët agissant en faveur de la France au détriment de son peuple et de nombre de ses frères africains.

Alassane Ouattara, dont il était très proche, ne fait que marcher sur ses pas. Comme son homologue sénégalais Macky Sall - en bons successeurs du couple Houphouët-Senghor - il n’a pas hésité à louer les bienfaits du franc CFA, à expulser de son pays ceux qui ont osé le critiquer comme Kemi Séba et Nathalie Yamb - dans son cas. Tous les deux préservent jalousement les intérêts français dans leurs pays au grand dam des populations locales. La décision hâtive et suspecte de remplacer le franc CFA par l’Eco ne constitue pas seulement un coup de Trafalgar de la part de Ouattara, mais elle est aussi un court-circuitage de la CEDEAO dans son projet de monnaie sous régionale décidé depuis plusieurs décennies et un mépris de l’opinion de nombreux Africains qui veulent couper le cordon ombilical monétaire avec la France.

La guerre fratricide que se livrent les anciens colonisés pour le compte des anciens colonisateurs sur le continent n’est pas seulement physique et armée, elle aussi intellectuelle. La particularité pour celle-ci est que l’ancien maître n'a pas toujours besoin de tirer quelque ficelle que ce soit. Car d’autres peuvent agir à sa place. Ayant largement réussi sa colonisation - qui en plus d’avoir été une entreprise de domination, d’exploitation économique a été aussi une entreprise d'aliénation, de décérébration pour employer les mots de Fanon -, elle peut compter sur une certaine élite formée dans ses écoles, dans ses universités qui est prête à la défendre bec et ongle intellectuellement. Ce sont les personnes composant cette élite que Sartre, dans sa préface des Damnés de la terre, qualifie d’êtres truqués, des mensonges vivants, tant le décalage est grand qui les sépare de leurs peuples. Si bien qu’ils ne peuvent même plus communiquer. En outre, comme le rappelle Odile Tobner : "Les intellectuels noirs sont étroitement surveillés. Toute une génération de diplômés est embrigadée. La docilité est le prix à payer pour accéder aux rôles de figuration, assortis de prébendes, qui vont faire des dirigeants africains les vampires de leurs peuples. Il s'agit aussi de déconsidérer autant que faire se peut les rares voix capables de galvaniser les esprits colonisés.[12]" 

Il n’y a souvent que sur le continent africain que l’on trouve certaines divergences sur la défense d’intérêts nationaux face à d’autres pays étrangers. Là où l’unité nationale, l’union sacrée est facilement obtenue dans d’autres pays, même parfois pour des causes dépourvues de noblesse ou tout simplement iniques. Dès lors, les anciens pays esclavagistes n’ont pas besoin de s’excuser ou de réparer leurs méfaits, il y aura toujours des fils du continent, des intellectuels – parfois stipendiés ou affublés de titres pompeux ou lauréats de certains prix…en Occident - pour dire que si les Blancs ont osé réduire certains fils du continent en esclavage, c’est parce qu’ils étaient aidés par d’autres Africains. Peut-être ignorent-ils que chaque domination crée des collaborateurs dans la population soumise. L’exemple de la France sous l’Occupation est patent. Ceux qui appauvrissent le continent noir – le FMI, la Banque mondiale, l’OMC, les néocolonialistes, etc. – peuvent dormir tranquillement : ils peuvent toujours compter sur le soutien de certains fils du continent qui diront que si l’Afrique est en retard, c’est de sa seule faute. Certes, face à la gabegie, aux dirigeants qui s’accrochent manu militari au pouvoir en toute illégalité constitutionnelle, au népotisme, au pillage, aux détournements de deniers publics, à l’absence de patriotisme de nombre de dirigeants, l’attitude, les discours et la frustration de ces personnes, qui disent qu’il est trop facile de vouloir toujours se décharger sur l’Occident, sont très compréhensibles. Mais ce serait une erreur que d’ignorer l’impact négatif de la dette odieuse, la détérioration des termes de l’échange, les chantages des institutions financières internationales, les rapports de force défavorables à la plupart des pays africains et surtout leur absence d’indépendance véritable...Notamment les anciennes colonies françaises de l’Afrique subsaharienne. De plus, l’Occident n’hésite pas à réviser l’histoire, à trouver des descendants d’esclaves et de colonisés pour défendre ses positions ; bref à tout tenter pour faire porter aux Africains "le chapeau du sous-développement" qui sévit sur une bonne partie du continent tout en occultant sa part de responsabilité dans les conséquences néfastes de la traite négrière, de la colonisation et actuellement du néocolonialisme qui y plombent le décollage économique de beaucoup de pays. On ne sort pas culturellement, économiquement, psychologiquement indemne de 5 siècles de domination. Cette situation fait souvent penser au complexe de Néron dont parlait Albert Memmi[13]. Pour légitimer leurs pillages des pays « asservis » et défendre leur rôle d'usurpateurs, les colonisateurs, par le passé, et les néocolonisateurs, de nos jours, ont échafaudé toutes sortes d'arguments et de théories pour « rendre licites » leurs agissements afin de se donner bonne conscience. Autrefois, les premiers nommés se cachaient derrière le manteau de la supériorité raciale et de la mission civilisatrice qui en était un corollaire pour conquérir des pays. Mais vu que tout le monde sait maintenant que leurs arguments sont scientifiquement faux et fallacieux, politiquement incorrectes et anachroniques, leurs successeurs ont changé de stratégies. Ils dénigrent les pays « soumis » ou à « soumettre » en dénonçant certaines de leurs pratiques qualifiées de "barbares", leur inaptitude à exploiter et à utiliser convenablement leurs propres richesses et leur propension à la dictature et à la corruption. Et en même temps, ils louent le développement technologique et économique et la « démocratie » dans leur pays et n’hésitent pas à falsifier ou à réécrire l'histoire pour servir de vils desseins. Du racisme biologique, ils sont passés au racisme culturel et culturaliste. Les périodes changent, mais les pratiques demeurent sous d'autres formes. Rien de nouveau sous le soleil. Donc, nombre de problèmes sur le continent doivent être considérés au minimum sous un angle double quand on veut les analyser. Sinon le résultat risquerait d’être hémiplégique.

Pour ce qui concerne le déboulonnage de la statue de Faidherbe, la situation n’avait même pas besoin de tous ces débats houleux, de toute cette dissertation tant ce qui est à faire est évident puisque c’est juste une question de dignité. Imaginez une statue de Bugeaud à Alger, celle d’Hitler à Tel-Aviv. C’est impensable !

Le problème des dirigeants qui collaborent avec des puissances étrangères au détriment de leurs peuples renvoie encore et toujours à la question de la souveraineté véritable, et partant à la question de puissance. Tant que l’on n’aura pas la liberté d’élire les dirigeants que l’on veut et de se séparer d’eux démocratiquement lorsque ne font plus l’affaire, la capacité de nous défendre, de nous nourrir, de nous soigner tout seuls, on aura toujours au sommet de nos États des présidents fantoches, soutenus de l’extérieur et plus préoccupés à avoir le satisfécit des grandes puissances, des institutions financières internationales que par le bien-être et la tranquillité de leurs peuples. De petits pays faibles et divisés ne pourront pas changer cet état de fait. Seul un ensemble fort en sera capable. D’où la nécessité de s’unir, comme l’avaient souhaité de tous leurs vœux Cheikh Anta Diop et Kwamé NKrumah.

[1]Cité par Odile Tobner, Du racisme français, quatre siècles de négrophobie, p.225

[2] Ousmane Sembene, Le dernier de l’empire, p.344

[3] Boubacar Boris Diop, L’Afrique au-delà du miroir, p.104-105

[4]Mongo Béti, Les Deux mères de Guillaume Ismaël Dzewatama, p. 158

[5] Mongo Béti, Le Rebelle 1, p.350

[6] Boubacar Boris Diop, L’Afrique au-delà du miroir, p.90

[7]Roland Colin, Sénégal notre pirogue, au soleil de la liberté, p.104

[8] Léopold Sédar Senghor, intervention à l’Assemblée nationale, séance du 29 janvier 1957 , http://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/histoire/grands-discours-parlementaires/leopold-sedar-senghor-29-janvier-1957

[9]Pour les révolutions Africaines, p.135

[10]Bridgette Kasuka, citée par Said Bouamama, Manuel stratégique de l’Afrique, p.71, Tome 2

[11]Ibid, p.71

[12] Odile Tobner, Du racisme français, quatre siècles de négrophobie, p. 228-229

[13] Albert Memmi, Portrait du colonisateur, portrait du colonisé, p.72

CES ENFANTS METIS DE LA COLONISATION - FRANCE & BELGIQUE

LA BELGIQUE PRESENTE SES EXCUSES A SES ENFANTS METIS

Bruxelles a officiellement présenté le 4 avril 2019 ses excuses pour les "injustices" subies par les milliers d'enfants métis nés de pères belges au Congo, Rwanda et Burundi pendant la période coloniale. Enfants qui furent par la suite arrachés à leurs mères africaines et victimes de ségrégation. Ils furent souvent confiés à des institutions religieuses.

Des soldats congolais montent la garde devant le buste du roi Léopold II à l'entrée du Camp Léopoldville (aujourd'hui Kinshasa), le 3 septembre 1942. (WESTON HAYNES/AP/SIPA / AP)

Des soldats congolais montent la garde devant le buste du roi Léopold II à l'entrée du Camp Léopoldville (aujourd'hui Kinshasa), le 3 septembre 1942. (WESTON HAYNES/AP/SIPA / AP)

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Laurent Ribadeau Dumas Rédaction Afrique France Télévisions
publié le 07/04/2019 | 10:25

"Au nom du gouvernement fédéral belge, je présente nos excuses aux métis issus de la colonisation belge et à leurs familles pour les injustices et les souffrances qu'ils ont subies", a déclaré le Premier ministre, Charles Michel, devant la Chambre des représentants. Il a dit souhaiter que "ce moment solennel soit une étape supplémentaire vers une prise de conscience de cette partie de notre histoire nationale".

En 1885, la conférence de Berlin avait reconnu au roi des Belges Léopold II "la possession à titre privé d'un vaste territoire au cœur de l'Afrique noire, qui sera baptisé 'Etat indépendant du Congo'", rappelle le site herodote.net. Une "propriété privée" (aujourd’hui République démocratique du Congo) que le souverain va "saigner à blanc"… A l’issue de la Première guerre mondiale, le Ruanda-Urundi, alors territoire allemand regroupant Rwanda et Burundi, était tombé dans l’escarcelle de la Belgique. Les trois pays sont devenus indépendants au début des années 1960.

Un "tabou"

Le sort des enfants nés de pères belges et de mères congolaises, rwandaises et burundaises pendant la colonisation "a longtemps été tabou en Belgique". Pour le cofondateur de l’association Métis de Belgique, François d’Adesky, entre 14 000 et 20 000 bébés métis sont issus de liaisons entre colons et femmes africaines.
"L'homme blanc qui vivait avec son enfant et sa partenaire africaine devait se comporter discrètement en public, violant apparemment une loi coloniale, une sorte d'apartheid non écrit, mais irrésistible. S'il ne le faisait pas, son contrat (lui permettant de séjourner dans la colonie pouvait) pouvait être rompu", explique le site de l’association. "La femme africaine ne pouvait épouser son mari européen qu'en vertu de son droit coutumier et non selon la loi belge." Ces unions n’avaient donc pas de valeur pour la Belgique.

De même, la plupart des enfants nés dans ces couples n’ont pas été reconnus par leurs pères. Ceux que l’on appelait "mulâtres" (mot venant étymologiquement de "mulet, bête hybride", dixit le Petit Robert) ne devaient se mêler ni aux Blancs, ni aux Africains, phénomène que Charles Michel a qualifié de "ségrégation ciblée". Ces enfants étaient parfois considérés "comme l’incarnation de la décadence morale qui se propage aux colons", rapporte le site axelmag.be. Ils furent donc vus "comme un problème, voire un danger, puis un tabou", observe TV5monde.

"Dès la mort de mon père, en (19)56 (j’avais six mois à l’époque), les autres Belges chassèrent ma mère avec les enfants de la maison que nous occupions, ils prirent les meubles (et les) objets de valeur pour les renvoyer en Belgique. Deux ans après (...), tous ses biens aux colonies (avaient) disparu. Mon père avait souscrit une assurance pour nous permettre d’étudier, mais jamais cet argent ne fut confié à ma mère. Une Africaine, vous pensez, comment allait-elle gérer ce petit pécule, on n’en a jamais vu la couleur…", a raconté l'un de ces enfants au journal Le Soir.

Seuls 10% de ces petits métis ont été reconnus par leur père, raconte François d’Adesky. Résultat : les autres ont été abandonnés "chez les missionnaires (les mères ne pouvant pas s’y opposer)", selon axelmag.be. Nombre d’entre eux ont été "envoyés dans des institutions religieuses comme le pensionnat des Sœurs à Save au Rwanda", précise TV5monde. Certains se sont retrouvés à la rue. 

En 2017, l’Eglise catholique a présenté ses excuses et ouvert ses archives sur cette période.

"Politique d’enlèvements"

Au moment des indépendances, "les religieuses de Save et un prêtre belge, le père Delooz, ont le sentiment que la situation, au Rwanda et au Congo, va évoluer très vite, que le Mwami (le roi) et les Tutsis en général n’aiment pas les enfants mulâtres, qui pourraient se retrouver en danger", rapporte Le Soir. Entre 1959 et 1962, un millier d'entre eux ont été rapatriés en Belgique par les autorités du royaume dans des conditions controversées. Ils ont été séparés de leurs mères et du reste de leur famille. Avant d’être placés dans des pensionnats ou adoptés par des familles belges.

"La répartition des enfants métis sur l'ensemble du territoire de la Belgique s'est effectuée en séparant les fratries et a entraîné des pertes d'identité dues aux différents changements de prénoms, de noms, de dates de naissance", a expliqué Charles Michel. Déplorant "une politique d'enlèvements forcés", il a évoqué aussi leur "extrême difficulté" à reconstruire ensuite leur vie dans le pays. Et à recevoir la citoyenneté belge, faute de reconnaissance par le père.

Pour le cofondateur de Métis de Belgique, né en 1946 d'un père belge, employé d'une société minière, et d'une mère rwandaise, ces excuses de l'Etat belge sont "un événement historique". Lui-même dit avoir eu la chance d'être reconnu par son père et de compter parmi les premiers revenus en Belgique, dans les années 1950. "Mais ma mère a dû rester au pied de l'avion. Je ne l'ai revue que 23 ans après", a raconté François d'Adesky à l'AFP.

François d’Adesky est né d’un père colon et d’une mère rwandaise. Avec ses frères et sœurs, ils sont placés à l’Institut de Save, un internat pour enfants métis au Rwanda. A l’âge de sept ans, dans les années 50, il est parmi les premiers métis à arriver en Belgique. La fratrie vit d’abord avec le père – qui les avait reconnus, cas plutôt rare – puis est prise en charge par une association de protection des « enfants mulâtres ». Hautement diplômé, ancien directeur au sein des Nations unies, cet homme de 73 ans a co-fondé l’Association des Métis de Belgique (AMB) et se bat depuis des années pour que la Belgique s’excuse auprès de ces enfants de la colonisation, arrachés à leur mère et placés de force à l’adoption. Pour lui, il s’agit donc d’un jour historique.

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"J’ai été immatriculé comme indigène et n’ai pu recevoir l’éducation des petits Belges" :

L'odyssée du métis François d'Adesky  https://www.facebook.com/watch/?v=274534370312076

Jean-Claude Matgen

Publié le 05-04-19 à 09h36 

Né d’une mère rwandaise et d’un père belge, ce septuagénaire a vécu, comme ses frères et sa sœur, des drames et des injustices qu’il a surmontés.

L’une des chevilles ouvrières du "combat" mené pour la reconnaissance des discriminations faites aux métis nés d’une mère africaine et d’un père belge du temps de la colonisation est François d’Adesky, figure bien connue à Woluwe-Saint-Pierre. Ce "cadre" de l’Association des métis de Belgique a accueilli avec soulagement les excuses prononcées, jeudi, à la Chambre, par le Premier ministre Charles Michel, au nom de l’État belge.

Mariage coutumier

M. d’Adesky, né en 1946, à M’Bazi, au Rwanda, a vécu, avec ses frères et sa sœur, une véritable odyssée.

"Mon histoire est un peu particulière, dit-il d’emblée. Contrairement à l’écrasante majorité des autres enfants métis, moi et mes frères et sœur avons été reconnus par notre père. Celui-ci, qui travaillait pour le compte de la Générale de Banque, a manifesté l’intention d’épouser ma mère, ce qui lui a valu d’être licencié. Il a investi dans une plantation de café et s’est lancé dans le commerce de bovins. Ma mère était la cousine de l’avant-dernier roi du Rwanda. Mon père et elle ont fait un mariage coutumier qui n’a pas été légalisé par les autorités coloniales."

Cela a eu une incidence sur le jeune François. "J’ai été immatriculé comme indigène et n’ai pu recevoir l’éducation des petits Belges. C’est ainsi que j’ai rejoint un des orphelinats où l’on parquait les jeunes métis. Je pouvais, toutefois, contrairement à eux, rentrer chez mes parents le week-end et pour les vacances."

Coma et épilepsie

François et les siens auraient pu s’accommoder de cette existence mais un drame va tout compliquer. "Début 1953, mon père a eu un très grave accident de voiture. Il est resté plusieurs jours dans le fond d’un fossé et quand on a découvert son véhicule, son chauffeur était mort et lui était tombé dans le coma. Il en a gardé des séquelles à vie, devenant épileptique."

La grand-mère belge de François d’Adesky va entreprendre des démarches pour que la famille soit rapatriée et obtenir que tout le monde puisse gagner la Belgique car, en 1953, aucune personne de couleur ne pouvait y débarquer.

"Les choses ne se sont pourtant pas passées comme prévu, commente M. d’Adesky. "Lorsque nous avons embarqué dans l’avion qui devait nous emmener de Bujumbura à Bruxelles, le commandant de bord a refusé d’emmener ma mère, ma sœur, mes frères et moi. Finalement, il a accepté de décoller mais sans maman. Mon frère de 2 ans hurlait. Moi, je pleurais aussi toutes les larmes de mon corps mais mon père a promis de faire le nécessaire pour régulariser la situation depuis Bruxelles."

Trois Ave Maria et un Pater

Avant de quitter l’avion, ma mère m’a dit : "François, dis chaque soir trois Ave Maria et un Pater, et je suis sûre que nous nous retrouverons." À ce moment du récit, la voix de notre interlocuteur se brise et il lui faut quelques secondes pour reprendre ses esprits.

La suite ? Elle fut terrible. La famille vit grâce à l’aide de la grand-mère car le père voit son état de santé se dégrader. "Mais en 1955, ma grand-mère est morte et nous nous sommes retrouvés à la rue. Mon père avait deux frères. L’un vivait aux États-Unis, très loin de nous. L’autre, hélas, a tout fait pour capter l’héritage de ma grand-mère jusqu’à réussir à faire interner mon père dans un asile sordide après qu’il eut fait plusieurs crises d’épilepsie. Je suis allé voir mon père. J’avais neuf ans. Je n’ai pas pu retourner dans cet asile horrible. Je suis sûr que mon père s’y est laissé mourir de chagrin, incapable depuis cet endroit de faire revenir ma mère et incapable de prouver aux autorités qu’il n’avait rien à faire là. Il a été enterré dans une fosse commune, à Manage. Nous étions ravagés."

Adolescence à Woluwe-Saint-Pierre

Les enfants d’Adesky ont été pris en charge, après la mort de leur grand-mère, par l’Association de protection des mulâtres, subsidiée par l’État belge et aidée par des "dames patronnesses". "C’est la famille de Me Paul Coppens qui nous a pris sous son aile", explique François d’Adesky. Lequel se retrouvera placé, en compagnie de ses frères, au home Le Pilote, à Woluwe-Saint-Pierre. C’est là qu’il grandira avant de mener de très belles études supérieures (avec une maîtrise en sciences économiques à la clé) puis une carrière "internationale", notamment pour le compte de l’Onu.

"Pour tout vous dire, j’avais été à ce point déçu de la façon dont la Belgique nous avait traités, de la façon dont l’Église catholique avait participé au système de ségrégation mis en place par les autorités coloniales, de la manière brutale dont l’État belge avait, en 1971, coupé tout subside à l’Association de protection des mulâtres, du racisme dont j’avais été l’objet, notamment sur le plan professionnel, que je n’avais pas envie de retourner vivre en Belgique. Mais il se fait que j’ai été muté à Bruxelles et que ma femme, d’origine franco-britannique, s’y est tellement plu que nous avons fini par acheter une maison à Woluwe-Saint-Pierre, à quelques mètres… du home où j’ai grandi sous tutelle."

La boucle était donc bouclée. Mais entre-temps, il s’est passé un événement tout à fait extraordinaire. "En 1976, un de mes frères travaillait à Bangui. Il a raconté notre odyssée à l’épouse d’un coopérant. Celle-ci s’est souvenu du récit d’une amie qui semblait correspondre à ce qu’elle venait d’entendre. Cette amie lui avait parlé d’une Rwandaise qui, depuis plus de vingt ans, avait perdu tout contact avec son mari et ses enfants retournés en Belgique et qui cherchait désespérément à en retrouver la trace. Nous avons effectué tous les recoupements possibles et avons fini par acquérir la certitude qu’il s’agissait bien de ma mère."

"J’ai senti un regard posé sur moi"

M. d’Adesky reçoit une lettre de sa maman une semaine après la naissance de son premier fils. Il apprend qu’après avoir vécu au Burundi puis au Kivu, elle a rencontré un Rwandais hutu, elle qui était tutsi, s’est mariée et a eu des enfants.

"Je suis allé la voir mais mon avion a dû atterrir à Bujumbura au lieu de Kigali. C’était un vendredi. J’ai pu atterrir à Kigali le dimanche. Mon intention était de me rendre au siège de l’entreprise où travaillait son mari le lundi. Je marchais dans le hall de l’aéroport quand j’ai senti, réellement senti, dans mon dos, un regard posé sur moi. Je me suis retourné. Une femme me fixait des yeux. J’ai marché vers elle et elle vers moi. Nous nous sommes reconnus et sommes tombés dans les bras l’un de l’autre. Ma mère avait passé 48 heures dans l’aéroport en scrutant tous les passagers qui sortaient des avions y ayant atterri."

La mère de François d’Adesky lui confiera qu’elle avait toujours su qu’ils se retrouveraient et que grâce à ces retrouvailles, elle connaîtrait une fin de vie heureuse.

Sauf qu’en 1994, le Rwanda s’embrasait. "Le fait que ma mère ait épousé un Hutu a fait que les membres de ma famille ont échappé au pire. Mais je suis resté deux mois sans nouvelles d’eux. Non, ma vie n’a pas été un long fleuve tranquille", conclut François d’Adesky, qui s’investit dans la vie politique (il est membre du MR) et associative de Woluwe, se bat contre le réchauffement climatique et, évidemment, pour la reconnaissance de ses "frères et sœurs" métis.

La nationalité Belge - la naissances - le mariage coutumier

PARLEMENT FRANCOPHONE BRUXELLOIS

20 OCTOBRE 2016

François d'Adesky – Co fondateur de l’association « metis de Belgique »

Madame la Présidente du Parlement francophone Bruxellois,
Monsieur le Président de l’Association des Metis de Belgique-Metis van België,
Mesdames et Messieurs les Membres du Parlement francophone Bruxellois, ainsi que des autres Parlements invités,
Mesdames et Messieurs,

C’est un honneur pour moi de faire aujourd’hui devant votre auguste Assemblée, un exposé qui examinera tout d’abord la question de la nationalité belge concernant les metis issus de la colonisation.


1. La question de la nationalité belge
Si, en Métropole, la nationalité belge conférait la qualité pleine et entière de citoyen, il n’en était pas de même dans les territoires africains administrés par la Belgique à l'époque coloniale. En effet, le Conseil colonial belge par le truchement de la « Charte coloniale », qui était la Loi fondamentale, réservait au Congo et plus tard au Ruanda-Urundi la qualité de citoyen uniquement aux Belges originaires de la Métropole. En dehors des ressortissants étrangers principalement indo-pakistanais, grecs et portugais, les populations africaines colonisées par la Belgique ou sous son mandat étaient considérées nominalement comme des nationaux belges, mais juridiquement, n’étaient pas des sujets belges à part entière puisque non citoyens. En outre, le système colonial subdivisait les sujets belges d’Afrique en « civilisés ou évolués », qui étaient immatriculés quelles que soient leur ethnie et leur origine, et en « non-civilisés » dénommés « indigènes » et non-immatriculés.
Notons qu’une carte d’immatriculé fait référence à un matricule donc à un numéro, tandis que la carte d’identité prouve l’identité et donc la dignité. Par ailleurs, pour obtenir le statut « d’évolué », il fallait vivre à l’Européenne : c’est ainsi que fut mis en place, comme dans un monde orwellien, des inspecteurs qui visitaient l’intimité des postulants africains pour vérifier par exemple s’ils utilisaient un mouchoir pour se moucher, s’ils possédaient une radio et un réfrigérateur, s’ils mangeaient avec des couverts et s’ils parlaient le français, etc.
En 1948, le statut de sujet belge « évolué » fut « amélioré » entre guillemets par l’introduction d’une carte du mérite civique qui autorisait les « évolués » à circuler après 18H00 dans les quartiers réservés aux blancs et en 1952, le statut des « meilleurs » procuraient à l’élite d’entre eux au Congo (pour le Ruanda-Urundi ce fut en 1956) un document d’identité qui les assimilait à des citoyens belges et leur permettait par exemple d’envoyer leurs enfants à l’école européenne. On prodiguait dans les écoles européennes un enseignement de qualité sans communes mesures par rapport aux écoles pour indigènes.


Ces chiffres sont cependant à relativiser, car d’une part, sur une population de 14 millions de personnes au Congo en 1959, il n’y avait que 1.557 personnes détentrices d’une carte du mérite civique, parmi lesquelles 217 personnes seulement avaient obtenu la carte d’identité spéciale. D’autre part, ces Africains « meilleurs» restaient cependant des sujets auxquels la citoyenneté à part entière était toujours refusée.
Une des preuves était qu’un sujet belge d’Afrique ne pouvait pas se rendre en Belgique à cette époque. Même les marins congolais de la Compagnie Maritime Belge du Congo-Belge (CMCB) avaient interdiction de descendre à quai quand leur navire accostait à Anvers. Ils étaient confinés à bord tout le temps qu'ils étaient à l'ancre dans la métropole portuaire belge.
Cette interdiction entraîna cependant des désertions tant à Anvers, que dans les escales dans les ports français précédant l’arrivée à Anvers. Il était difficile d’empêcher des marins congolais de descendre à quai sur un territoire étranger. Les déserteurs se retrouvaient ensuite à Anvers où plusieurs avaient des petites amies, une des causes principales des désertions. Paradoxalement, ces marins étant en « droit » sujets belges en Belgique ; ils n’étaient pas expulsables et reçurent donc une carte d’identité de citoyen belge. Leur nombre fut si grand, qu’en 1951-1952 les Pères Rédemptoristes fondèrent l’Amicale des Marins Congolais d’Anvers (AMC).
Cette amicale se chargea de trouver du travail et un logement pour ces marins et s’occupa également de placer auprès de familles belges adoptantes les enfants metis nés de ces unions et que les compagnes anversoises n’osaient garder auprès d’elles. Ce placement se faisait parfois avec l’aide de l’Association Vreugdezaaiers/ « Semeurs de Joie » ou de l’Association pour la Protection et (ensuite) la Promotion des Mulâtres (APPM) (1).


2. La question des naissances
Mais où se situaient donc les metis dans ce système ségrégationniste, cependant non sanctionné par des lois raciales. Si les metis étaient dans une position intermédiaire dans ce régime discriminatoire avec des institutions qui leur étaient réservées, c’est la naissance et le lieu de celle-ci qui déterminaient en fait leur statut.
La législation coloniale était focalisée sur les « indigènes » ; et lorsqu’elle eut sur les bras les metis illégitimes abandonnés par leurs pères belges et blancs à l’échéance de leur mission dans la colonie, elle fut contrainte de bricoler. Ainsi, lorsque le metis était déclaré par la seule mère africaine, il entrait automatiquement dans le statut de l'indigène immatriculé, selon une ordonnance du gouverneur général du 15 juillet 1915 ; c’était encore le cas lorsqu’il était abandonné ou orphelin et que les services administratifs l’avaient identifié et fait passer sous la tutelle de l’Etat ; dans le cas contraire, le metis tombait sous le coup des lois coutumières.
L’accès à la nationalité belge était donc réservé aux metis « légitimes », légitimés ou reconnus par un père ayant la citoyenneté belge pleine et entière, selon les règles du droit métropolitain belge.
Néanmoins, pour faciliter le « déplacement » vers la Belgique des enfants metis de l’orphelinat pour mulâtres (terme utilisé à l’époque) de Save au Rwanda que Sarah Heynssens vient de vous détailler, dont beaucoup ont été enlevés à leur mère, le Gouvernement belge délivra des « laissez-passer » provisoires aux enfants. Pour la plupart, qui n’avaient pas de statut juridique propre lié à l’absence d’un acte de naissance, on trouvait d'urgence des témoins pour établir un « Acte de Notoriété » qui suppléait à cette absence. Sur base de ces « laissez-passer » les Communes belges de résidence de ces enfants leur délivrèrent des cartes d’identité belge.
Toutefois, une circulaire ministérielle du 24 septembre 1960 et publiée au Moniteur belge le 6 octobre 1960 vint créer le trouble. En effet, par cette circulaire (1) le Ministre de la Justice M. André Lilar enjoint aux Bourgmestres de retirer la nationalité belge aux indigènes du Congo, vu que leur pays est désormais indépendant. En ce qui concerne les metis, c’est-à-dire d’après la circulaire ministérielle : « les enfants de mère indigène », ne pourront conserver la nationalité belge que s’ils sont légitimes ou légitimés par un Belge ou s'ils ont été reconnus par un Belge.
La majorité des enfants metis n’étant pas dans ce cas, on leur retira donc la nationalité belge. Ils reçurent des cartes d’identité jaune pour étranger avec parfois les nationalités « fantaisistes » de Ruandais et Urundais étant donné que ces deux pays n’étaient pas encore indépendants en 1960.
Ces cartes d’identité d’étranger créèrent des drames pour les metis issus de la colonisation. D’une part, elles n’autorisaient qu’une circulation dans les pays du Benelux et d’autre part, les metis qui quittèrent volontairement la Belgique pour rejoindre leur famille africaine se retrouvèrent soudainement « apatrides » sur le sol du continent-mère.
Heureusement des personnalités de bonnes volontés s’émurent de cette situation et intervinrent auprès du Gouvernement. C’est ainsi que fut votée la loi du 22 décembre 1961 relative à l'acquisition ou au recouvrement de la nationalité belge par les étrangers nés ou domiciliés sur le territoire de la République du Congo ou par les Congolais ayant eu en Belgique leur résidence habituelle. Cette loi ayant une valeur juridique supérieure à celle de la circulaire ministérielle l’abrogea. En son article 2, §4, la loi permettait aux personnes qui possédaient la qualité de Belge de statut congolais – mais qui n’avaient pas acquis la nationalité belge en vertu des lois métropolitaines sur la nationalité – d’acquérir la qualité de belge par option pour une certaine période.
Elle a été abrogée ultérieurement par le Code de la nationalité belge du 28 juin 1984 qui, en son article 28, §1er, prévoyait une disposition transitoire permettant à ceux qui n’avaient pas introduit de déclaration en faveur de la nationalité belge d’en introduire une dans les deux ans suivant l’entrée en vigueur dudit Code à deux conditions (art. 28, §2, Code de la nationalité belge) :

- Avoir eu sa résidence principale en Belgique durant les deux années précédant l’entrée en vigueur de ce Code.
- L’avoir maintenue jusqu’à la date d’introduction de la déclaration en faveur de la nationalité belge.
Ces deux lois ne comportant que des dispositions transitoires applicables aux Congolais de statut belge, le droit commun trouve aujourd’hui à s’appliquer aux personnes qui n’ont pas opté en temps et en heure pour la nationalité belge.
L’information à cette époque étant presque confidentielle sur les possibilités de recouvrement de la nationalité belge, beaucoup de metis ne purent bénéficier des avantages de ces deux lois.
Par ailleurs, les metis issus de la colonisation belge et résidant en Belgique étaient en fait mis sous tutelle dans les familles adoptantes, les familles d’accueil et les institutions où ils étaient placés. Notons que pour un metis légitime, légitimé ou reconnu, en cas de décès ou d’incapacité de son père belge, c’est le Conseil de sa famille belge qui avait la tutelle, même si cette famille rejetait cet enfant. D’autre part, en 1971, le Gouvernement belge arrêta ses subventions à l’APPM au prétexte que, 10 ans après les indépendances, les metis étaient dorénavant des « citoyens comme les autres belges et n’avaient donc plus besoin de protection spéciale ». Les enfants metis dépendant de l’APPM furent à partir de cette date pris en charge par les CPAS de leur lieu de résidence.
Cela ne régla pas pour autant le statut juridique de ceux qui avaient perdu la nationalité belge. Des metis récupérèrent la nationalité belge par mariage avec des citoyens belges et d’autres par la procédure coûteuse de la « naturalisation ». Plusieurs d’entre-eux durent également résoudre lors de leur mariage le casse-tête de l’absence d’un acte de naissance.


3. La question du mariage coutumier
La question du mariage coutumier, je l’évoquerai sous forme de témoignage personnel. Lors d’une discussion en 2011 avec des chercheurs de la CEGESOMA, dans le cadre de l’étude du déplacement vers la Belgique des enfants metis, j’avais déclaré que les mariages mixtes entre européens et africains étaient de fait interdits durant la période coloniale et que mon père avait été alors obligé de contracter un « mariage coutumier » avec ma mère : cela lui avait fait perdre son emploi de cadre dans la compagnie minière qui l’employait avant de pouvoir rebondir dans d’autres activités. D’après les chercheurs, il n’existait aucune interdiction officielle dans les colonies et, pour preuve, de citer le mariage légal du Capitaine Joubert avec la fille d’un Chef traditionnel congolais.
Pour ma part, je découvris, lors de recherches en 2014, que le mandat de tutelle de la Belgique sur le Ruanda-Urundi, octroyé par la SDN et confirmé par l’ONU, ordonnait l’obligation, pour la Belgique, à reconnaître les actes administratifs des autorités traditionnelles. Cela me remémora une démarche que j’avais entreprise d’une reconnaissance de noblesse belge – pour ma famille paternelle d’origine française avec un patronyme polonisé par l’Histoire – auprès du Service de la Noblesse dépendant du Service Public Fédéral des Affaires Etrangères. Cette démarche n’avait pas abouti, car le Service Public Fédéral m’avait demandé de produire l’acte de mariage de mes parents, que l’Etat colonial avait refusé de leur procurer. Rappelons que, pour être « noble » en droit de la filiation nobiliaire, il faut être un enfant « légitime », issu du mariage légal d’un noble.
Pour résoudre ce problème kafkaïen, il était possible soit d’intenter un procès en droit nobiliaire belge pour discrimination sur base de l’article 1er de la loi du 25 février 2003 qui stipule : qu’il y a discrimination directe si une différence de traitement qui manque de justification objective et raisonnable est directement fondée sur le sexe, une prétendue race, la couleur, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique, l’orientation sexuelle, l’état civil, la naissance, etc., soit de chercher à légaliser le mariage coutumier de mes parents et permettre ainsi, à travers un cas particulier, une évolution significative de la législation en la matière. En effet, une légalisation d’un mariage coutumier « légitime » automatiquement les enfants nés de ce mariage.
Grâce à l’assistance d’un avocat metis belgo-rwandais issu de la colonisation belge et d’un avocat rwandais, j’ai obtenu en date du 17 février 2015 un Jugement supplétif qui vous est projeté sur l’écran (2) et qui légalise enfin le mariage coutumier de mes parents daté de 1945. Un des éléments décisifs dans cette procédure juridique fut le témoignage du généalogiste des clans royaux du Rwanda qui connaissait ce mariage coutumier et le nom de la vache qui en constituait la dot : Impirimba. Comme d’autres mères de metis au Rwanda, la mienne était connue parce qu’issue de l’aristocratie rwandaise, étant cousine du Mwami (Roi) Mutara III Rudahigwa et de son épouse la Reine Rosalie Gicanda. Cela a dû jouer en notre faveur durant la procédure juridique. Ce Jugement mit fin psychologiquement à une injustice et à beaucoup de souffrances familiales et pourra, je l’espère, faire jurisprudence.


4. Conclusion
Il faut reconnaître que, malgré les aléas de leurs histoires, la plupart des metis issus de la colonisation belge ont pu globalement se reconstruire sur le sol belge. Si certains parmi nous ont hélas échoué, beaucoup d’autres – suivant le degré de soutiens reçus de leurs familles, des familles adoptives ou d’accueil, ou des éducateurs des institutions où ils étaient placés – ont pu faire des études et réussir dans la vie. Malgré une interrogation lancinante sur leurs origines africaines, ils ont pu apporter leur contribution au rayonnement de la Belgique. Je pense en particulier à M. Georges Octors, Chef d’Orchestre et le plus grand violoniste belge des temps modernes ou encore à Mme Augusta Chiwy, Infirmière belge et héroïne de la bataille des Ardennes. Je n’oublie pas tous les autres metis qui ont apporté leur contribution comme citoyens à la vie et à l’honorabilité de notre pays.
Le combat des metis issus de la colonisation belge a ouvert la voie à l’intégration des minorités visibles dans notre pays et a également favorisé l’instauration d’une Société Ouverte (Open Society) en Belgique. Il est notoire que la nouvelle génération des metis de Belgique nés de couples mixtes post-colonisation peut épanouir plus facilement ses talents que nous le pûmes. Espérons que les jeunes personnalités belges metisses telles que Jean-Paul Van Haver, dit Stromae, Laura Beyne, Miss Belgique 2012 et actuellement Présentatrice-vedette chez RTL-TVI ou encore Nafissatou Thiam, la récente médaillée d’or des Jeux Olympique de Rio, découvrent un jour notre histoire et la route que nous avons tracée pour eux.
D’autre part, concernant la douzaine de milliers de metis issus de la colonisation belge au Congo et restée auprès de leurs familles africaines à l’indépendance de ce pays, nous constatons qu’elle s’est également bien débrouillée dans son ensemble. Cela malgré les vicissitudes que traversa ce pays et qui pénalisèrent la première génération de metis à qui on déniait parfois la nationalité congolaise et dont on doutait du patriotisme. Les générations suivantes s’intégrèrent mieux et font désormais partie de la classe moyenne ou de l’élite congolaise actuelle. Toutefois, reste en permanence la frustration d’avoir été abandonnés par leurs ancêtres « biologiques » belges et de ce qu’ils clament être une ingratitude de la Belgique à leur égard. C’est ainsi qu’a été créée à Kinshasa « l’Association des enfants laissés par les Belges au Congo ». Cette Association milite pour que la Belgique reconnaisse ses responsabilités à l’égard des metis congolais issus de la colonisation belge et de leurs descendants.
En ce qui concerne le Kivu, le Rwanda et le Burundi, les orateurs précédents nous ont expliqué comment la plupart des 700 metis issus de la colonisation dans cette région, dont les 300 enfants regroupés à l’orphelinat de Save furent déplacés en Belgique. Les rares qui restèrent furent malheureusement rattrapés par la problématique « Hutus-Tutsis ». Le cas du Rwanda étant le plus emblématique. En effet, les metis issus de la colonisation belge qui sont restés au Rwanda après l’indépendance et qui ne possédaient pas de nationalité étrangère, se virent attribuer la nationalité rwandaise conformément au Code de la nationalité rwandaise de 1963.
Ils reçurent comme tous les autres Rwandais nés de parents rwandais une carte d’identité à « mention ethnique ». Cette mention n’était prévue par aucune loi. Il s’agissait donc d’une simple pratique administrative, héritée de la colonisation allemande puis du mandat belge, par laquelle l’enfant était classé dans « l’ethnie » de son père, ou bien dans celle de sa mère, au cas où son père était étranger ou inconnu.
Comme la plupart de ces metis avaient des mères classifiées comme « tutsies », ils subirent les aléas liés au groupe classifié comme « tutsi » durant la période 1962 à 1994 et eurent des destins tragiques durant le génocide de 1994, particulièrement la petite communauté metisse établie depuis 1930 à Gisenyi.
Pour finir, je souhaite aussi rappeler que le destin dramatique vécu par les metis issus de la colonisation belge, le fut plus encore par leurs mères. Lors d’une visite en famille des bâtiments de l’ancien orphelinat de Save en 2005, je fus entouré par 5 femmes âgées, qui me racontèrent s’être établies sur place depuis 1962 en attendant le retour, avant de mourir en paix, des enfants metis que les « blancs » leur avaient volés. L’AMB espère donc – via des recherches dans les archives, l’aide des Ambassades belges dans les pays des Grands-Lacs et des Gouvernement locaux – identifier les familles africaines des metis belges souhaitant renouer avec leurs origines africaines.
Mesdames et Messieurs les Parlementaires, l’AMB compte vivement sur votre appui pour mettre fin à des drames humains et à des casse-têtes juridiques et réparer ensemble, dans la justice et la dignité, les injustices de notre histoire commune afin que cette histoire retrouve toute sa dignité.
Merci à toutes et à tous de votre attention.

Métis : Avec les enfants cachés de la France coloniale

Publié le : 10/07/2020 - 14:43

Reporters © FRANCE 24

Par : Caroline DUMAY & Thaïs BROUCK

Durant la période coloniale, plusieurs milliers d’enfants issus de relations entre des colons et des Africaines sont abandonnés par leur père et arrachés à leur mère. Sur décision du gouverneur général de l’Afrique-Occidentale française, ces "métis des colonies" sont séparés du reste de la société et placés dans des orphelinats. À travers des témoignages inédits, France 24 retrace l’histoire oubliée de ces enfants cachés de la Nation, dépourvus de leur filiation et en quête de reconnaissance. Regardez notre documentaire exceptionnel de 27 minutes.

Tout a commencé en 1903, lorsque le gouverneur Ernest Roume, à la tête de l'Afrique-Occidentale française (AOF), décide la mise en place d’espaces dédiés pour les enfants nés de père français et de mère "indigène", les "bâtards de la République". Dans la colonie Côte d’Ivoire, le "Foyer des métis" voit le jour dans le majestueux ancien Palais des gouverneurs de Bingerville.

André Manket, 90 ans, en fut l’un des premiers pensionnaires. Il a les larmes aux yeux lorsqu’il raconte son kidnapping. "Ils sont venus me chercher dans mon village de pêcheurs d'Anono et m'ont emmené de force. J'avais sept ans. Ma tante était en pleurs...", témoigne le vieil homme, qui est arrivé à Bingerville entouré de deux gardes coloniaux. "On m'a dit : 'Guerard', le nom de votre père, c'est fini. Maintenant, vous prendrez le nom de votre mère." On lui a aussi donné un numéro : le 39. Ce qui signifiait qu’avant lui, il y avait 38 garçons et filles, dont le seul point commun était la couleur de leur peau, métissée.

Traumatisme

Maurice Berthet, lui, ne comprend pas. Il n’est pas Français, mais il possède pourtant des terres à Vitry-le-François, qu’il a obtenues par héritage... "Mon père ne m’a jamais abandonné ! Mais il ne savait pas comment faire. Il coupait du bois et vivait dans la forêt", explique-t-il.

L’abandon est une chose, la perte d’identité en est une autre. Pour avoir accès à Bingerville et au statut de "pupille de la Nation", il fallait se déclarer "orphelins", même quand on ne l’était pas. 

Même son de cloche pour Calile Sahily, le président de l’Association des anciens élèves de l’orphelinat et du Foyer des métis (AEFOCI). "Comment pouvait-on être hier pupilles de la Nation - et donc enfants de l’État français - et ne pas être Français aujourd’hui ? C’est une aberration !",  fait-il remarquer.

Ils ont beau être désormais âgés de plus de 80 ans, le traumatisme est encore bien vivace. "Nous étions la risée de tous. Nos mères étaient traitées comme des prostituées", explique aussi Monique Yace. "On nous traitait de bâtards, de peau grattée... Nous mettre à l’orphelinat, c’était légaliser l’abandon", ajoute, de son côté, Philippe Meyer. Tous aujourd’hui se considèrent comme des "victimes de la colonisation".

Bien éduqués, la plupart de ces métis se sont bien intégrés à la société ivoirienne. Jeanne Reinach, née Langui, est le produit de cette génération d’enfants cachés. Si elle porte le nom de l’une des familles françaises les plus riches de l’avant-guerre, elle n’a, par contre, jamais obtenu la nationalité française. Elle a dû attendre 77 ans pour apprendre que son grand-père, Théodore Reinach, était député de Savoie, membre de l’Institut de France, propriétaire de châteaux et de villas... "Nous en voulons à la France parce qu’elle n’a rien fait pour nous", confie-t-elle, amère.

"Mettre le débat sur la table"

À l’indépendance de la Côte d’ivoire, en 1960, la question de ces enfants n’a jamais été mise sur la table. "Ceux qui ont réussi à obtenir la nationalité française sont ceux qui se sont fait établir, avant leur majorité, un jugement supplétif d’acte de naissance en précisant que le père était présumé d’origine française", explique Patricia Armand, secrétaire générale de l’AEFOCI. Encore fallait-il être informé... La juriste est aussi petite-fille de colon, mais elle n’a jamais réussi à retrouver les traces de son grand père, Fernand Combaluzier, pourtant administrateur foncier.

Beaucoup d'Ivoiriens souhaitent désormais que la France s'inspire de la Belgique qui, en avril 2019, s'est officiellement excusée auprès des enfants métis nés dans ses anciennes colonies. Le mois dernier, cinq femmes métisses, nées dans le Congo colonisé, ont assigné le royaume en justice pour "crimes contre l'humanité". Elles dénoncent des enlèvements systématiques d'enfants comme elles, entre 1911 et 1960. 

La France sera-t-elle à son tour ciblée par ce type de démarche ? Auguste Miremont, ancien ministre de la Communication de Félix Houphouët-Boigny, qui a, lui aussi, grandi au Foyer des Métis, estime qu’"il est temps maintenant de mettre ce débat sereinement sur la table".

Black Lives Matter : déconstruire les mécanismes du racisme

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Le racisme s’est nourri au fil de l’histoire de l’ignorance, de la cupidité et de la lâcheté des sociétés humaines. Qu’il soit inconscient ou assumé, il est le produit d’une construction intellectuelle complexe qui impacte chacun d’entre nous. Bourreau ou victime, on est tous concernés.

L’affaire George Floyd aura eu le mérite de faire resurgir toute une documentation enfouie dans les poubelles de l’histoire, qui donne enfin la parole aux sans-voix, et permet de prendre la mesure de ce fléau, dans sa complexité, sa diversité.

Si les noirs font figure de peuple martyr, concentrant sur eux le rejet des autres peuples (occidentaux, arabes et asiatiques), ils ne sont pas pour autant exempts de reproches et à l’abri de ces travers car ils ont souvent participé activement au racisme systémique dans le rôle du “nègre de service”, et comble de misère, nombre de témoignages rapportant des actes à caractère racistes sont perpétrés quotidiennement contre … des noirs. On appelle cela pudiquement xénophobie, communautarisme, complexe de l’uniforme ou de la blouse, abus de pouvoir ou … lutte des classes.

Les fondements du racisme sont à rechercher dans l’histoire, l’économie, la philosophie, et si l’on peut légitimement s’indigner des manifestations de racisme, les éradiquer nécessitera un travail d’information, d’éducation et un dialogue entre les protagonistes afin de rétablir la vérité historique et la justice.

Tous les peuples, chacun à son niveau, ont contribué à l’évolution de l’humanité. Vouloir le nier ou établir une hiérarchie est en soi un acte fondateur du racisme.

Liens utiles pour comprendre le phénomène:

Le tabou de la traite négrière arabe :

Kakou Ernest TIGORI - Prix Mandela de littérature 2017 : l’Afrique à désintoxiquer :

Etre noir au Liban : un combat quotidien contre le racisme :

Arte - Aux sources européennes du racisme :

TV5 : Juliette Esmeralda : la couleur des pharaons :

Cheikh Anta Diop : en finir avec le complexe du colonisé :  

France 2 : Pascal Blanchard - historien: Le racisme inconscient et les stéréotypes :

Le berceau humain: les origines négro-africaines de l'Egypte antique - version française : 

AJ+ - Carte à fric : qui a traçé les frontières des Etats africains ?

Général Alexandre Dumas, le héros noir oublié :

La Charte du Mandé : 1ère déclaration des Droits de l'Homme de l'histoire :

Interview Alain Mabankou sur TV5 : 

Pascal Blanchard, historien : l'histoire coloniale de la France n'est toujours pas assumée :

Pascal Blanchard, historien : Celui qui naît avec une couleur a un destin :

Lisapo Ya Kama - Le projet de Cheikh Anta Diop pour l'Afrique:

TV5 : Les noirs en France du 18e siècle à nos jours :

Chasselay 1940 : tirailleurs sénégalais massacrés par les nazis :

Le racisme envers les gitans :

La théorie complotiste d’Eric Zemmour sur les Verts et l’Islam vaut le détour(nement) :

La colonisation en Afrique : résumé sur carte :

La Conférence de Berlin 1885 sur le partage de l’Afrique :

Arte : l’Islam n’a pas aboli l’esclavage :

“Strange fruit” de Billie Holiday : un hymne antiraciste :

L’indépendance sanglante de Madagascar :

Discours du Premier Ministre Patrice Lumumba lors de la proclamation de l’indépendance du Congo :

Arundhati Roy : Le racisme indien envers les noirs est presque pire que celui des blancs :

RTBF - Congo belge : la stigmatisation des enfants métis :

Le racisme anti-blanc existe t-il ?

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Cheikh Anta Diop : en finir avec le complexe du colonisé

“Le complexe de l’africain est très très très profond: il préfère croire le mensonge dans la bouche d’un blanc que la vérité dans la bouche d’un noir”

Extraits d’une conférence à l’université de Niamey, où un étudiant l’interrogeait sur le moment où ses thèses seraient reconnues ?

Cliquer sur la vignette pour voir la vidéo.

COVID'RESILIENT : La réponse sénégalaise !

Sursaut national face au coronavirus: Gouvernement, secteur privé, milieux académiques, société civile et populations se sont érigés en coalition pour démentir la catastrophe annoncée. Il y aura un avant et un après-Covid-19. C’est écrit !

Accédez en un click à : -La plaquette de présentation de la coalition Daancovid-19 ; -L’étude du CNP sur l’impact et la gestion du Covid-19 dans les entreprises sénégalaises ; -Les interviews audio des responsables de la coalition Daancovid-19 ; -Les mesures fiscales proposées par l’Ordre National des Experts du Sénégal - ONES.

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Plaquette de présentation en un click

Plaquette de présentation en un click

CNP l'oeil ouvert Covid19 mai 2020.jpg

Impact et gestion du Covid-19 dans les entreprises du Conseil National du Patronat - CNP

Premières conséquences économiques, sociales et financières de la crise sanitaire Covid-19 dans les entreprises du Cnp

Mesures urgentes d’accompagnement et de soutien aux entreprises souhaitées par le Cnp

Contributions des groupements professionnels et entreprises du Cnp à la solidarité nationale

Vision du Cnp sur les perspectives de relance économique

Guide du Cnp pour la prévention et la gestion sanitaires du Covid-19 en milieu professionnel

Articles du Code du Travail relatifs aux procédures de chômage technique et de modification du contrat de travail

Mesures fiscales et financières du Programme de résilience économique et sociale

Dispositif financier de soutien de l’activité économique de la Bceao

Dispositif de report et de suspension d’échéances de crédit de l’Apbef

Daancovid-19 : Les clés de la résilience (audio)

Daancovid-19 : Les clés de la résilience (audio)

Le Conseil National du Patronat - CNP a diffusé le 17 mai 2020 sur Radio Sénégal International - RSI 92.5 FM son émission radiophonique "l'Entreprise Citoyenne", produite en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer. Elle était consacrée aux réponses du Numérique à l’impact économique et sanitaire du Covid 19, Avec les interventions de : M. Antoine NGOM – Président d’OPTIC – Co-Président de Daancovid19, M. Mouhamed Tidiane SECK - Coordonnateur Technique Daancovid19, M. Abdoukhadre DIAGNE - Représentant du sous-comité Gestion - Pilotage et Aide à la Décision, M. Ibrahima Nour Eddine DIAGNE – Coordonnateur du sous-comité Solutions Digitales, M. Mamoudou NIANE – Coordonnateur du sous-comité Juridique, M. Mohamed Moustapha DIOUF - Représentant du sous-comité Analyse - Recherche – Suivi, Mme Carine VAVASSEUR - Coordinatrice assistante du sous-comité Communication.

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« Il n’y a pas de hasard, que des rendez-vous »

En Chine, il y a deux options pour traduire le mot « crise » : danger, et opportunité.

Et si la pandémie est partie de l’Empire du Milieu, ce n’est peut-être pas une coïncidence mais l’illustration que cette menace était un défi à relever, une expérience à surmonter qui aujourd’hui se révèle une opportunité pour les chinois de se redéployer à l’échelle planétaire comme des experts de cette pandémie, ce qui par ricochet, légitime leur posture de centre de gravité du monde de demain.

En effet, ce pays est devenu le point de convergence de la production industrielle en pièces détachées, produits finis et prestations de services au point que tout ce qui l’affecte positivement et négativement a des répercussions sur l’ensemble de l’économie mondiale. Pour le Covid 19, c’était définitivement « the place to be », la rampe de lancement pour passer à la postérité comme une pandémie parmi les plus glorieuses.

Il y a dans l’histoire du monde des grandes étapes, marquées chacune par de grands cataclysmes qui ont provoqué des ruptures, comme le big bang créateur de l’univers, la fin des dinosaures provoquée par la chute d’une météorite sur la terre, les grandes glaciations et éruptions solaires qui sont le fait de la nature, les différentes guerres, épidémies et crises politiques provoquées par les hommes, et au plan de la mythologie religieuse, des phénomènes tels que le déluge qui ont permis de rebattre les cartes chaque fois que la planète s’est trouvée dans une impasse.

Dire que le monde d’aujourdhui est arrivé au bout de ses incohérences est un euphémisme : il n’a jamais disposé d’autant de moyens et n’a jamais autant mis sa survie en péril. La faute à une pénurie des valeurs, une surexploitation des ressources et une redistribution calamiteuse des richesses qui ont exacerbé la lutte des classes en verrouillant toute solution de sortie de crise.

Les seuls exutoires proposés face à ce désespoir sont les migrations et la radicalisation religieuse.

Hasard ou coïncidence, le point culminant a été atteint avec la succession de COP stériles où les décideurs et influenceurs de ce monde convergent périodiquement au mépris de leur empreinte carbone, tirent la sonnette d’alarme sur l’urgence de réguler le dérèglement climatique puis se quittent en remettant la prise de décision… à la prochaine COP.

Dans ce marasme complet où la raison et le bon sens ont capitulé face aux intérêts partisans, « Make America Great Again », il n’est plus possible de compter sur le sens des responsabilités des hommes pour trouver des solutions durables aux problèmes qu’ils ont créés, le salut doit donc venir d’une influence extérieure qui va imposer un reset du système, une remise en question de ses fondamentaux génératrice d’un ordre nouveau.

Et pour faire bonne mesure, le redresseur de torts s’est attaqué au système par ses symboles les plus puissants :

-Les pays dominants : Voir l’Amérique triomphante, la vieille Europe et l’ambitieux Iran plier sous le joug de cette épidémie, c’est toute la suffisance des sociétés humaines qui révèle sa fragilité : un colosse aux pieds d’argile,

-Le système financier international : Basé sur la consommation et la spéculation, il a installé une surenchère sur les ressources et les moyens afin de maintenir les ménages et les entreprises dans une dépendance permanente de leurs envies et non de leurs besoins, source de tous les excès,

-Les systèmes de santé publique : La santé publique des Etats est désormais abordée selon des critères de gestion comptable plutôt que de réponse sociale. Résultat, la logique de solvabilité prime sur le service public, avec comme conséquences une médecine élitiste, des stocks exsangues et une couverture médicale défaillante,

-L’industrie pharmaceutique : Le paradoxe est que les Etats se sont dessaisis de la production de médicaments au profit de sociétés privées qui l’ont réduite à un simple commerce. Du coup, l’offre de médicaments répond à des critères de profit au détriment de la santé des populations qui sont maintenues dans un état de morbidité chronique : on ne guérit plus, on soulage et on maintient la dépendance aux traitements à vie.

-La structure sociale : Elle a explosé sous le coup d’expérimentations hasardeuses assimilées au « Progrès », menées au pas de charge par des apprentis sorciers obsédés par les Libertés et qui n’ont pas pris soin de laisser aux citoyens le temps de mesurer les bienfaits de ces réformes sur les Droits Humains et libertés individuelles : Mariage pour tous, PMA, GPA, ainsi que sur les sciences et la technologie : bioéthique, OGM, 5G, etc…

-Les modes de production et de consommation : Frénétiques, boulimiques, déraisonnables, axés sur le profit plus que sur la préservation des ressources naturelles et financières, jusqu’au point de rupture,

-La préservation de l’environnement : Sacrifiée sur l’autel du pouvoir, du confort et du profit, avec cet Accord de Paris devenu caduque et ces dirigeants politiques incapables de changer de paradigme, enfermés qu’ils sont dans une logique de réélection ou de profit.

Le monde est fait de grands équilibres qui échappent à l’intelligence de l’Homme et l’univers doit sa longévité à des lois de régulation qui s’imposent à tous. La capacité des espèces animales et végétales à s’adapter aux changements de leur environnement a fait le reste, c’est tout ce qui fait la richesse et la beauté de la biodiversité, que l’homme par sa cupidité s’est évertué à mettre à mal au risque de flirter avec le point de non-retour.

Le jour d’après :

Alors oui, on ne peut pas exclure l’hypothèse qu’à l’image du déluge, le coronavirus soit arrivé à point nommé pour contraindre les sociétés humaines à prendre conscience qu’elles sont allées trop loin et qu’elles devront reconsidérer leur rapport à la communauté, à la production et à l’environnement.

Malheureusement, il y aura un prix à payer :

-D’abord humain, par la sélection naturelle qui va soustraire les éléments les plus fragiles, afin de repartir avec des troupes saines, viables, à même de porter le nouveau projet,

-Ensuite sociétal, car le confinement aura mis les hommes face à toutes leurs incohérences, il conviendra de revoir l’échelle des valeurs pour le couple, les enfants, la communauté. Cette remise en cause va provoquer nombre de conflits familiaux, divorces, rupture d’héritages et d’amitiés car tout sera à reconstruire,

Egalement, économique avec les faillites d’entreprises, pertes d’emploi qui vont totalement redessiner le paysage de l’entreprise survivante, avec plus de flexibilité et d’insécurité mais également un nouveau rapport à la production, notamment avec la généralisation forcée du télétravail dont le maintien aura un effet salvateur sur les transports, la pollution, la productivité et la sociabililté,

-Enfin, environnemental, par la prise en compte de la durabilité comme fil d’Ariane de toutes les politiques touchant à l’humain, à la production, à la science et à la biosphère.

Covid 19 : danger ou opportunité ?

La réponse nous appartient, individuellement et collectivement, à travers l’émergence d’une nouvelle citoyenneté basée sur la responsabilité, la sincérité et la solidarité.

Amath BA

31 mars 2020

Préservation de l'Environnement au Sénégal: la Mère des Batailles !

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Alerte toutes pollutions : Dakar, une bombe écologique ?

Par: Le Monde - Le Monde | 10 mars, 2020

VIDEO : https://youtu.be/C1jzYZGg9Bs

Fin février, durant trois longues journées, Dakar a été plongée dans un épais nuage de poussière provenant du Sahara. Pendant ces épisodes, de plus en plus courants, la concentration de particules fines dans l’atmosphère explose. En termes de pollution atmosphérique, la ville dépasse les normes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : la concentration de particules fines est en moyenne cinq fois supérieure aux recommandations de l’OMS. Des pics de pollution qui ont plusieurs sources. Pour les comprendre, notre journaliste a parcouru la ville, du centre-ville à la plage de cap Manuel, en passant par la zone industrielle, la gare de Colobane, les quartiers Médina et HLM, le marché de Soumbédioune et la décharge de Mbeubeuss.

Protection de l’Environnement et gestion des déchets biomédicaux : Riad Kawar, les contrecoups de l'activisme

Par: Marième Birame BÂ - Seneweb.com | 06 mars, 2020 à 10:03:01  | Lu 645 Fois |  11 Commentaires

Militant reconnu de la protection de l’Environnement au Sénégal, Riad KAWAR s’est illustré par ses bulletins météo, sa veille sur la qualité de l’air, sa mobilisation pour la défense du littoral et la lutte contre l’occupation anarchique des sols, l’alerte sur la propagation des déchets médicaux.

Cet activisme sur tous les fronts pour une cause d’utilité publique lui a valu une reconnaissance méritée dans les milieux du développement durable, mais également des inimitiés parmi les pollueurs, qui ont même cherché à l’intimider.

Pas de quartier pour les empêcheurs de polluer en rond: circulez, y’a rien à voir…

Témoignage vidéo: https://www.seneweb.com/news/Video/gestion-des-dechets-biomedicaux-riad-kaw_n_310776.html

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Au Sénégal, des citoyens se mobilisent pour un Dakar plus vert

Victime d’une urbanisation galopante, la presqu’île du Cap-Vert voit sa superficie d’espaces boisés réduite à la portion congrue.

Par Marie Lechapelays - Le Monde Afrique - Publié le 04 mars 2020

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Stop à l’urbanisation galopante de Dakar qui ajoute de la pierre à la pierre. « Pourquoi la ville n’aurait-elle pas son Central Park avec des arbres, des fleurs, un lac, des animaux, de la pelouse ? », s’insurge Mamadou Sakho, un militant écologiste sénégalais de 35 ans.

Samedi 29 février, la séance de projection de son documentaire Sénégal vert. Horizon 2035 a rassemblé à la librairie de L’Harmattan de Dakar une centaine de jeunes citadins. Tous militent pour que leur ville, vitrine du pays, ne ploie plus sous le poids d’une urbanisation galopante, mais regagne « son lustre d’antan ». Un groupe parmi d’autres où, aujourd’hui dans la capitale du Sénégal, les citoyens se mobilisent pour une ville plus verte.

Mi-janvier, Mamadou Sakho avait publié une pétition largement relayée sur les réseaux sociaux. Il voulait transformer l’ancien aéroport international Léopold-Sédar-Senghor de Dakar – 600 hectares en plein cœur de la capitale – en réserve naturelle. Cet espace serait « la symbolique d’une nouvelle vision écologique non seulement sénégalaise, mais tout simplement africaine », souligne-t-il dans sa pétition.

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Si plus de 20 000 personnes l’ont signée, peu croient le projet possible. En 2017, l’aéroport international du Sénégal déménageait à cinquante kilomètres de Dakar, laissant ouvertes les possibilités pour ce gigantesque espace de la presqu’île. Une partie de l’ancienne infrastructure est dès lors confiée par décret présidentiel à l’armée, qui l’utilise pour les manœuvres aériennes militaires, les voyages présidentiels et ministériels.

Le reste est cédé au goutte-à-goutte pour la construction d’immeubles privés et d’opérations immobilières. Un projet de cité financière futuriste a d’ailleurs été annoncé. Mais, depuis, plus un mot sur ce qui devait ressembler à la Casablanca Finance City, reconnue comme la première place financière du continent, mais reste un projet dans les limbes.

« Une ville qui ne respire plus »

Dans ce contexte, les citoyens sentent bien que leur mobilisation massive peut faire plier les politiques. Et qu’il y a urgence. Aujourd’hui, le parc forestier et zoologique de Hann, situé à 6 kilomètres du centre-ville, est le seul endroit où les Dakarois peuvent respirer sous les arbres. Soixante hectares de verdure pour plus d’un million et demi d’habitants à Dakar même, c’est peu.

Selon le plan directeur d’urbanisme de Dakar et de ses environs horizon 2035 du ministère sénégalais du renouveau urbain, de l’habitat et du cadre de vie, « la superficie d’espaces verts [est] de 0,15 mètre carré par personne actuellement » dans la capitale. Un chiffre que le ministère voudrait faire passer à « 1 m2 par personne », toujours selon le document.

Lire aussi  Plan B : reboiser sans planter d’arbres, c’est possible

Pour Mamadou Sakho, cet objectif est impossible à atteindre si un espace comme celui de l’ancien aéroport ne redevient pas vert. « C’est la dernière chance d’avoir un poumon dans cette ville qui ne respire plus », insiste-t-il. D’autant que la population urbaine continue à croître à un rythme élevé.

Face à la pression foncière, le littoral est aussi menacé. Le 15 février, Riad Kawar, un autre militant écologiste dont la page Facebook « La météo dakaroise de Riad » est très suivie, publiait une vidéo alarmiste. « Des promoteurs immobiliers sont en train de détruire les falaises qui protègent le Plateau [centre-ville] de Dakar », prévient-il, montrant des pelleteuses repoussant la terre de la falaise vers la plage du Cap Manuel, à une extrémité de la presqu’île.

« Des constructions anarchiques »

Au lendemain de cette vidéo devenue virale, la Direction de la surveillance et du contrôle de l’occupation du sol (DSCOS) a fait arrêter le chantier. Mais « c’est certainement temporaire », se désole Riad Kawar. Non loin, il a remarqué que des résidences immobilières avaient déjà « grappillé » sur la falaise. Il y a même, ça et là, « de graves craquelures », raconte-t-il, inquiet des mouvements de terrain induits par les constructions, qui font risquer éboulements et glissements de terrain.

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Le grignotage foncier du littoral n’est pas nouveau à Dakar. Le protéger, c’est le combat d’une vie pour Moctar Ba, qui fait partie des outrés de la première heure. Depuis les années 2000, l’association Nouveau Monde qu’il préside a vu des « constructions anarchiques » grignoter le littoral, ce « joyau de Dakar ». Depuis quelques années, une zone comme la corniche ouest, au plus près de la mer et dont l’urbanisation est très réglementée, est en travaux permanents, en dépit des réglementations en vigueur.

A l’occasion de la dernière élection présidentielle, en février 2019, il avait même rédigé un « Pacte politique pour sauver le littoral », enjoignant les cinq candidats en lice de « prévenir la perte irréversible du capital biologique, esthétique et identitaire [que le littoral] représente » mais aussi, de « lutter contre tout bradage ».

Comme Saliou Beye qui travaille aux abords de l’ancien aéroport, il ressent le sentiment d’être lésé, oublié comme l’intérêt général. Il assure que Macky Sall, alors candidat et réélu à sa propre succession, l’avait félicité pour son pacte. Mais depuis, « rien n’a bougé ».

Reboiser toute la corniche de la presqu’île

La raison de cet immobilisme tient en une bulle spéculative qui gangrène la capitale. La ville est mangée par « un urbanisme d’opportunités foncières », explique Djibril Diop, chargé de cours à l’Ecole d’urbanisme et d’architecture de paysage à la faculté de l’aménagement de l’université de Montréal.

Une problématique dont il s’est emparé dans un livre publié en 2012, Urbanisation et gestion du foncier à Dakar : défis et perspectives« La demande est forte, c’est une manne financière très importante, assure-t-il au Monde Afrique. Tout est vendu par opportunisme. »

Normalement, les prix sont définis par quartier par l’Etat. En réalité, ceux pratiqués sont doublés, voire triplés. Face à de tels enjeux économiques, et malgré l’existence de différents codes, comme celui de l’environnement, des collectivités locales et territoriales, de l’urbanisme, qui protègent certaines zones de la ville de toute construction, la préservation de l’environnement ne fait pas le poids.

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Quelques citoyennes adoptent des stratégies astucieuses, de dernier recours. Il y a quelques mois, Mara Baalbaki, une femme d’affaires, a créé l’association Ecolibri pour reboiser toute la corniche de la presqu’île. Repérant un endroit vierge pour l’instant épargné de tout projet de construction, elle y a planté quelques arbres et des plantes résistantes. « S’il y a quelque chose, normalement on n’y touchera pas », précise-t-elle avec un air malicieux. Une astuce réitérée par Riad Kawar qui a fait planter plus de cent cinquante arbres pour stopper les pelleteuses aplanissant la falaise.

Depuis son élection, fin septembre 2018, Soham El Wardini, la maire de Dakar, veut rendre la capitale plus saine. Mais le partage de la gestion des espaces entre la ville, les collectivités locales et l’Etat rend les réponses trop lentes et floues pour la population. Un « Central Park » au cœur de Dakar, un littoral protégé, une utopie ? « Peut-être, répond Mamadou Sakho, mais on ne va pas lâcher l’affaire. »

Marie Lechapelays (Dakar, correspondance)

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MYTHOLOGIE DES TEMPS MODERNES: LE BON SAUVAGE ET LE BON SAUVEUR - Le développement durable et l'économie de marché: Pensées et arrière-pensées

MYTHOLOGIE DES TEMPS MODERNES: LE BON SAUVAGE ET LE BON SAUVEUR

Le développement durable et l'économie de marché: Pensées et arrière-pensées

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La main qui donne est au-dessus de la main qui reçoit. Dès lors, les notions de partenariat, de coopération et de coresponsabilité sont à géométrie variable, selon le point d'observation.

C'est du moins le point de vue de Ngor Sène, paysan sérère de son état, enraciné dans son terroir et pétri de bon sens, au crépuscule de son existence.

Au-delà des grands principes fondateurs qui se drapent de vertu et du sens des responsabilités, le développement durable apparaît comme LE marché émergent, l'Eldorado des consultants et des grands penseurs de ce monde, passés maîtres dans la promotion des néologismes qui, comme un tube du Top 50, colonisent les esprits et créent des écrans de fumée.

Ainsi, nous avons tous adopté le «changement de paradigme» alors que nous n'avions même pas conscience d'en avoir déjà eu un, nous découvrons la résilience comme une nouveauté, alors qu'endurer la souffrance et se relever est l'essence même de la condition animale.

Et aujourd'hui, face aux funestes échéances de la planète, + 7 ° de moyenne en plus à la fin du siècle au lieu des + 4.8 ° prévu, les termes savants de biodiversité et de biosphère sur lesquels ergotents les experts renvoient tout simplement à une appellation compréhensible par tous: la nature.

Le monde continue d'être dirigé à travers des grands-messes telles que Davos et le G7 où les influenceurs de tous horizons se réunissent autour d'une seule équation: comment assurer la croissance à travers la consommation, seule à leurs yeux susceptible de garantir la pérennité de l'économie ?

L'Emploi et l'Environnement ne sont que des variables d'ajustement dont on ne se préoccupe qu'une fois la production et de la consommation assurées.

Il n'est donc pas étonnant que la planète aille si mal et que la génération montante, à l'image de Greta Thunberg, délivre des bonnets d'âne à l'ensemble de la classe politique du monde.

Car si les destinées de notre planète étaient confiées au bon sens de notre Ngor Sène et de ses congénères paysans, ils commenceraient par renverser la pyramide actuelle qui produit à tout va et provoque ensuite l'envie à travers une communication frénétique pour booster la consommation. Le monde du bon sens partirait des besoins réels, fabriquerait en tenant compte des réserves en ressources naturelles, s'attacherait à prolonger la durée de vie des biens et services en favorisant la réparation au détriment du remplacement, et communiquerait sur les bienfaits de ces économies d'échelle.

Pour ce faire, cinq mesures simples mais révolutionnaires:

1-Agroalimentaire:

Revoir les dates de péremption à la hausse, quitte à réduire les additifs chimiques. Un yaourt destiné au marché français se voit attribuer une date limite de consommation de 3 semaines quand il est écoulé en métropole, et 5 semaines quand est livré dans les DOM-TOM. Cette différence ne répond pas aux exigences sanitaires mais plutôt aux intérêts commerciaux de la branche professionnelle qui, sous prétexte de pousser au renouvellement rapide des stocks, incite les consommateurs à jeter des produits qui en réalité, ont encore une durée d'utilisation de 30% ;

2-Lampes à basse consommation, puis LED:

L'introduction des lampes à basse consommation a été controversée en raison de la contenance de produits polluants voire dangereux, tels que le mercure. Certains scientifiques ont fait le lien entre leur mise en service et la recrudescence de certains types de cancers tels que celui de la thyroïde. En réponse à la polémique naissante, les pouvoirs publics d'Europe ont appliqué le principe de précaution, en recommandant une distance minimale de 1 mètre entre la lampe et la personne qu'elle éclaire, et elles ont mis en place des bacs de récupération des ampoules usagées en vue de prévenir les casses accidentelles, puis de les recycler.

Aujourd'hui que les investissements ont été amortis et que la demande stagne, voilà qu'on reconnait implicitement le caractère délicat de ce type d'ampoule pour la santé et l'environnement, accompagné d'une forte recommandation de l'abandonner au profit des LED, qui se voient attribuer toutes les vertus… pour l'instant.

A croire que la préservation du cycle «Recherche et développement - Production - Amortissement - Remplacement» qui sous-tend la consommation mondiale est plus importante que la préservation de l'environnement et la santé des populations.

Le même constat peut être fait dans l'industrie pharmaceutique avec tous ces médicaments controversés tel le Médiator, que le législateur a mis des années à mettre hors circuit, le temps que le retour sur investissement soit assuré.

3-Electronique: obsolescence programmée  :

L'électronique est grosse consommatrice de produits polluants (plastique, donc pétrole), de métaux rares (zircon), sources de dégradation de l'environnement et d'exploitation humaine (travail forcé, travail des enfants, faible rémunération et pénibilité). Si l'utilité de ces technologies ne souffre d'aucune contestation, le choix de consommation pose problèmes, avec l'obsolescence programmée et la quasi-impossibilité de les réparer. Résultat: la durée de vie de tous ces appareils oscille entre 2 et 5 ans à l'issue desquels ils vont s'entasser dans des décharges où ils polluent. Le bon sens commande de pouvoir les réparer et prolonger leur durée de vie, ce qui aurait un impact positif sur la consommation de leurs composants, donc sur les ressources de la planète.

4-Téléphonie mobile:

La téléphonie mobile est le secteur émergent de l'heure avec une moyenne d'utilisation de 2 ans pour un appareil en Europe. Pas parce qu'il est obsolète, mais simplement parce que pour booster la consommation, l'industrie vous contraint à en changer. Pour ce faire, tous les moyens sont bons: promotion sur de nouveaux appareils, blocage des mises à jour sur votre ancien appareil, inflation sur les prix des pièces de rechange et réparations. Souvent, ces appareils connaissent une deuxième vie dans les pays du tiers-monde où ils sont boostés par les formules de puces prépayées grâce auxquelles au Sénégal, il y a presque autant d’appareils en service que d'habitants, alors qu’aucune stratégie n'a jamais été mise en place en place pour récupérer et recycler les produits toxiques qu'ils renferment (piles, métaux lourds),

5-Industrie pharmaceutique: pharmacopée, herbes et substances naturelles versus industrie pharmaceutique et brevets:

Le paradoxe de l'industrie du médicament est que, question de santé publique par excellence, elle est quasi exclusivement entre les mains de laboratoires privés qui au motif qu'ils ont soutenu la recherche et le développement et qu'ils ont acheté les brevets, en font une marchandise comme toute autre. Résultat, les gouvernements ont toutes les difficultés pour développer des politiques de santé opérationnelles et sous la pression des lobbies, ont renoncé à soigner, se bornant à maintenir les populations dans un état de morbidité opérationnelle qui leur permet de rester actives tout en restant dépendantes de leurs médicaments sous la forme de traitements préventifs (paludisme, grippe) ou longue durée (diabète, hypertension, VIH),

Ces laboratoires s'évertuent également à combattre toutes formes alternatives de traitements pour les maladies endémiques telles que l'Artemisia qui semble être une réponse valable au paludisme, mais que la médecine officielle s'interdit de reconnaître au risque de contrarier les intérêts des lobbies pharmaceutiques.

Pourtant en Afrique, en Asie notamment, la médecine traditionnelle réussit à assurer une espérance et un confort de vie dans des zones dépourvues de pharmacies, mais nous sommes conditionnés pour prendre ces éléments actifs sous forme de comprimés, de gélules ou d'injections plutôt que sous leur forme naturelle autrement plus efficace.

Résultat des courses, on surconsomme et si on n'a pas de sous, on crêve !

-Dispositif institutionnel:

Nos bons paysans finiraient par redonner un sens aux maux et aux mots, notamment en mettant au rebus le terme usurpé d'Economie.

Car comment peut-on oser appeler la gestion du monde «Economie» alors que tout tourne autour de la consommation et confine au gaspillage ? Et que dire de ces Ministres de l'Economie qui n'en font aucune, se limitant à dépenser un argent qu'ils n'ont pas ? Ministre de la Dépense ou Ministre de la Dette serait plus approprié.

Un Ministre de l'Economie digne de ce nom serait nommé pour étudier les voies et moyens de réduire l'impact de la spéculation sur les marchés financiers et optimiser la gestion des ressources afin de consommer moins et produire propre, il proposerait des mécanismes permettant de favoriser l'épargne et l'économie circulaire. En réduisant la production mondiale de 30% en matières premières, sources d'énergie et biens de consommation, le monde ne s'en porterait pas plus mal et les besoins de base seraient assouvis. Les seuls qui y trouvaient à redire sont les rares (1% ?) Qui ont plus que ce qu'ils peuvent consommer, et donc thésaurisent, ou gaspillent au lieu de redistribuer.

Le monde se trouve ainsi partagé en quatre catégories de délinquants, coupables de:

-Délit de perversité :

Ces dirigeants du monde qui font de la conquête puis de l'exercice du pouvoir une fin en soi, qui justifie les moyens,

-Délit de cupidité :

Ces champions de l'industrie, des services, de la finance et de la communication qui président aux destinées de l'économie de marché, incapables d'envisager l'évolution du monde autrement qu'en terme de surenchère. Même après avoir cédé la moitié de leur fortune, ils restent les plus riches du monde…

-Délit de complicité :

Tous ceux qui dans leur vie professionnelle et associative, alimentent les dérives de ce monde tout en feignant de les dénoncer, contre argent et illusion de réussite sociale,

-Délit de passivité :

Tous ces citoyens du monde exploités, opprimés, fragilisés mais qui dans l'adversité, ne savent pas comment fédérer leurs énergies pour constituer une alternative collective aux dérives de notre époque.

Apocalypse Now !

L'économie de marché se révèle un marché de dupes, un rapport de force entre le pot de terre et le pot de fer, une fable contemporaine du bon sauvage et du bon sauveur

Car dans ce monde en perdition, deux espèces cohabitent :

-Le bon sauvage:

Il a une destinée toute tracée : celle de subir et de s'accommoder des décisions prises par d'autres pour la satisfaction de leurs seuls intérêts. Le bon sauvage a des ressources naturelles dont il n'a aucune idée de la valeur et de l'intérêt, et qu'il se révèle bien incapable d'exploiter, il dispose d'un capital humain qu'il met volontiers au service de son prochain, même si celui-ci l'embarque dans des guerres prétendues mondiales qui ne sont pas les siennes, et enfin et surtout, il est né avec un cerveau simplifié, doté des seuls programmes fonctionnels, ce qui laisse la place pour y télécharger un système d'exploitation 2.0 avec langue, culture, éducation, formation professionnelle, et le logiciel de soumission qui va avec.

C'est du moins la perception qu'en a le bon sauveur, et qu'il a réussi à lui vendre à vil prix.

Et pour asseoir sa domination, ce bon sauveur s’emploie à sélectionner ses interlocuteurs parmi une élite africaine à l'image de la chèvre de Monsieur Seguin : docile, caressante, se laissant traire sans bouger, à qui il n'offre qu'une alternative: se soumettre à l'ordre mondial ou se démettre.

Pour le dirigeant africain, sans son mentor, point de salut, et celui qui s'aventure à vouloir s'affranchir est systématiquement mis en quarantaine, diabolisé, neutralisé, déposé, voire éliminé. En conséquence, ceux qui survivent, et qui durent, sont entourés d'une nuée de partenaires étrangers du genre de «ces amis qui vous veulent du bien», à condition qu'ils achètent leur technologie, leur expertise et leur réservent leurs marchés publics les plus juteux.

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-Le bon sauveur:

On pourrait l'appeler le berlinois, car l'ironie de l'histoire a fait de cette ville le centre de ses grandes décisions.

En effet, de la Conférence de Berlin de 1885 qui a défini les règles du dépeçage de l'Afrique par la colonisation, à la chute du mur de Berlin en 1989, qui a consacré la défaite du socialisme et l'avènement de l'économie de marché comme système de référence, l'occident a réussi la prouesse d'être le plus grand prédateur de l'univers, en soumettant les hommes, biodiversité et ressources minières à une exploitation effrénée, tout en se drapant du costume du garant des droits humains et de la protection de la nature.

Pour ce faire, il a élaboré de savantes théories pour légitimer sa main-mise sur les actifs du monde, notamment en affirmant que les peuples sous sa coupe l'étaient de leur plein gré, dans l'espoir d'être menés vers la civilisation et le progrès.

Enfin, il a développé tout un arsenal d'institutions de régulation telles que celles de l'ONU, le G7, le G 20, les sommets de Davos et autres rencontres où il se gargarise des richesses du monde, et y invite ses affidés au compte-goutte pour qu'ils puissent y ramasser quelques miettes du festin dont ils pourraient se glorifier auprès de leur opinion publique nationale.

Développement durable versus maintenance durable

L'économie du marché se drape du manteau de la vertu en invoquant la bonne gouvernance, l'éthique, la responsabilité sociétale des entreprises et le respect de l'environnement mais force est de reconnaître qu'en dépit des incantations, les gros scandales continuent dans une relative impunité (dieselgate de Volkswagen, scandale du Médiator, déchets toxiques exportés vers des pays pauvres), et 25 ans après la Conférence de Rio sur le climat et malgré la cascade de COP, aucune mesure contraignante n'a pu être prise en faveur de l'environnement. Les financements sont dispersés entre les institutions, les gouvernements, les experts et les entreprises, et la prévision d'augmentation de la température de la planète à la fin du siècle passe de 4,8 à 7 ° C. Cherchez l'erreur…

Pourtant à l’opposé, la dernière crise financière internationale a été enrayée en trois coups de cuillère à pot par les grands de ce monde, qui ont su prendre des mesures radicales, notamment en injectant massivement de l'argent public dans les secteurs financier, industriel et immobilier, ceux-là mêmes qui étaient à l'origine du désastre. A contrario, il est symptomatique de constater que les grandes conférences sur le climat n'aboutissent qu'à des compromis stériles, consensuels parce que à minima et non-contraignants, et dont les modalités d'application restent à l'entière discrétion d'un président américain ou chinois, au gré de ses intérêts du moment.

La dernière CP 25 tenue en décembre 2019 a battu tous les records d'inefficacité: 48 heures de dépassement de temps pour arriver à un communiqué final creux, reportant les décisions attendues… à la prochaine COP ! En attendant, l'empreinte carbone de cet attroupement stérile s'ajoute aux incendies de Californie et d'Australie, pour nous rappeler que le temps n'est plus notre allié.

Le développement durable apparaît comme un alibi de circonstance, le sujet brûlant sur lequel on peut mobiliser des financements pour la recherche et le développement, acheter des brevets, vendre de l'expertise, des équipements dans le cadre de la conduite du changement, et continuer à faire des affaires, drapé dans un nuage de bonnes intentions.

D'ailleurs, le vocable lui-même prête à confusion car selon les latitudes, il ne revêt pas le même contenu: 

-Pour les pays en quête d'émergence, le choix de développement se pose quant aux sources d'énergie, au recyclage des déchets, à l'optimisation des ressources naturelles et au développement du capital humain, pour des populations jeunes et un environnement encore attractif pour des investisseurs. Ces pays qui ont raté le train de la révolution industrielle ont engagé une course contre la montre pour attraper la révolution numérique avant qu'elle dépasse. Pour ceux-là, le développement durable est une approche politique cohérente qui leur permet de s'insérer dans le concert des nations.

A l'opposé, les pays industrialisés ont en commun des taux de croissance proches de zéro, une population vieillissante, un espace de vie surchargé et des réserves financières conséquentes, fruit d'une exploitation intensive des ressources du monde et un art consommé de la thésaurisation. Pour ceux-là, il s'agit plutôt de Maintenance Durable afin de pérenniser les acquis, notamment par les marchés financiers, et la capitalisation des ressources matérielles et humaines des pays en développement, mais également par l'immigration choisie telle qu'elle nous apparaît dans les domaines du sport, des arts, du BTP, du tourisme de l'agroindustrie.

Le développement durable présuppose une attitude bienveillante des parties prenantes faite d'empathie, de solidarité et de responsabilité partagée. La condition du succès est le rééquilibrage de la distribution des richesses par le développement économique local et la gestion des ressources dans un souci d'économie et de justice sociale. Cette approche doit impacter les politiques nationales et internationales, notamment la coopération entre les pays développés et les pays en développement qui jusqu'à présent, a été marquée par un déséquilibre structurel imposé, qui est la source de tous les maux de la terre: traite négrière, colonisation, détérioration des termes de l'échange, accords de partenariat économique, zones de libre-échange.

Toutes ces étapes ont été marquées du sceau de la volonté du plus fort qui chacun sait, est toujours la meilleure.

Le premier engagement sociétal des multinationales ne devrait-il pas être de payer l'impôt sur les sociétés au taux normal dans les pays où elles sont implantées ? Ainsi, elles participeraient à leur juste niveau au développement local, au lieu de négocier des exonérations, le rapatriement des bénéfices, et de pratiquer l'optimisation fiscale.

Sauf que le développement durable a introduit l'idée du dialogue parties prenantes, qui a l'ambition d'être plus inclusif, équitable et consensuel. Nous tenons là un vrai défi car dans la forme comme dans l'esprit, ce dialogue doit aboutir à un rééquilibrage des forces par un système de vases communicants, avec un renoncement des nantis à une partie de leurs privilèges, ce qui se traduirait par un appauvrissement et une perte d'influence, et du côté des pays émergents, par une gestion vertueuse et responsable des ressources et du produit de la croissance.

Une forme de communisme version économie de marché.

Et c'est dans ce cadre que la RSE, Responsabilité sociétale des entreprises présente une alternative intéressante, pour autant qu'elle évolue dans un environnement propice à l'exercice d'une démarche par l'entreprise

Mais ce concept de RSE / Développement durable n'est-il pas source de confusion volontaire - “Au-delà de la loi” ?

Conçue par des idéalistes qui ont réussi à se persuader que l'altruisme et l'équité mènent le monde, la RSE est arrivée dans le jeu comme la nouvelle justice sociale, menée par une entreprise responsable qui comme le colibri, ferait sa part sans esprit de retour.

Certains se souviennent que le marxisme léninisme s'est en son temps présenté au monde comme la solution universelle en prônant les mêmes valeurs.

C'était en oubliant que la nature profonde de l'homme et de l'entreprise qu'il a créée, c'est la volonté de puissance et l'accumulation de richesses, à qui la RSE a donné un paravent de bonnes intentions qui ont été détournées de leur objectif par des experts en communication, au point qu'à l'arrivée, on en retient surtout de belles formules ronflantes que chacune des parties concernées a su accommoder selon son angle de vue, cacophonie garantie.

Les pouvoirs publics et autorités locales y voient un moyen de drainage des capitaux pour financer leur politique, les travailleurs espèrent par ce biais avoir une base de dialogue social équitable, les ONG et la société civile espèrent co-gérer l'entreprise sans avoir à entrer dans le capital ni s'astreindre à la production, et les populations attendent une amélioration de la qualité de service et de la relation clientèle.

Et lorsqu’on met les entreprises devant leurs incohérences et leur inconséquence, la réponse fournie par les dirigeants est invariablement: «nous sommes dans un processus d'amélioration continue, il faut nous laisser le temps de parfaire le système».

Le monde ne s'est pas fait en un jour.

Pendant ce temps, la dégradation de l'environnement et les bénéfices sont immédiats et irréversibles.

C'est ainsi qu'on a vu pulluler des entreprises prétendument socialement engagées qui ont saturé les médias et les réseaux sociaux d'actions de bonne volonté spectaculaires, qui n’avaient d’autre vocation que de donner plus de respectabilité aux moyens par lesquels elles faisaient toujours plus de bénéfices pour satisfaire leurs actionnaires et gratifier les employés auteurs de ces exploits.

Dans cette cacophonie, chacun a voulu voir midi à sa porte : l'entreprise s'est mise à écrire sa propre légende en utilisant tous les supports de promotion disponibles : actions de terrain, presse classique et en ligne, réseaux sociaux, ce qui a fini par créer la suspicion au sein des travailleurs, des pouvoirs publics, de la société civile et des ONG qui, invités dans un espace de dialogue taillé sur mesure par cette entreprise, n'acceptent de se prêter au jeu que dans l'optique d'en tirer un profit immédiat et souvent éphémère. La RSE s'est finalement résumée au mécénat et à l'engagement communautaire, perdant par-là cette notion de développement durable qui pourtant en constituait l'ADN.

Il aura fallu l'instauration des Objectifs du Développement Durable - ODD - pour enfin avoir une base d'évaluation mesurable et sélective qui a mis l'église au milieu du village. Finies les incantations, les professions de foi et les annonces gratuites : l'engagement sociétal de l'entreprise doit à présent se mesurer à l'aune de l'impact vérifié sur les 17 ODD, ce qui contraint les mystificateurs à ravaler leur discours pour laisser la place aux faits.

A ce jour, les avancées les plus significatives en RSE ne sont pas le fait du volontarisme des chefs d'entreprises, mais la conséquence d'un environnement juridique et fiscal de plus en plus contraignant, faisant rendre gorge pour les infractions constatées, ce qui nécessite une veille efficace de la part des lanceurs d'alertes.

Communiquer: Le sens des mots, l'indécence des idées

Avec Internet et les réseaux sociaux, nous sommes entrés de plain-pied dans la civilisation de l'expression frénétique où la vitesse de réaction prime sur la profondeur de la réflexion. Résultat, la communication véhicule des émotions plutôt que des analyses, ce qui rend le citoyen plus fragile, parce que perméable à toutes formes de conditionnements, voire de manipulations.

Aujourd'hui, il est aisé de faire passer des projets virtuels pour des réalisations concrètes, en utilisant des éléments de langages et des supports audiovisuels en images de synthèse pour marquer les opinions publiques. Le temps de comprendre, les électeurs ont déjà donné leur voix aux marchands de rêves, qu'ils sanctionneront au scrutin suivant sans états d'âmes, pour miser sur un autre prestidigitateur du même acabit.

Il est temps de revenir à la raison, au temps de la concertation, de la réflexion qui précède l'action, sous peine de compromettre l'avenir du monde.

Commun… niquer

La nature a doté l'homme de la parole pour masquer ses pensées. L'homme, par son intelligence, y a ajouté l'écriture et l'audiovisuel pour brouiller encore plus les pistes.

Comme il est friand de concepts, il a appelé tout cet arsenal la «communication», qui a donné le verbe générique «communiquer».

Communiquer, étymologiquement composé de deux mots: commun et niquer, signifie en langage trivial… niquer ensemble.

Par conséquent, une communication réussie suppose que chacun des protagonistes prenne en compte les aspirations légitimes de son partenaire et agisse en osmose de sorte qu'à la fin du jour, chacun y trouve satisfaction.

Dès lors que ce rapport est asymétrique, qu'une des parties monopolise l'affaire et reste sourde aux désirs de l’autre, se focalisant exclusivement sur l'image qu'elle a d'elle-même, on bascule dans le plaisir solitaire, narcissique assimilable à la masturbation.

A l'inverse, une publicité tapageuse, mensongère assénée à son public cible de manière frénétique confine au harcèlement, et si au final, de guerre lasse, la victime cède sous la pression et se soumet à la volonté de son bourreau, alors nous sommes là en présence d'un viol.

«Balance ton porc» pourrait bien être la prochaine étape de la guerre de communication déclenchée par l'entreprise narcissique, et fort du facteur amplificateur des réseaux sociaux, nouveau baromètre de référence, la réaction de l'opinion publique pourrait bien être disproportionnée par rapport à l'agression subie.

Qu'on se le dise!

Gauchiste contrarié,

Altermondialiste frustré.

 

UEMOA – CEDEAO : DU CFA A L’ECO : SOUVERAINETE MONETAIRE OU TROMPE-L’ŒIL ?


Chronique

Lâcher le CFA pour mieux contrôler l'ECO ? (Par Mamoudou Ibra Kane)

Par: Mamadou Ibra KANE - Seneweb.com | 22 mai, 2020

Video : https://www.seneweb.com/news/Chronique/lacher-le-cfa-pour-mieux-controler-l-eco_n_318540.html

AUDIO. Le monde se dé-confine. La vie reprend. Lentement mais sûrement. Heureux ceux qui sont proactifs. Malheur à ceux qui sont réactifs. Proactivité ? La France manœuvre ferme envers l'Afrique. Sa proie facile. Après tout il faut songer à l'après-covid ! D'où la dernière trouvaille de l'ancienne puissance colonisatrice : la fin de la monnaie coloniale chère aux pays anciennement colonisés. Il ne fallait surtout pas que le franc CFA survive au virus. Faut-il en vouloir à Paris de se projeter dans la post-crise ? Évidemment non. La France est logique avec elle-même. Après avoir pris les devants, le 21 décembre dernier à Abidjan, en annonçant avec le président ivoirien Alassane Ouattara à ses côtés, la mort prochaine du franc CFA, il ne restait plus au président Emmanuel Macron qu'à signer l'acte de décès, en conseil des ministres à l'Elysée. Alliant ruse, opportunisme et réalisme, en un mot machiavélisme, l'Etat-stratège français fait semblant de renoncer à tout. Mais, au fond, il garde l'essentiel. Disons tout. En tout cas, tout est dans le symbole. En effet, la France sera et restera le "garant financier" du futur ECO comme elle le fut du CFA. Ceux qui rêvaient d'une coupure sèche du cordon ombilical entre l'ancien colonisateur et ses anciens colonisés devront encore patienter. Comme si, hélas, le processus de décolonisation n'était pas encore achevé.

Symbole pour symbole, on aurait assurément apprécié que la fin du CFA et son remplacement par le vieux projet de monnaie unique de la CEDEAO qu'est l'ECO, soient actés lors d'un conseil des ministres à Dakar, Abidjan ou Bamako. Imaginons que le projet de loi mettant fin au franc CFA ait été adopté de manière synchronisée par l'ensemble Etats membres de l'UEMOA et de la CEMAC. Parallélisme des formes et question de souveraineté, chaque président africain aurait pu s'entourer de son gouvernement au complet pour faire de la rupture un acte solennel. Encore, hélas un rendez-vous manqué. Il ne faut surtout pas jeter la pierre à la France. De Gaulle avait déjà prévenu avec sa formule choc : les Etats n'ont pas d'amis ; ils n'ont que des intérêts. Avant lui, un baron anglais avait dit la même chose : "L'Angleterre n'a pas d'amis ou d'ennemis permanents ; elle n'a que des intérêts permanents." Rapporté à la question de la monnaie, les dirigeants de l'UEMOA d'abord et de la CEDEAO ensuite, tiennent là toutes les bonnes raisons de s'affranchir enfin de toutes les tutelles. Un changement de discours s'impose également aux activistes anti-CFA. En l'état actuel des choses, tout sentiment anti-français devient une fuite de responsabilité. La monnaie pour ne pas dire la balle est plutôt dans notre camp.

Situation paradoxale. Au moment où le CFA se meurt et que l'ÉCO tente ou tarde à voir le jour, la gendarmerie sénégalaise réalise la prise du siècle : 1 950 000 000 d'euros en billets noirs, environ 1 300 milliards de francs CFA. Presque le tiers du budget du Sénégal. De quoi s'inquiéter dans une perspective de planche à billets réclamée par certains. Faux billets. Faux médecins. Faux policiers. Faux gendarmes. Faux douaniers. Faux journalistes. Faux décrets. A ce rythme il ne nous reste plus qu'à avoir… des faux présidents. Serions-nous donc des faussaires voire des fossoyeurs de nos propres pays ? Les faits ne plaident pas en notre faveur. Et dire que nous devrions demain battre notre propre monnaie ! Légitime, me diriez-vous certainement ! Mais, le pire ennemi de la monnaie n'est-il pas cette culture du faux ?

Ouattara et Macron annoncent le remplacement du franc CFA par l'ECO en Afrique de l'Ouest

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Par:  RFI -  RFI  |  21 décembre, 2019 à 20:12:08 | Lu 18784 Fois | 182 Commentaires

Ouattara annonce le remplacement du franc CFA par l'éco en Afrique de l'Ouest

Aux côtés d'Emmanuel Macron, le président ivoirien Ouattara a annoncé ce 21 décembre la fin prochaine du franc CFA qui sera remplacé par l'éco. Les huit pays de l'actuelle zone franc en Afrique de l'Ouest vont couper les liens techniques avec le Trésor et la Banque de France, ils ont eux-mêmes cette monnaie sans interférence de la France.

Le franc CFA va disparaitre de l'Afrique de l'Ouest. Le président Ouattara l'a annoncé ce vendredi 21 décembre: «en accord avec les autres chefs d'État de l'UEMOA, nous avons décidé de faire une réforme du franc CFA». Les huit pays qui utilisent cette monnaie vont adopter une nouvelle devise qui sera baptisée l'éco. Cet éco à huit pays deviendra donc le noyau dur du futur dispositif de la CEDEAO.

Les liens techniques avec la France sont en grande partie coupés, c'est-à-dire que Paris ne cogérera plus la monnaie de ces huit pays. Les réserves de changement ne seront pas plus centralisées par la France et les réponses de 50% de ces réserves sur le fameux compte d'opération du Trésor français disparait.

C'était une revendication forte d'une partie de l'opinion publique ouest-africaine. «Paris voulait désamorcer cette critique», comme l'explique un diplomate. De plus, la France se retire des instances de gestion du CFA. Jusqu'à présent, Paris avait un représentant à la BCEAO, la Banque centrale des états d'Afrique de l'Ouest, un autre à la commission bancaire et un dernier au conseil de politique monétaire.

Paris, de cogestionnaire à garant

L'éco conservera une parité fixe avec l'euro, ce qui garantit la même valeur de la monnaie pour les consommateurs. Cette disposition pourrait évoluer avec le temps et en fonction de la volonté des autres pays de la CEDEAO voudrait rejoindre l'éco.

Enfin, la France garde un rôle de garant en cas de crise. Si jamais les pays de la zone éco n’ont plus de quoi payer leurs importations, la France le fera. Reste que si l'on en arrive là, Paris se réserve le droit de revenir dans une instance de décision, en l’occurrence le conseil de politique monétaire.

En définitive, Paris passe d’un rôle de cogestionnaire à un rôle de garant. Mais ce faisant, la France s’est assurée de conserver une relation économique particulière avec les pays de la zone UEMOA. Paris affirme que cette évolution est rendue nécessaire par le projet de monnaie commune de la CEDEAO.

VIDEO : Du CFA à l’ECO : motion de rejet à l’Assemblée Nationale française par le Parti Communiste

VIDEO : Du CFA à l’ECO : motion de rejet à l’Assemblée Nationale française par le Parti Communiste

Fin du franc CFA : L'Afrique de l'Ouest gagne "en indépendance politique"

Par: RFI - RFI | 22 décembre, 2019 à 11:12:43  |

Fin du franc CFA : L'Afrique de l'Ouest gagne "en indépendance politique"

 

Le président ivoirien, Alassane Ouattara a annoncé ce samedi la fin prochaine du franc CFA en Afrique de l'Ouest qui sera remplacé par l'éco. Un nouvel accord monétaire en ce sens a été signé à Abidjan. Et l'éco sera rattaché à l'euro. Retrouvez notre édition spéciale dans ce papier.

Les huit pays de l'actuelle zone franc en Afrique de l'Ouest vont couper les liens techniques avec le Trésor et la Banque de France. Ils géreront eux-mêmes cette monnaie sans interférence de Paris. Mais la France continuera d'offrir des garanties en cas de crise monétaire. L'éco sera rattaché à l'euro.

La France, solide filet en cas de crise économique

"Lorsqu'on touche au monétaire, on touche au politique", affirme un économiste interrogé par RFI. En clair, dit-il, la dimension politique de passer à l'éco est essentielle et peut rendre confiance à des pays et à leur intégration.

L'éco reste arrimé à l'euro. Et la France, si elle quitte les instances de gouvernance de la monnaie ouest-africaine, demeure un solide filet en cas de crise économique et financière dans la sous-région.

"On pourrait dire que l'Afrique de l'Ouest gagne en indépendance politique, apporte du baume au cœur aux investisseurs nationaux et préserve un lien étroit avec les investisseurs étrangers", note un analyste monétaire. C'est une première étape, qui, selon cet analyste, est importante, parce que dans un premier temps, il faut se presser doucement, et dans un second temps, il ne faut pas aujourd'hui décrocher l'Afrique de l'Ouest de l'Afrique centrale.

Dans un avenir plus ou moins lointain, assure-t-il, les discussions porteront sur l'éco, non plus rattaché au seul euro, mais aussi à d'autres monnaies.

La fin du franc CFA ne va rien changer au quotidien

"C'est une étape dans la bonne direction parce que cela clarifie le débat. Les Français ne sont plus dans les organes de gouvernance. Nous choisissons une parité fixe arrimée sur l'euro, et demandons spécifiquement à la France de garantir cette parité", explique Abdourahmane Sarr, économiste sénégalais, président du Centre de financement du développement économique local (Cefdel).

Pour lui, la fin du franc CFA est d'abord un moyen de dépassionner le débat autour de la monnaie unique arrimée à l'euro. "La discussion maintenant va changer. Ce sera: est-ce que cet arrimage et cette garantie sont quelque chose de bien ou pas pour l'économie ? À ce moment-là, les économistes pourront débattre sans que le débat ne soit pollué par des questions qui dans le fond ne sont pas très importantes", analyse-t-il.

L'économiste sénégalais affirme que la fin du franc CFA ne va rien changer au quotidien "à part le fait que la perception d'ingérence de représentants de la France dans les organes de gouvernance ne sera plus là. Mais dans le fond, rien n'a changé".

 

Comprendre le remplacement du Franc CFA par l'éco

Par: Seneweb News - Seneweb.com | 23 décembre, 2019

 

VIDEO:

https://www.seneweb.com/news/Video/comprendre-le-remplacement-du-franc-cfa-_n_304216.html

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Communiqué des intellectuels africains sur les réformes du Franc CFA

Par Kady KONATE - AfrikMag

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Les reformes du Franc CFA annoncées le 21 décembre en Côte d’Ivoire creusent jusqu’alors des débats en trombe déconcertants cristallisant les opinions publiques africaines. Nous publions ci-dessous la déclaration intégrale d’un collectif des figures d’intellectuels historiques .

« Le 21 décembre 2019, le président ivoirien Alassane Ouattara et son homologue français Emmanuel Macron ont annoncé trois réformes du franc CFA, la monnaie coloniale créée le 26 décembre 1945 et qui circule encore dans quatorze pays africains dont les huit de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA). 

Les réformes prévues sont les suivantes : le franc CFA de l’Afrique de l’ouest sera renommé ECO ; la Banque centrale des États de l’Afrique de l’ouest (BCEAO) ne sera plus dans l’obligation de déposer ses réserves de change auprès du Trésor français ; la France n’aura plus de représentants au sein des organes de la BCEAO.

Nous précisons que ces évolutions ne résultent pas de la bienveillance du gouvernement français et de son allié ivoirien, eux qui ont longtemps défendu le statu quo. Le déclencheur a plutôt été la mobilisation pour l’abolition du franc CFA, portée depuis quelques années par des mouvements sociaux panafricanistes, des intellectuels, des citoyens ordinaires, etc. dans le continent et dans la diaspora. C’est donc l’occasion de féliciter et d’encourager ceux et celles qui œuvrent sans relâche à l’émancipation collective de l’Afrique. 

Il serait cependant prématuré de crier victoire. Si certains symboles gênants, associés au franc CFA, vont disparaître, les liens de subordination monétaire sur le plan légal et sur le plan de la conduite de la politique monétaire restent en place.

Tout d’abord, la France maintient toujours le rôle officiel de garant ; un rôle, il faut le souligner, qu’elle n’a jamais vraiment exercé pour la simple raison que ce sont les Africains eux-mêmes et les ressources à leur disposition qui ont toujours permis l’émission et la convertibilité du franc CFA.

Ensuite, la Banque de France abrite toujours l’essentiel du stock d’or monétaire des pays de l’UEMOA. Enfin, la parité du franc CFA vis-à-vis de l’euro est toujours maintenue. Ce qui est une façon non seulement d’accorder une préférence commerciale à la zone euro mais également de soumettre la politique monétaire des pays de l’UEMOA à celle de la Banque centrale européenne (BCE).

Par ailleurs, l’annonce que le franc CFA  sera renommé « ECO » laisse perplexe. Rappelons que ECO est le nom retenu, en juin 2019, à Abuja, par les  quinze pays de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest) pour désigner la monnaie unique régionale ouest-africaine en gestation. Ce projet a été initié au sein de la CEDEAO depuis 1983 et sa mise en œuvre a fait entretemps l’objet de plusieurs reports. 

Pourquoi donc les pays de l’UEMOA devraient-ils s’arroger le droit de rebaptiser ECO le franc CFA alors qu’ils n’ont pas encore tous rempli les critères d’entrée dans la zone monétaire ECO définis au sein de la CEDEAO ? Comment comprendre cette déclaration hâtive de Macron et Ouattara qui maintient la France en tant que prétendu « garant » du franc CFA renommé ECO, ainsi que la parité fixe avec l’euro alors que la CEDEAO requiert pour le lancement de sa monnaie unique le retrait total de la France de la gestion monétaire des pays de l’UEMOA ?

Sans mentionner que la CEDEAO a fait le choix d’adosser sa monnaie à un panier de devises.nNe faudrait-il pas craindre une tentative de sabotage surtout au regard de la volonté maintes fois exprimée par le gouvernement français d’élargir l’usage du franc CFA aux pays anglophones ouest-africains et d’isoler le Nigeria ?

Devant la confusion actuelle, amplifiée plutôt que dissipée par les différents communiqués de la CEDEAO, de la BCEAO, de la République du Nigeria, de la République du Ghana, etc. nous invitons les citoyens des États membres de la CEDEAO à faire preuve de plus de vigilance concernant les récents développements liés au franc CFA et à l’ECO. 

S’il faut saluer l’émergence d’un débat public, porté par des intellectuels et acteurs de la société civile en Afrique, sur la question du franc CFA, nous devons en même temps déplorer le mutisme inquiétant de nos chefs d’État et de gouvernement sur une question aussi importante sur le plan symbolique, politique, économique et psychosociologique. 

Face au déficit de communication des gouvernements africains sur un sujet qui engage l’avenir de plus de 300 millions d’habitants en Afrique de l’ouest et celui de l’intégration régionale, nous demandons :

– Aux chefs d’État de l’UEMOA et de la CEDEAO de prendre leurs responsabilités auprès de leurs peuples respectifs en ouvrant un débat populaire et inclusif sur les réformes en cours. En effet, la souveraineté est d’abord l’affaire des peuples qui, il faut le rappeler à nouveau, ont de leur propre initiative posé le débat sur le franc CFA et sur la souveraineté monétaire de l’Afrique de l’ouest.

– Aux chefs d’État de l’UEMOA d’informer clairement leurs concitoyens sur les surprenantes déclarations d’Alassane Ouattara et d’Emmanuel Macron qui semblent les engager, sans qu’ils aient eu encore à en référer à leur parlement et aux autres institutions républicaines pertinentes.

– Aux spécialistes des questions économiques et monétaires au sein de la CEDEAO, de l’UEMOA et de la BCEAO de participer activement au débat public sur les reformes en question, en confrontant leurs propositions aux objections soulevées par des chercheurs et leaders indépendants de la société civile.

– Aux peuples des États membres de la CEDEAO de rester  mobilisés dans le débat citoyen enclenché sur la sortie définitive de la France de la gestion monétaire de nos États et sur l’adoption de systèmes monétaires souverains au service des peuples et qui s’inscrivent dans la dynamique de mise en place d’une Fédération des États de l’Afrique de l’ouest.

Nous réaffirmons que la question de la monnaie est fondamentalement politique et que la réponse ne peut être principalement technique. Instrument et symbole de souveraineté, la monnaie doit être l’émanation des aspirations profondes des peuples d’Afrique qui doivent être en permanence associés aux processus en cours.

A cet égard, nous sommes d’avis que les critères de convergence ne constituent pas une approche appropriée. Ils doivent être revus et éventuellement remplacés par des indicateurs de nature plus politique prenant en compte les défis de l’heure : l’industrialisation, l’autonomisation des producteurs locaux, la compétitivité des entreprises nationales de la zone CEDEAO, le plein emploi et la transformation écologique. 

Si nous aspirons à une souveraineté économique et monétaire de la CEDEAO, c’est parce qu’elle est la voie royale pour mettre fin à l’extraversion économique, à l’endettement en devises étrangères,  aux flux financiers illicites et aux autres facteurs contribuant à des formes de croissance économique non inclusive. 

Fait à Dakar, le 06 janvier 2020

Listes des noms de personnalités qui ont signé le texte :

Makhily Gassama, Essayiste, Ancien Ministre Ancien Ambassadeur (Sénégal)

Boubacar Boris Diop, Écrivain (Sénégal)

Aminata Dramane Traoré, Écrivaine, ancienne Ministre de la Culture et Présidente du Groupe « États généraux du franc CFA et des Alternatives » (Mali)

Mariam Sankara, Économiste (Burkina Faso)

Odile Sankara, Artiste, Comédienne (Burkina Faso)

Odile Tobner, Universitaire, Essayiste (Cameroun)

Koulsy Lamko, Universitaire, Ecrivain, (Tchad / Mexique)

Mamadou Koulibaly, Economiste et homme politique (Côte d’Ivoire)

Mamadou Diop Decroix, Ancien Ministre d’Etat, Secrétaire du Parti Africain pour la Démocratie et le Socialisme (Sénégal)

Rosa Amelia​Plumelle-uribe, Essayiste, « militante pour la dignité humaine » (France)

Tony Obeng, Analyste des questions de développement, ancien Professeur à l’IDEP ? Diplomate à la retraite (Ghana) 

Stanislas Spero Adotevi, Universitaire, Essayiste, Ancien Directeur régional de l’UNICEF (Bénin / Burkina Faso

Nathalie Yamb, femme politique et consultante (Côte d’Ivoire)

Bouchentouf-Siagh Zohra, Universitaire, Essayiste (Algérie / Autriche)

Véronique Tadjo, Écrivaine, Universitaire (Côte d’Ivoire / Afrique du Sud)

Ibrahim Abdullah, Professeur d’Histoire (Sierra Leone)

Cheick Oumar Sissoko, Cinéaste et ancien Ministre (Mali)

Antonin Zigoli, Universitaire, Université Félix Houphouët Boigny (Côte d’Ivoire)

Ndongo Samba Sylla, Économiste et écrivain (Sénégal)

Issa N’diaye, Philosophe et ancien Ministre (Mali)

Elimane Haby Kane, Sociologue (Sénégal)

Ngaba Ngadoy, Économiste et Financier (Tchad)

Rahmane Idrissa, Politiste (Pays Bas, Niger)

Amadou Tidiane Wone, Ancien Ministre, Ancien Ambassadeur (Sénégal)

Adama Samaké, Universitaire, Université Félix Houphouët Boigny (Côte d’Ivoire)

Mamadou Diop, Ancien Haut fonctionnaire, Essayiste (Sénégal)

Dialo Diop, Médecin biologiste et homme politique (Sénégal)

Cheikh Hamala Diop, Économiste et interprète de conférence (Sénégal)

Sandjiman Mamder, Économiste, Haut fonctionnaire à la retraite, BIT/ONU (Tchad / Genève)

Raphaël Eklunatey, Biologiste (Togo / Genève)

Martin Bire, Spécialiste en Education (Tchad / Prague)

Mouhamed Ly, Anthropologue (Sénégal)

Crystal Simeoni, Économiste féministe (Kenya)

Cheikh Oumar Diagne, Économiste (Sénégal)

Amadou Elimane Kane, Écrivain et Poète (Sénégal) 

Coumba Touré, Coordinatrice Africans Rising (Sénégal)

Jibrin Ibrahim, Chercheur au Centre for Democracy and Development (Nigeria)

Elom 20ce, Artiste et Rappeur (Togo)

Redge Nkosi, Économiste (Afrique du Sud)

Ismail Rashid, Historien (Sierra Leone / USA)

Amy Niang, Universitaire (Afrique du Sud)

Mouhamadou Lamine Sagna, Anthropologue (Nigeria / Sénégal)

Many Camara, Sociologue (Mali) 

Versa Mshana, Avocate (Tanzanie)

Mahmoud Ibrahime, Historien (Comores)

Carlos Vamain, Jurisconsulte, Ancien Ministre (Guinée-Bissau)

George Klay Kieh, Jr., Universitaire (Libéria)

Momar Sokhna Diop, Professeur d’Économie et de gestion, Écrivain (Sénégal / France)

Cheikh Gueye, Géographe et Secrétaire permanent du Rapport Alternatif sur l’Afrique (Sénégal)

Lionel Zevounou, Maître de conférences en droit public (France)

Mouhamadou Ngouda Mboup, Enseignant-Chercheur en droit public (Sénégal)

Luc Damida, Chercheur ( Burkina Faso)

Source: financialafrik

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Le franc CFA, toute une histoire

Par: Par Sabine Cessou - RFI | 24 décembre, 2019

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Le franc CFA, toute une histoire

 

Le président ivoirien Alassane Ouattara a annoncé, ce 21 décembre, aux côtés d'Emmanuel Macron, la disparition prochaine du FCFA au profit de l'éco, en Afrique de l'Ouest. La devise créée en 1945 par la France dans les deux régions africaines de son empire colonial circule dans 14 pays d'Afrique de l'Ouest et centrale qui forment la "zone franc", en plus des Comores. Soit 173 millions d'habitants. Depuis les indépendances, elle a évolué en ne cessant de faire débat.

Le franc des Colonies françaises d'Afrique (CFA) est né par décret, en même temps que celui des Colonies françaises du Pacifique (CFP, Indochine), le 25 décembre 1945. Ce jour-là, le gouvernement provisoire de la France dirigé par le général de Gaulle ratifie les accords de Bretton Woods. Il fait sa première déclaration de parité franc-dollar au tout nouveau Fonds monétaire international (FMI). Il s'agit d'une mesure technique sans grand débat, comme le signale l'intitulé du décret, "fixant la valeur de certaines monnaies des territoires d'outre-mer libellées en francs".

La "zone franc" créée de facto par la France avec ses colonies, où elle émet localement des monnaies qui portent le nom de "franc", a déjà été officialisée en 1939, par le biais d'un autre décret instaurant le contrôle des changes en métropole et "Outre-Mer". Cette zone se trouve scindée en deux en 1945 : l'inflation a été moins forte dans les colonies durant la Seconde Guerre mondiale que dans la métropole. Du coup, lors de sa création, le franc CFA est plus fort que le franc français (FF), puisqu'il vaut 1,70 FF. Il repose sur quatre grands principes : parité fixe garantie par le Trésor public français, convertibilité et liberté des flux de capitaux dans la zone franc, en plus de la centralisation des réserves de devises des instituts d'émissions locaux, déposées auprès du Trésor public français. Lorsque le franc français est dévalué le 17 octobre 1948 par rapport au dollar, la valeur du CFA se renforce encore, de manière mécanique. Elle passe à 2 FF.

Les indépendances

Au moment des Indépendances, les choses se compliquent. En 1954, l'Indochine disparaît et avec elle le CFP. Le Vietnam, le Laos et le Cambodge vont créer leurs devises respectives, le dong, le kip et le riel. Le Maroc et la Tunisie, indépendants en 1955 et 1956, remplacent les francs "tunisien" et "marocain", l'un en restaurant le dirham en 1959, l'autre en frappant sa monnaie, le dinar, en 1958. L'Algérie, colonie française de peuplement où le franc français se trouve en circulation, instaure le dinar en 1964, deux ans après son indépendance.

En 1958, le "non" de la Guinée de Sékou Touré à l'Union française proposée par De Gaulle signifie une sortie de la zone franc, accomplie en 1960 avec la création d'un "franc guinéen". Cette devise coupe les ponts avec l'ex-métropole, contrairement à ce que laisse supposer son nom. Au Mali de Modibo Keïta, le Parlement refuse de signer en mai 1962 le traité portant création de l'Union monétaire ouest-africaine (UMOA), qui deviendra l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), en 1994. Le pays sort dans la foulée de la zone franc et fait fabriquer le "franc malien" en Tchécoslovaquie. Il rejoindra la zone franc bien plus tard, en 1984. Quant au président du Togo fraîchement indépendant, Sylvanus Olympio, il rejette aussi le traité UMOA et entend battre monnaie. Il est assassiné le 13 janvier 1963, dans des conditions restées mystérieuses, au moment où sont publiés les statuts d'une Banque centrale togolaise qui ne verra pas le jour.

De son côté, le CFA ne change pas d'acronyme, mais devient en 1958 le franc de la "Communauté française d'Afrique". Après les indépendances, en 1962, son "F" correspond plutôt à "la Communauté financière d'Afrique" dans l'UMOA (Côte d'Ivoire, Dahomey, Haute-Volta, Niger, Sénégal, Togo). Nuance : le même franc est celui de la "Coopération financière en Afrique centrale" pour les membres de l'Union monétaire de l'Afrique centrale (UMAC), Cameroun, Gabon, Congo-Brazzaville, République centrafricaine et Tchad. Si l'on parle de CFA partout, la devise est scindée en deux, chaque région ayant son code ISO international, XOF et XAF. Les deux CFA sont convertibles avec toutes les devises, ainsi qu'entre eux. Le franc comorien (KMF) fait partie de la famille, en tant que cousin éloigné de la zone franc.

Nouveau franc français et vent de fronde

Lorsque le nouveau franc français est mis en circulation le 1er janvier 1960 par le général De Gaulle, pour une valeur de 100 anciens francs, le CFA change encore mécaniquement de valeur, passant de 2 à 0,02 FF. Les critiques de la période des indépendances vont ressurgir. L'économiste égyptien Samir Amin préconise en 1969, dans un rapport qui porte son nom, le passage à des monnaies nationales, avec le CFA comme monnaie commune et non plus unique. Il reprend des recommandations déjà faites en 1960 par le Sénégalais Daniel Cabou, gouverneur de Saint-Louis, qui plaidait pour une "union africaine des paiements".

Un mouvement de fronde part de la fin de la convertibilité du dollar en or, décidée par Nixon en août 1971, mettant fin au régime de change fixe hérité de Bretton Woods. À partir de cette date, le dollar se met à fluctuer. "Les Africains se disent qu'avec la hausse des cours des matières premières, ils perdent au change en raison de la parité fixe et non flottante du CFA par rapport au FF, explique l'économiste togolais Kako Nubukpo, de manière factuelle, sur un sujet qu'il connaît bien, étant l'un des principaux détracteurs actuels du CFA. Ils aspirent à une monnaie plus forte qui leur permettrait d'importer plus."

Le président du Niger Hamani Diori, qui avait commandé le rapport Samir Amin, est soutenu par le Congo-Brazzaville, le Cameroun et le Togo. Il demande en janvier 1972 à Georges Pompidou, son homologue français, une réforme de la zone franc. La fronde incite la Mauritanie à quitter la zone pour créer l'ouguiya, et Madagascar à renouveler l'ariary en lieu et place du franc malgache (ou "franc malgache") en mai 1973.

La révision du système CFA est accordée en décembre 1973, mais pas dans les termes préconisés par Samir Amin, auteur de L'Afrique de l'Ouest bloquée, L'économie politique de la colonisation, 1880-1970 (Éditions de minuit, Paris, 1971). La principale mesure fait passer de 100% à 65% le niveau des réserves de devises placées auprès du Trésor français. La Banque ouest-africaine de développement (BOAD) est créée, avec son siège placé à Lomé, pour faire plaisir au général Eyadéma, qui est un osé tenir tête à Pompidou sur le CFA lors d'une visite officielle, en novembre 1972. Le " rapatriement "des sièges des banques centrales africaines de la zone franc, situés rue du Colisée, dans le VIIIe arrondissement de Paris, est décidé. L'africanisation des cadres commence alors, même si physiquement, ce n'est qu '

La dévaluation du 12 janvier 1994

La Guinée équatoriale, seul pays hispanophone d'Afrique, entre dans la zone d'influence de la France et adopté le CFA en 1985, onze ans avant la découverte de ses gisements de pétrole. Sur le continent, les années 1980 sont celles de l'ajustement structurel, une mise au pas des pays endettés selon la doxa libérale en cours au FMI et à la Banque mondiale, avec dérégulation de l'économie et ouverture au libre marché. Cet effort d'ajustement réel est fait au prix de nombreux sacrifices, au lieu d'une évaluation monétaire que rejettent les chefs d'État de la zone franc. Les salaires sont bloqués, les embauches gelées dans l'administration et des coupes claires font partout, notamment dans les dépenses sociales.

La chute des cours des matières premières et la dépréciation du dollar, à partir de 1985, font que les recettes à l'exportation diminuent, mettant à mal les budgets, et par ricochet le niveau de la dette extérieure. L'échec de l'ajustement structurel conduit la France à envisager une dévaluation monétaire, sous les auspices du FMI, qui suspend son fils aide aux pays de la zone franc à partir de 1991. Dès août 1993, la convertibilité du CFA est suspendue, en raison des rumeurs de dévaluation, sur fond de fuite des capitaux hors de la zone franc. Il devient impossible de changer des CFA contre toute devise hors de la zone franc, et impossible de convertir des XOF en XAF, même dans la zone franc - une mesure contre la spéculation qui n'a jamais été levée par la suite. En septembre 1993, la "doctrine d'Abidjan", ou "

Dévaluer ou pas? Edouard Balladur est pour, mais le président ivoirien Félix Houphouët-Boigny est farouchement contre. Le président français François Mitterrand écoute les deux avis, mais ne tranche pas. En décembre 1993, la mort d'Houphouët donne les mains libres aux partisans de la dévaluation. Sous couvert d'un sommet des chefs d'État de la zone franc au sujet d'Air Afrique à Dakar, une dévaluation de 50% du CFA et de 33% du franc comorien est imposée le 11 janvier 1994 à 14 chefs d'État africain, qui signent à contrecœur en présence de Michel Roussin, ministre français de la Coopération et de Michel Camdessus, directeur général du FMI. Du jour au lendemain, le CFA passe de 0,02 FF à 0,01 FF. Les populations des pays de la zone franc voient leur pouvoir d'achat divisé par deux. Des mesures d'accompagnement suivies,

Arrimage à l'euro en 1999 et polémiques

En 1997, c'est au tour de la Guinée-Bissau, ancienne colonie portugaise, entre dans la zone franc, ce qu'elle demande depuis la fin des années 1980 pour sortir de sa spirale inflationniste (45% en 1995). Au moment du traité de Maastricht, Paris a fait valoir le principe de «subsidiarité» pour continuer à gérer la zone franc, qu'elle ne peut plus réformer, en principe, sans consulter ses partenaires européens. Que signifie la subsidiarité? "La responsabilité d'une action publique, dès que nécessaire, revient à l'entité compétente la plus proche de ceux qui sont directement concernés par cette action", renseigne Wikipédia. Le principal argument de la France en faveur du CFA: la stabilité économique et l'assurance d'une bonne gestion,

Les débats, portés entre autres par des économistes africains tels que Kako Nubukpo et Mamadou Koulibaly, opposant ivoirien, ont gagné en intensité en 2015, dans un contexte de croissance non inclusif en Afrique et de crise en Europe (dette publique en Grèce, campagne du Brexit). Ces économistes estiment que le CFA est trop fort, par rapport à la faiblesse des économies où il circule, et qu'il pénalise les exportations. Reprise par les tenants d'un certain nationalisme africain comme Kemi Seba, qui a brûlé un billet de FCFA en septembre 2017, la polémique ne fait qu'enfler, alors qu'elle ne devrait, en toute logique, ne pas avoir de raison d 'être. Le sociologue sénégalais Lamine Sagna, spécialiste de l'argent, rappelle en effet que ces débats vont devenir caducs avec l'adoption de la monnaie commune ouest-africaine, l'éco, prévu par la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest pour 2020. Ce 21 décembre, le président Ouattara a donc annoncé, en présence du chef de l'État français Emmanuel Macron, que l'éco remplacera le FCFA prochainement en Afrique de l'Ouest. Les huit pays de l'actuelle zone franc dans cette partie du continent vont, par ailleurs, couper les liens techniques avec le Trésor et la Banque de France, ils gèrent eux-mêmes cette monnaie sans interférence de la France.

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